Crise du CCG : Mohammed VI réussit un tour de force

Crise du CCG : Mohammed VI réussit un tour de force

 

Alors que l’Arabie Saoudite vit des évènements politiques inédits et que la crise avec le Qatar est en stand-by, le Roi Mohammed VI a effectué une visite d’amitié et de travail, d’abord aux Emirats Arabes Unis puis au Qatar, brisant au passage le blocus aérien, où il a été accueilli à bras grands ouverts par SA Cheikh Tamim Ben Hamad Al Thani. Faut-il y voir un début d’éclaircie dans la crise des frères devenus ennemis !

 

 

Le Roi Mohammed VI, accompagné de SA le Prince Moulay Ismaïl, a effectué le 7 novembre une visite d’amitié et de travail dans les pays du Golfe. D’abord aux Emirats Arabes Unis, à Abu Dhabi précisément, où le Roi a pris part à la cérémonie d’ouverture du Musée du «Louvre Abou Dhabi».

Le dimanche 12 novembre, le Roi s’envolait d’Abu Dhabi pour Doha où il a été accueilli par l’Emir de l’Etat du Qatar, le Cheikh Tamim Ben Hamad Al Thani.

Le contexte et le timing de ces visites royales dans la région portent plus d’un message, vu la position du Royaume et ses relations séculaires avec les pays de la région, rehaussées par les liens d’amitié qui lient personnellement le Souverain aux Chefs de ces Etats.

«La visite du Roi Mohammed VI dans les pays du Golfe s’inscrit dans la ligne de conduite de la diplomatie marocaine menée par le Souverain et qui est caractérisée, d’une part, par son rôle fédérateur et, d’autre part, par les relations d’amitié solides et de coopération intense qui lient le Maroc avec tous les pays du CCG (Conseil de Coopération du Golfe). En effet, depuis le déclenchement de la crise entre lesdits pays, le Maroc a joué un rôle très important pour l’apaisement des tensions entre les différents belligérants tout en observant une neutralité équitable par rapport à eux», analyse Ali Lahrichi, docteur en sciences politiques et juridiques.

Pour sa part, Cherkaoui Roudani, spécialiste des questions géostratégiques, ajoute : «Comme il a été indiqué dans le communiqué du ministère des Affaires étrangères, Sa Majesté a maintenu un contact étroit et permanent avec les différentes parties de cette crise. Les arguments du Maroc ont été solides et sincères. Le principal souci du Maroc est de consolider la stabilité de ces pays pour que le CCG préserve sa place distinguée en tant que modèle réussi de la coopération régionale. Dès lors, le Maroc a proposé ses bons offices en vue de favoriser un dialogue inter-parties franc et global».

Depuis l’éclatement de la crise entre, d’un côté l’Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis, le Bahreïn, l’Egypte et, de l’autre côté, le Qatar, le Roi Mohammed VI «a maintenu un contact étroit et permanent avec les différentes parties», notait le ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale dans un communiqué en date du 11 juin dernier.

Et le Maroc n’est pas à sa première médiation du genre. «Lors de la crise du fleuve de Mano, le Maroc a joué un rôle prépondérant dans la stabilité et la sécurité de toute une région. Le même engagement et la même clarté dans les positions lors de la crise libyenne, lorsque le Maroc a abrité les pourparlers inter-antagonistes et qui se sont soldés par les accords de Skhirate, aujourd’hui une feuille de route réelle pour la mise en place d’un Etat libyen stable et sûr», rappelle Cherkaoui Roudani.

 

Vers un dénouement de la crise ?

 

Ne dit-on pas que l’union fait la force ? Face à une crise plus importante, qui oppose l’Arabie Saoudite à l’Iran, la perspective d’un front commun avec notamment le Qatar pourrait accélérer le dénouement du contentieux avec le Qatar. En tout cas, le Maroc fait tout pour, comme le souligne Ali Lahrichi: «Aujourd’hui, le Roi du Maroc, fort de l’estime qui lui est réservée par tous les Chefs d’Etat de la région du Golfe, Roi et Emirs et des rapports excellents qu’entretient le Maroc avec ces différents pays ainsi que la convergence de leurs intérêts communs, intervient à titre personnel pour la résolution des différends entre eux à travers la médiation, afin de réinstaurer les jalons de l’entente entre des frères dont le «destin» géopolitique est celui de marcher ensemble sur la voie de l’unisson pour faire face à tous les dangers qui guettent la région du Proche-Orient».

Et Cherkaoui Roudani d’ajouter : «Un autre point qui facilite la tâche de médiation réside dans la nature des relations fraternelles et solides qu’entretient Sa Majesté le Roi avec l’ensemble des Rois et Emirs du CCG. En effet, le Maroc a toujours été à côté de l’ensemble des pays formant le CCG, lorsque leurs intégrités territoriales ont été objet de manigances étrangères. Dans la même lignée, le Maroc n’a pas hésité à mettre son expertise et son savoir-faire pour aider les pays du Conseil dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme. A la lumière des développements et les changements profonds que connait la région, surtout avec une tension à son comble entre l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabe Unis d’un côté, et l’Iran de l’autre côté, une éventuelle proposition pour diluer l’exaspération ne pourra pas être rejetée». En effet, le spécialiste estime que la situation chaotique qui sévit dans la région ainsi que le risque de la prolifération étatique, prolifération ethnocide, accroissement de l’hégémonie iranienne en Syrie, Irak et au Liban ainsi que les problèmes multidimensionnels auxquels fait face le monde arabe, appellent un nouveau bloc. Que ce soit sur le plan politique ou économique, ce nouveau bloc impose de mettre de côté tous les différends. ■

 

 

Imane Bouhrara

 

 

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