Les professionnels consultés, s'ils se disent frustrés, comprennent la volonté des autorités monétaires et financières, ainsi que le GPBM, d'aller vite pour exécuter la volonté royale.
Selon nos informations, les banques participatives n'ont pas été associées à la réflexion qui a abouti à la mise en place de ce programme.
Sur le volet opérationnel du programme, il est également difficile d'intégrer ces banques. Le mécanisme de refinancement prévu par Bank Al-Maghrib est incompatible avec l'activité participative. Bien que certains professionnels pensent qu'il est possible de faire jouer le dispositif de la Wakala Bil Istitmar entre Bank Al-Maghrib et ces banques, à condition que la Banque centrale interprète ce mode de financement comme un refinancement.
La «Wakala Bil Istitmar» est un mandat de gestion qui permet à une banque mandataire de recevoir des fonds d’un bailleur de fonds pour les investir dans des projets, et ce moyennant une commission. Le bailleur de fonds peut être une banque ou tout autre investisseur qualifié.
Outre l'accès au refinancement, se pose pour les banques participatives la contrainte de la garantie CCG, plaque tournante du nouveau dispositif. Car bien que la Caisse centrale de garantie dispose depuis quelques mois de l’autorisation de Bank Al-Maghrib pour le lancement de sa fenêtre participative, le Conseil supérieur des Ouléma doit encore se prononcer sur les contrats des produits de garantie participatifs.
Pas d'accès au refinancement, ni à la garantie. Les parties prenantes du programme ont donc vraisemblablement écarté les banques participatives du dispositif, du moins dans sa première mouture. Une situation frustrante pour plusieurs acteurs interrogés par nos soins, qui disent tout de même comprendre que l'urgence de la situation justifiait de ne pas attendre les banques participatives. Certaines essayent tout de même de lancer des offres d'accompagnement pour les TPE et PME où le besoin d'équipement en produits bancaires reste important, d'autant plus que ces banques ont de vrais atouts pour les entrepreneurs dans le financement des équipements ou la banque au quotidien.
Activité sous contrainte
Retard dans le lancement du Takaful, progression timide des dépôts, une validation des contrats au compte-goutte..., les banques participatives subissent des contraintes de toutes parts, ce qui ne permet pas au modèle participatif marocain d'exprimer tout son potentiel. Le non-participation au programme Intilaka n'est finalement qu'une conséquence de cette situation.
Pourtant, sur le papier, le modèle a de quoi plaire. Le Maroc s'était distingué par son approche au moment du lancement de ce marché avec 5 banques et trois fenêtres d'un coup. Mais le retard des autres composantes de l'écosystème, assurances et marché des capitaux en l'occurrence, poussent la quasi-totalité des acteurs à revoir leur businessplan à la baisse. Le manque de coordination entre les différents régulateurs est pointé du doigt alors que dans d'autres pays, tout est centralisé chez un seul régulateur, généralement la Banque centrale.
On notera tout de même que le secteur boucle 2019 sur des encours de financement de plus de 9,3 Mds de dirhams, en hausse de 103,2% par rapport à 2018. Si la demande progresse fortement, on note que les ces banques sont limitées par des dépôts de la clientèle d'à peine 3 Mds de dirhams. Les banques participatives ont dû faire appel à la Wakala Bil Istitmar et aux dépôts de leurs actionnaires et maisons-mères à hauteur de 3,13 Mds supplémentaires pour soutenir leurs financements.