Italie : un M. Austérité à la tête du gouvernement, les populistes crient à la trahison

Italie : un M. Austérité à la tête du gouvernement, les populistes crient à la trahison

 

Rome, 28 mai 2018 (AFP) - Le président italien Sergio Mattarella a chargé lundi Carlo Cottarelli, incarnation de l'austérité budgétaire, de former un gouvernement jusqu'à la tenue de nouvelles élections, qui auront lieu vraisemblablement à l'automne ou "au plus tard" début 2019.

 

M. Cottarelli, 64 ans, ancien haut responsable du Fonds monétaire international (FMI) surnommé "M. Ciseaux" pour son rôle dans la réduction des dépenses publiques en 2013-2014, prend ainsi la tête du 65ème gouvernement italien, après le veto spectaculaire de M. Mattarella à un exécutif populiste sans garantie de maintien dans l'euro, au nom de la défense des intérêts italiens en Europe.

 

Après avoir salué cette décision à l'ouverture des échanges avec un rebond de près de 2%, la Bourse de Milan est repartie à la baisse, perdant près de 2% vers 14H00 (12H00 GMT), tandis que le spread, l'écart entre les taux d'emprunt à dix ans allemand et italien, un temps en retrait, a bondi autour de 230 points, son plus haut niveau depuis novembre 2013.

 

Actuel directeur de l'Observatoire des comptes publics, M. Cottarelli, 64 ans, va désormais former son équipe avant de se présenter devant le Parlement où il n'a cependant quasiment aucune chance d'obtenir la confiance. Le Mouvement Cinq Etoiles (M5S, antisystème) et la Ligue (extrême droite), majoritaires au Parlement, se sont insurgés contre sa nomination.

 

M. Cottarelli a déclaré qu'il visait de préparer et de faire voter le budget 2019 avant des élections début 2019, mais que s'il n'obtenait pas la confiance, il se contenterait de gérer les affaires courantes jusqu'à des élections "après le mois d'août".

 

En tout état de cause, il aura la vie dure face à la fureur des populistes italiens, vainqueurs des législatives du 4 mars et qui dénoncent un coup de force après l'échec de leur gouvernement d'union.

 

"Tout ça n'est pas la démocratie, ce n'est pas le respect du vote populaire. C'est seulement le dernier soubresaut des pouvoirs forts qui veulent une Italie esclave, appauvrie et précaire", s'est insurgé Matteo Salvini, le patron de la Ligue.

 

Et d'avertir: "Les élections seront un plébiscite, le peuple et la vraie vie contre les vieilles castes et ces messieurs du spread!".

 

Quant à M. Di Maio, il considère M. Cottarelli comme "un de ces experts donneurs de leçons qui nous ont accablés en taillant dans la santé, l'éducation, l'agriculture..."

 

L'unique mission du prochain gouvernement devrait donc être de mener le pays à de nouvelles élections, dans un climat qui s'annonce électrique.

 

"Il est vraiment difficile de croire dans les lois et les institutions de l'Etat", a fait valoir M. Di Maio, dont le parti avait obtenu plus de 32% des voix lors des législatives de mars. "D'accord, retournons aux urnes. Mais si j'obtiens 40% et que je reviens au Quirinal avec Savona, cela changera quelque chose?".

 

Giuseppe Conte, juriste novice en politique, porté à la tête du gouvernement par Luigi Di Maio et Matteo Salvini, a jeté l'éponge dimanche soir face au refus de M. Mattarella de nommer Paolo Savona, un économiste anti-euro, au ministère des Finances.

 

Les deux alliés avaient refusé de leur côté de transiger: pour eux, M. Savona, 81 ans, défenseur d'un "plan B" pour sortir de l'euro, était le seul en mesure de défendre les intérêts de l'Italie à Bruxelles.

 

"La désignation du ministre de l'Economie constitue toujours un message immédiat de confiance ou d'alarme pour les opérateurs économiques et financiers", avait expliqué de son côté M. Mattarella en invoquant ses prérogatives constitutionnelles et la défense des épargnants italiens.

 

L'heure était aussi à la colère chez les alliés eurosceptiques de MM. Salvini et Di Maio. La cheffe de l'extrême droite française, Marine Le Pen, a dénoncé "un coup d'Etat" de l'UE en Italie, tandis que Nigel Farage, le croisé du Brexit, a prévenu que la "fureur" des électeurs italiens se traduirait par "davantage de voix" pour les eurosceptiques.

 

M. Salvini, "l'homme fort de la politique italienne", selon les commentateurs, y croit dur comme fer, lui que les sondages créditent désormais de quelque 22% de voix, contre 17% obtenus le 4 mars.

 

Mais pour remporter les élections, il devra renouer avec ses alliés de droite, qui ont vivement critiqué le résultat de ses négociations avec le M5S.

 

Or, Silvio Berlusconi, tout comme le Parti démocrate (centre gauche), se sont rangés du côté de M. Mattarella dimanche soir. Mais les élus de son parti Forza Italia ont annoncé qu'ils ne voteraient pas la confiance à M. Cottarelli.

 

 

 

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