Badr Kanouni, président du directoire d'Al Omrane
Première sortie réussie pour la holding sur le marché obligataire, avec une demande représentant plus de 8 fois l'offre.
Le Groupe souhaite se positionner en tant qu’émetteur régulier.
Premier appel réussi avec brio pour le Groupe Al Omrane sur le marché financier local. L’emprunt obligataire lancé par le promoteur public a été bouclé sur un taux de souscription de 820% ! Cette première sortie sur le marché des capitaux n’est que l’aboutissement d’un long travail de restructuration et de modernisation opéré par le Groupe après sa fusion en 2007.
«Entre 2011-2015, Al Omrane s’est engagé dans de profondes réformes managériales pour la modernisation de sa gestion ainsi que le développement et la mutualisation de l’expertise métier», explique Badre Kanouni, président du Groupe, dans un discours orienté marchés.
Ces réformes incluaient également des ajustements au niveau de la stratégie financière du Groupe, qui avait, dès 2014, intégré un service de Cash Pooling bancaire, lui permettant de maîtriser la gestion de ces flux financiers issus de ses différentes filiales.
«Parallèlement, le Groupe a travaillé, depuis la même date, au renforcement de la transparence et à la consolidation des principes de bonne gouvernance qui ont été d’ailleurs érigés en priorités par le gouvernement», indique-t-il. Preuve à l’appui : le Groupe dispose aujourd’hui d’un comité d’audit, d’un comité de direction et d’un autre exécutif, qui se réunissent à une fréquence bimensuelle, à en croire Kanouni.
Appel du pied appuyé au marché
Ce n’est donc pas une surprise si le papier de la dette d’Al Omrane a été autant recherché par les investisseurs. La holding ne compte d’ailleurs pas s’arrêter en si bon chemin et souhaite récidiver. Le management l’affirme clairement : «nous souhaitons nous positionner en tant qu’émetteur régulier sur le marché obligataire. Il était plus facile pour nous d’aller vers les banques, mais nous nous sommes fixés un défi plus grand, en allant vers le marché financier».
«Nous avons senti en 2016 la maturité nécessaire d’aller affronter le marché financier, et avons dès lors préparé le terrain pour que nous puissions le faire dans de bonnes conditions» précise Youssef El Iraki, directeur du pôle finances et contrôle de gestion au sein du groupe.
L’on comprend dès lors qu’Al Omrane fait un appel du pied plus qu’appuyé aux marchés. Cette sortie, perçue comme un ballon d’essai réussi sur le marché local, permettrait à l’opérateur d’en préparer d’autres et, peut-être, in fine, de sortir du giron de l’Etat. Car oui, l’entreprise remplit aujourd’hui les critères d’une entreprise candidate à la privatisation, bien qu’elle ne figure pas sur la liste des privatisables élaborée par le ministère des Finances. Interrogé à ce sujet, le management écarte cette option, mais assure toutefois remplir tous les critères techniques des établissements publics privatisables.
D’abord, c’est une entreprise mature qui évolue dans un secteur mature. Elle a certes 11 ans d’existence, mais «40 ans d’expérience et d’expertise», comme l’a souligné Kanouni. Elle possède déjà, en outre, le statut d’une société anonyme et présente une situation financière saine, un minimum de rentabilité et un certain potentiel de croissance. «La demande n’est pas tarie, puisque nous aurons encore 5 à 6 millions de Marocains qui arriveront en ville dans les prochaines années», estime le président.
On notera, cela dit, un taux de marge nette bien plus faible que ce que l'on retrouve dans le privé avec des bénéfices inférieurs à 300 MDH pour plus de
5 Mds de dirhams de chiffre d'affaires. Le groupe a en outre une réserve foncière importante mais concentrée dans des zones non stratégiques commercialement.
La concurrence avec le privé
La cheville ouvrière de l’Etat dans le domaine de l’habitat nie enfin toute forme de concurrence directe ou indirecte avec le secteur privé. «Al Omrane a été très critiquée en disant qu’elle entre en concurrence frontale avec les promoteurs privés, ce qui est complètement erroné», tire au clair Kanouni, expliquant que son Groupe n’est que l’instrument de l’Etat pour la mise en œuvre des politiques publiques dans un domaine aussi déterminant pour le Maroc que celui de l’habitat.
Il affirme aussi que le logement social n’est pas leur priorité : «nous cherchons à ce que les projets de logements sociaux soient au maximum faits par les promoteurs privés, et là où il y a un manque ou un besoin nous intervenons, surtout dans les petites villes, celles de taille moyenne et beaucoup moins dans les grandes. Seuls 19% de nos logements sont destinés aux classes moyennes», précise le management. ■
A quoi servira le produit d’émission des Green & Social Bonds ?
Le produit de cette émission d’obligations durables (500 MDH) servira à refinancer les 4 projets pilotes à impact social : le siège social de Charafat, un projet à El Hajeb dans la région Fès-Meknès, un autre à Tamansourt (Marrakech) et enfin un projet «Ouroud» à Oujda. 4 autres projets à impact social seront également financés : 3 à Casablanca (projet Al Hamd, Al Fadl et Marwa) et 1 à Marrakech (Aïn Slim). Ces derniers permettront le relogement ou le recasement de 33.000 ménages. Pour rappel, le groupe a levé 1 milliard de DH sur le marché obligataire dont 500 MDH de type social et Green Bonds.
Par Y. Seddik