Manifestations GenZ : quand chaque manifestant devient journaliste

Manifestations GenZ : quand chaque manifestant devient journaliste

À mesure que les manifestations se multiplient dans les rues marocaines, un phénomène attire l’attention : le manifestant n’est pas seulement spectateur, mais devient aussi acteur de l’information. Son téléphone à la main, il filme, commente, transforme les images du terrain en données, en récits, en preuves.

Dans les grandes villes du pays, les images circulent plus vite que les slogans scandés dans la rue. Depuis le début des manifestations, baptisées GenZ212 sur les réseaux sociaux, les smartphones sont devenus des outils de documentation. Chaque vidéo filmée sur la place des Nations Unies, chaque photo partagée sur Instagram, chaque hashtag repris sur TikTok ou X transforme le manifestant en journaliste.

Le Maroc compte plus de 34 millions d’internautes, soit près de 91% de la population, un chiffre qui le place parmi les plus connectés d’Afrique. Le taux de pénétration de l’Internet mobile dépasse même 109%, selon l’ANRT. La jeunesse, première utilisatrice, est ainsi surreprésentée dans cet espace numérique. Dans les manifestations actuelles, ce capital technologique se traduit en une présence massive d’images et de récits publiés en temps réel, sans passer par les canaux médiatiques traditionnels.

Quand l’image précède l’information officielle

Les vidéos filmées sur le vif alimentent directement les réseaux sociaux, parfois avant même que les médias institutionnels n’en parlent. Les hashtags se sont imposés comme des points de ralliement numériques. Ils permettent aux jeunes de faire circuler l’information, d’organiser les rassemblements et de rendre visibles des scènes qui, autrement, resteraient locales et éphémères.

Si filmer les manifestations permet de documenter et de rendre visibles des actions souvent ignorées, cela comporte aussi des dangers. Les vidéos partagées peuvent contenir des métadonnées (géolocalisation, horodatage), identifier des visages ou tracer des contenus. Une diffusion non protégée expose ainsi les manifestants à des risques de répression, de fichage ou d’intimidation.

Face à ces défis, certains jeunes adoptent des ajustements techniques : suppression des métadonnées (EXIF) avant diffusion, usage de comptes pseudonymes, vidéos recadrées pour ne pas montrer de visages identifiables, ou partage limité à des cercles restreints. Ces pratiques restent toutefois minoritaires et souvent empiriques, ce qui laisse persister une fragilité numérique importante.

Les manifestations GenZ212 marquent donc une étape nouvelle : elles montrent que l’espace public marocain ne se limite plus aux rues, mais s’étend aux timelines des réseaux sociaux. Ce déplacement du regard force à repenser le rôle des médias traditionnels et la manière dont les pouvoirs publics communiquent. L’image brute, partagée par un manifestant, devient parfois plus influente qu’un communiqué officiel.

 

 

 

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