Cette session de la dernière année de la législature actuelle présente un défi pour les deux Chambres puisqu’il faut parachever le processus de réforme constitutionnel entamé en … 2011. L’instauration de la régionalisation est également un défi qui se pose avec acuité. Le discours royal d’ouverture de cette session a mis les points sur les «i».
Nos parlementaires ont du pain sur la planche ! C’est le moins que l’on puisse dire à la lumière de tout ce qui les attend dans cette première session de la cinquième année législative de la neuvième législature. D’ailleurs, SM le Roi Mohammed VI a donné le la dans son discours d’ouverture de cette session, prononcé devant les deux Chambres du Parlement : «La présente année législative revêt une importance particulière, d’autant plus qu’il s’agit de la dernière année de la législature actuelle, et qu’il en découle la nécessité de parachever la mise en place des institutions constitutionnelles. Elle intervient également après les premières élections locales et régionales organisées sous la nouvelle Constitution, et la mise en place de la Chambre des conseillers, dans sa nouvelle configuration». L’un des défis qui se posent aux représentants de la nation est bel et bien le parachèvement de toutes les lois organiques pour donner le plein élan à la nouvelle Constitution. «En effet, les projets de textes juridiques qui vous seront soumis sont d’une importance capitale et d’une extrême sensibilité. Aussi, Nous avons jugé nécessaire de rappeler au gouvernement et au Parlement la nécessité de se conformer aux dispositions de l’article 86 de la Constitution, qui fixe le terme de cette législature comme dernier délai pour soumettre les projets de lois organiques à l’approbation du Parlement». Le discours royal donne quelques exemples de projets de lois organiques toujours en attente, notamment la mise en oeuvre du caractère officiel de la langue amazighe au Conseil national des langues et de la culture marocaine, l’exercice du droit de grève et le Conseil de Régence. «S’agissant des textes soumis au Parlement, Nous appelons à l’accélération de l’adoption des projets des lois organiques relatives au pouvoir judiciaire, outre le projet de loi relatif à l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discrimination». Aussi, la Chambre des conseillers est-elle appelée à jouer pleinement son rôle, tel que prévu dans la Constitution, qui lui octroie une place particulière dans l’édifice institutionnel national, dans un esprit de complémentarité et d’équilibre avec la Chambre des représentants. Le Souverain a rappelé aux élus que la représentation des citoyens est une charge éminemment importante qu’il appartient aux élus et aux partis politiques d’assumer, soit en honorant leurs promesses envers les électeurs, soit en s’employant à répondre aux préoccupations pressantes qui sont les leurs. «Il s’agit donc d’une responsabilité nationale qui exige de chacun de se hisser à la hauteur de ce moment historique dans la vie de notre pays».
Régionalisation, un rendez-vous à ne pas rater
De même que la régionalisation représente un réel défi pour cette session. Comme le rappelle d’ailleurs le Souverain, les élus de la nation sont appelés à mettre en place des institutions régionales efficientes, mettant l’accent sur le fait que les hommes passent mais les institutions restent. «En effet, les personnes, quelles qu’elles soient, sont nécessairement appelées à s’en aller, alors que les institutions sont là, pérennes et pour toujours. Et c’est cette continuité qui est la véritable garantie des droits des citoyens et des services dont ils ont besoin, et que nous ne saurions accepter de laisser au gré d’humeurs et de caprices personnels». Le Roi a d’ailleurs insisté sur l’alternance dans l’exercice du pouvoir et la gestion publique comme caractéristique de la démocratie authentique. Et d’un ton ferme, SM le Roi a souligné qu’il n’y a pas de place pour les lamentations a posteriori, référence faite aux personnes ayant échoué à se faire élire, de même qu’il rejette les accusations infondées portées contre les autorités chargées de l’organisation des élections. «Les garanties qui ont été fournies valent bien celles que l’on trouve dans les plus grandes démocraties dans le monde. Mieux encore ! On ne trouve de telles garanties que dans une minorité de pays. Il va sans dire que quiconque s’estime lésé en raison de certains dépassements, somme toute isolés, que connaît d’habitude la pratique démocratique, garde la latitude de saisir la justice». Toujours concernant les dernières élections, le Souverain s’est félicité de la participation massive des habitants des provinces du Sud, comme étant une preuve démocratique supplémentaire de l’attachement des populations du Sahara à l’intégrité territoriale et au système politique de leur pays. «Cela traduit également leur volonté d’insertion efficace dans les institutions nationales».
Un rappel à l’ordre
Le Roi déplore que malgré tous les efforts déployés, l’image qui reste dans l’esprit de nombreux citoyens est celle d’antagonismes et de surenchères entre la majorité et l’opposition, parfois à l’intérieur du Parlement, et dans certains rassemblements partisans, et même dans les médias. «Il M’a déjà été donné de vous dire de cette tribune que le discours politique ne s’élève pas toujours au niveau des aspirations du citoyen. Là, J’attire l’attention sur le fait que la tendance aux luttes marginales se fait toujours au détriment des questions pressantes et des préoccupations réelles des citoyens. Cela suscite le mécontentement populaire concernant l’action politique, en général, et amène le citoyen à se désintéresser du véritable rôle du Parlement». SM le Roi a insisté que le Parlement doit être un miroir qui reflète les préoccupations des citoyens et un espace pour le dialogue sérieux et responsable autour de toutes les grandes questions nationales. De même qu’il a rappelé que «l’important pour nous n’est pas uniquement l’adoption des lois et leur publication au Bulletin Officiel, mais aussi la mise en oeuvre de ces législations et l’installation des institutions». «Nous appelons au consensus constructif concernant toutes les grandes questions de la nation. Toutefois, Nous refusons les arrangements négatifs par lesquels on cherche à satisfaire les envies personnelles et les objectifs catégoriels, au détriment des intérêts de la nation et des citoyens». Qu’il s’agisse des députés de la première Chambre ou des conseillers de la deuxième, il y a intérêt à mettre les bouchées doubles pour être à la hauteur des défis qui se posent au Maroc, que ce soit sur le plan social, économique ou constitutionnel.
Imane Bouhrara