Depuis cette comédie noire jouée par le régime algérien à Alger sur le Rif marocain, de nombreuses voix, notamment sur les réseaux sociaux, se sont élevées pour pousser le Maroc à exploiter la carte kabyle et rendre la monnaie de sa pièce à un régime militaire obsédé par le démantèlement du Maroc. Il faut dire que cette demande ne date pas d’hier. Déjà, l’engagement militaire, politique et financier du régime algérien à nourrir le séparatisme du Polisario ces dernières décennies était une occasion pour de nombreux Marocains de demander à rendre coup pour coup : séparatisme du Polisario contre séparatisme kabyle. Le constat est limpide. Les autorités marocaines ont eu la grande sagesse politique de ne pas tomber dans ce piège.
À l’exception de quelques influenceurs et de quelques journalistes qui ont, à dessein, focalisé l’attention sur les souffrances de la population kabyle qui ne reconnaît aucun lien, aucune allégeance au pouvoir central comme le montre son boycott endémique de tous les scrutins électoraux, le Maroc officiel était resté loin de cette polémique, fermant la porte à toute possibilité de dialogue ou de communication avec les indépendantistes kabyles. La preuve concrète réside dans le fait que leurs directions, qui jouissent d’une grande protection française, n’ont jamais été reçues par les autorités marocaines.
Les médias officiels marocains ne les ont jamais invités pour évoquer leurs combats, et ont encore moins couvert leurs actualités. Le chef iconique du MAK, Mouvement d’autodétermination de la Kabylie, Ferhat Mehenni, fait des pieds et des mains pour être reçu à Rabat. Les portes du pouvoir au Maroc lui sont restées hermétiquement closes. La seule fois où le Maroc officiel avait évoqué la question kabyle, ce fut dans la bouche du représentant du Maroc auprès des Nations unies, l’ambassadeur Omar Hilale, dont la posture était plus une réaction pour illustrer l’obsession du régime algérien par la question de l’autodétermination qu’un vrai soutien du Maroc à l’aventure kabyle.
Les mots de Omar Hilale, ce 27 septembre 2023 à la tribune des Nations unies, étaient bien choisis : «il y a un peuple qui existait avant l’État algérien et qui revendique depuis des décennies son droit à l’autodétermination : le peuple kabyle. Vous lui refusez ce que vous voulez offrir à des citoyens qui revendiquent leur marocanité». Dans l’entrepreneuriat diplomatique marocain, la question de l’autonomie kabyle n’occupe aucune place, alors que le séparatisme du Polisario, et aujourd’hui du Rif, occupent l’essentiel des préoccupations belliqueuses algériennes. Et pourtant, malgré cette distance et cette précaution, le régime algérien ne rate aucune occasion d’accuser le Maroc de soutenir la mouvance séparatiste kabyle.
Cette accusation n’a aucun impact dans l’opinion internationale, puisqu’elle a été noyée dans un flot d’accusations toutes plus fantaisistes les unes que les autres. Le régime algérien aurait bien aimé que les autorités marocaines se comportent comme lui, en se transformant en un facteur de division et d’instabilité, en un pays semeur de chaos et de guerre. Il conserverait alors une sorte de normalité régionale. Or, l’attitude réfléchie du Maroc, son intelligence de situation font qu’il n’est jamais tombé dans ce piège algérien. Les conséquences diplomatiques d’un tel choix sont visibles pour la communauté internationale.
D’un côté, elle est en présence d’un régime dont l’obsession pyromane se confirme de jour en jour, de l’autre côté, le Maroc, avec sa sagesse, sa modération et son investissement politique légendaire dans la paix, l’union et le développement économique. Malgré les multiples provocations, le Maroc a donc raison de ne pas exploiter la carte kabyle par mimétisme du délire algérien. Il se distingue ainsi par des choix diplomatiques réalistes, quand le régime algérien s’enferre dans une logique de guerre et de tensions permanentes.
Par Mustapha Tossa