Le règne de Mohammed VI est largement imprégné de la dimension africaine, une préoccupation qui n’a d’égal que l’effort consenti par le Roi pour faire émerger un partenariat Sud-Sud gagnant-gagnant.
Le choix de Dakar pour y prononcer un discours aussi important que celui commémorant l’anniversaire de la Marche verte en est la parfaite illustration.
Sa Majesté le Roi Mohammed VI a regagné le Maroc le 12 novembre en provenance de Dakar, au terme de la première partie d’une tournée que le Souverain a effectuée dans plusieurs pays africains frères.
Une étape à la symbolique bien forte, puisque le 6 novembre, correspondant au 41ème anniversaire de la Marche verte, le Roi a choisi la capitale du Sénégal; d’où il a été accueilli à sa descente d’avion par le président sénégalais, Macky Sall, pour y célébrer cette fête nationale, l’occasion de s’adresser à la nation à propos de sujets saillants. Et surtout de rappeler que le Sénégal «fut parmi les Etats ayant participé à cette épopée nationale, aux côtés d’autres pays africains et arabes. En effet, le Sénégal fut parmi les Etats ayant participé à cette épopée nationale, aux côtés d’autres pays africains et arabes. Ce pays qui nous est si cher, a toujours été à la tête des défenseurs de l’intégrité territoriale et des intérêts supérieurs du Royaume. Plus encore, il a démontré, par les actes et par la parole, à plusieurs occasions, qu’il considère la question du Sahara marocain comme étant sa cause nationale propre. Les Marocains n’oublieront pas sa position solidaire courageuse, lors de la sortie du Maroc de l’Organisation de l’Unité Africaine en 1984. En effet, l’ancien président, Monsieur Abdou Diouf, avait estimé qu’on ne pouvait concevoir cette Organisation sans le Maroc», lit-on dans le discours royal.
Autant de raisons qui rendent inédit le choix du Souverain de s’adresser en cette occasion à partir d’un pays étranger. Pour Cherkaoui Roudani, spécialiste des questions géostratégiques, «le discours de Sa Majesté à Dakar est historique dans le sens propre du terme. Un chef d’Etat qui s’adresse à la nation à partir d’un autre pays pour traiter des sujets à dimension existentialiste pour tout un continent montre l’importance et la force de la vision multiforme de Sa Majesté. Le discours arrive dans un contexte imprégné par des tendances structurelles que connait la planète. D'abord, il a été prononcé d'un pays étranger qui est le Sénégal, connu par sa position sempiternelle claire et lucide sur la marocanité des provinces du Sud.
N'oublions pas aussi que le choix du Sénégal n'est pas anodin. Entre les deux pays, on trouve un modèle de partenariat qui est arrivé à sa maturité; chose qui appréhende le volume d'investissement marocain dans ce pays ainsi que les différents chantiers lancés sur le sol Sénégalais». Sur un autre niveau, le Sénégal est un pays qui reste stratégique dans la politique réaliste et réalisable de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, poursuit Cherkaoui Roudani. «Il ne cesse de répéter que son engagement pour le continent n'est pas une tactique, mais un dévouement pour donner un fort élan à son développement. Sa Majesté est le seul chef d’Etat dans le monde qui a fait tant de visites officielles dans le continent (37 visites officielles). Si le discours d’Abidjan a été ambitieux et volontariste, le discours de Dakar est celui de la détermination et la profonde solidarité avec le continent africain», note le spécialiste.
Retour en force dans le concert des nations africaines
Depuis son intronisation, le Roi Mohammed VI n’a cessé d’envoyer des signaux vers l’Afrique, que ce soit à travers ses tournées royales ou encore à travers l’encouragement de l’investissement en Afrique, dans la perspective de renforcer le partenariat Sud-Sud. Mais cette année, et plus particulièrement depuis juillet 2016, le Maroc a formulé au 27ème Sommet de l’Union africaine son intention de reprendre sa place au sein de l’Union, ouvrant une nouvelle page dans la consolidation du partenariat Sud-Sud.
Dans son message adressé à l’UA, le Roi a appelé le continent à prendre son destin en main. Appel qu’il réitère d’ailleurs dans le discours de Dakar. «Sa Majesté le Roi a lancé un appel à l’Afrique pour qu’elle se prenne en charge car, aujourd’hui, elle n’a plus besoin d’assistance étrangère. En parlant de l’engagement de Sa Majesté pour un continent de paix et de stabilité, je rappelle que lors du sommet de l’ONU du millénaire, Sa Majesté a adressé un discours hautement important en mettant l’accent sur les dangers qu’encourt le continent africain. Dans ce discours, il a insisté sur la nécessité de tracer une nouvelle frontière à l’humanité avec une approche valorisante du continent dans son combat de lutte contre la pauvreté», analyse Cherkaoui Roudani.
