Marché obligataire: la hausse des taux est-elle durable ?

Marché obligataire: la hausse des taux est-elle durable ?

     En l’absence d’une nouvelle baisse du taux directeur en décembre prochain, d’une nouvelle sortie en devise ou encore de nouvelles opérations de privatisation, la tendance haussière des taux devrait se poursuivre au moins d’ici le premier trimestre 2021, estime AGR.

 

La dernière adjudication du Trésor du mois de novembre 2020 reflète la poursuite de la tendance haussière des taux obligataires primaires amorcée il y a moins d'un mois, selon Attijari Global Research (AGR).

Néanmoins, cette dernière séance révèle une accélération assez particulière de ce trend haussier avec des variations significatives particulièrement pour le segment long terme, jusqu’à présent épargné, relève AGR dans un récent rapport.

Dans ce sens, les taux de rendements des maturités 2 ans, 10 ans et 20 ans s’apprécient de 21, 24 et 20 points de base (PBS) respectivement, signant ainsi des plus hauts annuels. Au terme de cette séance d’adjudication, la maturité 20 ans est passée au-dessus du seuil symbolique des 3,0% pour s’établir à 3,1%.

"Cette nouvelle orientation haussière des taux nous interpelle quant à ses origines, sa soutenabilité sur le moyen terme ainsi que ses conséquences sur l’exigence de rentabilité des investisseurs", commente AGR.

À cet effet, AGR constate que les besoins de financement du Trésor sont conséquents d’ici la fin de l’année en raison des pressions significatives sur les finances publiques de l’État. Cette situation se traduit par un creusement significatif du déficit budgétaire en 2020.

La sortie à l’international du Trésor de 1 milliard d'euros en octobre dernier n’a pas permis un allègement du recours massif au marché domestique, explique AGR, rappelant que le principal objectif de cette opération était le remboursement d’une tombée équivalente durant le même mois.

AGR souligne également que le relèvement des exigences de rentabilité des investisseurs est induit par le creusement de la liquidité bancaire qui a atteint 95,1 milliards de dirhams (MMDH) à fin octobre soit une hausse de près de 30,0% en glissement annuel. Cette situation se reflète clairement sur la dynamique de la Demande des opérateurs du marché financier.

Les anticipations haussières de la courbe des Taux sur le moyen terme sont alimentées par la politique budgétaire expansionniste en 2021 visant à soutenir la reprise économique escomptée, explique le rapport, rappelant que les besoins de financements du Trésor seraient toujours importants en raison d’un déficit budgétaire estimé à 6,5% en 2021 et 7,5% en 2020 contre un niveau réalisé de 4,1% en 2019. En l’absence d’une nouvelle baisse du taux directeur en décembre prochain, d’une nouvelle sortie en devise ou encore de nouvelles opérations de privatisation, la tendance haussière des taux devrait se poursuivre au moins d’ici le premier trimestre 2021, estime AGR.

À deux mois de la fin d’année, le taux de réalisation du déficit budgétaire s’élève à 61% par rapport aux estimations de la LFR 2020 contre 95,0% en octobre 2019. "Ce décalage porte les besoins de financement bruts du Trésor à près de 46,0 MMDH d’ici la fin de l’année, selon nos estimations", fait valoir le rapport. Compte tenu d’un faible taux d’exécution des financements extérieurs de 54%, le Trésor a intensifié son recours au marché intérieur durant ce dernier trimestre.

Durant le seul mois de novembre, le Trésor satisfait quasiment la moitié de ses besoins restants d’ici la fin de l’année. En effet, les levées brutes s’établissent à plus de 23,9 MMDH en un mois par rapport à un besoin annoncé initialement de 15,3 MMDH sur la même période. Il s’agit de la plus forte levée mensuelle en 2020, soit 7x plus que la levée d’octobre et plus que le double de la moyenne annuelle des levées. Dans le même sens, le taux de satisfaction de la Demande des investisseurs du mois de novembre s’érige parmi les niveaux les plus élevés en 2020 soit de 71% contre une moyenne annuelle de 40%.

En l’absence de nouvelles sorties à l’international et tenant compte des besoins de financement croissants du Trésor en 2021, les pressions sur le marché domestique devraient en toute logique s’accentuer. "Ce scénario justifie en grande partie les anticipations haussières des taux durant les mois à venir", fait observer AGR, ajoutant qu'au niveau de la demande, le durcissement visible des conditions de liquidité devrait réorienter à la hausse les exigences de rentabilité des investisseurs.

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