Libreville, 7 jan 2019 (AFP) - Une tentative de coup d'Etat menée par une poignée de soldats a échoué lundi au Gabon, pays dont le président, malade, est absent depuis deux mois et demi et où le gouvernement n'assure plus que les affaires courantes.
Pour la première fois dans l'histoire du Gabon, un groupe de militaires est apparu lundi à l'aube à la radio-télévision nationale, appelant à un soulèvement et annonçant la prochaine formation d'un «Conseil national de restauration» de la démocratie.
Quelques heures plus tard, le calme était «revenu» et la situation était «sous contrôle», selon le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Guy-Bertrand Mapangou.
Il a précisé à l'AFP que sur un commando de cinq militaires ayant pris le contrôle de la Radio télévision gabonnaise (RTG), «quatre ont été arrêtés, un est en fuite».
Les forces de sécurité ont été déployées dans la capitale et elles le resteront pour les prochains jours afin de maintenir l'ordre, a-t-il ajouté, mais, selon lui, les frontières du pays restent ouvertes.
L'Union africaine (UA) a «fermement» condamné «la tentative de coup de ce matin au Gabon», réaffirmant «le rejet total par l'UA de tout changement inconstitutionnel de pouvoir».
L'AFP a constaté le déploiement de la garde républicaine autour de la RTG où des coups de feu ont été entendus. Des blindés des forces de sécurité gabonaises ont en outre bloqué l'accès à l'un des grands boulevards de Libreville.
Dans un quartier populaire proche de la radio, des dizaines de jeunes ont incendié une voiture et enflammé des pneus, semblant vouloir répondre à l'appel au soulèvement des mutins, a constaté l'AFP. Les forces de l'ordre tiraient du gaz lacrymogène pour tenter de la disperser.
Le message appelant l'armée et la population à se soulever a été lu par un militaire qui s'est présenté comme le lieutenant Ondo Obiang Kelly, commandant-adjoint de la Garde Républicaine (GR).
Il s'est dit président d'un Mouvement patriotique des jeunes des forces de défense et de sécurité du Gabon (MPJFDS), jusque-là inconnu.
Deux militaires, coiffés des bérets verts de la GR et tenant des fusils d'assaut, se tenaient derrière lui.
Le mouvement «demande à tous les jeunes des forces de défense et de sécurité et à toute la jeunesse gabonaise de se joindre à nous», a déclaré le militaire en annonçant la prochaine formation d'un «Conseil national de restauration» afin de «garantir au peuple gabonais une transition démocratique».
«Nous ne pouvons abandonner la patrie», a-t-il déclaré en jugeant «illégitimes et illégales» les institutions mises en place pendant l'absence du président Bongo.
Victime d'un accident vasculaire cérébral (AVC) le 24 octobre dernier en Arabie saoudite, le chef de l'Etat, âgé de 59 ans et dont la famille est au pouvoir depuis 1967, a été transféré ensuite à Rabat, au Maroc, où il poursuit depuis sa convalescence sans qu'aucune date n'ait été fixée pour son retour au Gabon.
La vacance du pouvoir n'a pas été déclarée en l'absence du chef de l'Etat. La Cour constitutionnelle a transféré une partie des pouvoirs du président au Premier ministre et au vice-président. Le gouvernement ne fait qu'assurer les affaires courantes.
«Si vous êtes en train de manger, arrêtez. Si vous êtes en train de prendre un verre, arrêtez. Si vous dormez, réveillez-vous. Réveillez vos voisins (...), levez vous comme un seul homme et prenez le contrôle de la rue», a encore déclaré le militaire à la radio.
Il a invité «tous les hommes du rang et les sous-officiers» à se procurer «armes et munitions» et à «prendre le contrôle» des points stratégiques dans tout le pays comme les édifices publics et les aéroports.
Le 31 décembre, le président Bongo, affaibli, a pris la parole depuis Rabat pour la première fois depuis son hospitalisation.
Dans son message lu lundi à la radio nationale, le militaire a dénoncé la «confiscation du pouvoir par ceux qui le 31 août 2016 ont fait assassiner nos jeunes compatriotes», en référence aux troubles qui avaient suivi la dernière élection présidentielle qui avait vu la réélection, contestée par l'opposition, d'Ali Bongo.
Le président gabonais a succédé en 2009 à son père Omar, à la mort de ce dernier, et a été réélu en 2016. Omar Bongo a dirigé le Gabon, un pays pétrolier, de 1967 à sa disparition.