Il faut dire que ces discours sont fédérateurs de grandes idées capables de restructurer l'Afrique et rassembler ces pays autour d'un projet capable et palpable pour sortir des crises qui secouent plusieurs régions de ce continent. La visite de Sa Majesté en Afrique de l'Est n'est que le commencement d’une politique idoine afin d'inscrire le continent dans une logique différente de celle qui le déchire. C'est pourquoi le retour institutionnel du Royaume dans le concert africain, et particulièrement dans les institutions de l'UA, permettra de définir les contours d'une politique africaine, avec des actions qui auront un impact positif sur la future place du continent dans l'équation mondiale.
N’oublions pas aussi que le rôle du Maroc, et précisément la perception de Sa Majesté, s’est toujours inscrit dans un angle pacificateur. Le rôle qu’a joué le Maroc auprès de la communauté internationale dans la stabilité de l’Afrique, comme ce fut le cas dans plusieurs régions, témoigne du réalisme sur les vrais objectifs d’une nation avec un Roi stimulateur d’une stabilité de tout un continent. Le combat contre le terrorisme, l’impact des changements climatiques sur le devenir des nations africaines ainsi que les dérives du clivage EstOuest sont les constats d’un diagnostic des désordres qui en découlent et qui touchent le continent. Le Maroc, et par la voix de Sa Majesté le Roi, a fait des propositions réalistes et autant que possible réalisables. Dans ce sens, le discours d’Abidjan a soulevé que l’heure était venue pour l’Afrique de se libérer de son passé et de regarder son avenir avec détermination et optimisme, en exploitant tous ses atouts et ses potentialités et que «Africa must trust africa».
Les préoccupations nationales jamais bien loin
Mais avant l’Afrique, le Maroc! Le Royaume demeure la principale préoccupation du Roi qui n’a pas hésité, depuis Dakar, a lancé un message à connotation politique appuyée, notamment celle de la constitution d’une majorité à l’issue des législatives du 7 octobre. En effet, voilà plus d’un mois que le Roi a nommé Abdelillah Benkirane en tant que Chef de gouvernement en charge de la constitution d’un Exécutif à même de répondre aux aspirations des urnes et des citoyens.
«En effet, sur le plan national, le discours de Dakar a mis le doigt sur un point culminant. C’est la manière avec laquelle les tractations politiques se déroulent. Malheureusement, l’approche et les préparatifs pour constituer le nouveau gouvernement sont imprégnés par l’arrivisme et l’opportunisme qu’hélas, ne peuvent être à la hauteur des attentes de la nation. Feu Hassan II disait que le Maroc ressemble à un arbre dont les racines nourricières sont enfouies en terre d’Afrique et respire grâce à son feuillage bruissant aux vents de l’Europe, une donnée qui n’a pas été toujours appréhendée par le politique. C’est pourquoi Sa Majesté a bien marqué son discours par l’action de persister que le prochain gouvernement se doit d’intégrer la coopération avec l'Afrique parmi ses priorités», soutient Cherkaoui Roudani.
Cette dimension africaine imprègne inéluctablement les politiques, nationale et internationale, du Maroc qui met des moyens importants aussi bien humains, matériels que financiers au service de son continent.
Imane Bouhrara
Maroc-Sénégal … plus proches que jamais
La visite royale à Dakar s’est soldée par la signature de deux conventions relatives à la mise en œuvre d’un programme de partenariat entre les deux pays dans les domaines agricole et des pêches maritimes. La première convention, relative à la mise en place d’un dispositif de financement pour l’accompagnement de la petite agriculture et du milieu rural au Sénégal. La deuxième convention est un mémorandum d’entente en matière de définition et de mise en œuvre d’un plan d’aménagement entre le gouvernement du Royaume du Maroc et le gouvernement de la République du Sénégal. Les deux Chefs d’Etat ont également présidé, au Centre international de conférences Abdou Diouf de Diamniadio, la cérémonie de présentation des travaux du Groupe d’impulsion économique (GIE) maroco-sénégalais. Une rencontre de très haut niveau qui a été marquée par les signatures d’une convention de par
tenariat relative aux actions communes de promotion et de développement touristique entre l’Office national marocain du tourisme et l’Agence sénégalaise de promotion touristique, d’une convention portant sur la création d’un Salon tournant de l’économie sociale et solidaire et de l’artisanat, de partage des bonnes pratiques de l’INDH et du Programme d’urgence de développement communautaire (PUDC).
Deux autres accords de partenariat et de coopération bilatérale sont en cours de préparation. La coopération entre les deux pays s’est également étoffée par le lancement du projet de création d’un Centre de formation dédié à l’entrepreneuriat, un projet qui confirme l’engagement permanent du Souverain en faveur d’une coopération Sud-Sud solide, agissante et solidaire.
I.B