IA: «L’AgTech occupera de plus en plus de place dans le quotidien de l’agriculteur marocain»

IA: «L’AgTech occupera de plus en plus de place dans le quotidien de l’agriculteur marocain»

L’AgTech, à l’instar de l’agriculture, est un outil local dont la technicité doit être adaptée aux contraintes locales, tout en prenant en compte la dimension culturelle.

Entretien avec Faissal Sehbaoui, Directeur général de AgriEdge.

 

Propos recueillis par Khalid Aourmi

Finances News Hebdo : Quels éléments clés ont catapulté AgriEdge à la position de leader en AgriTech au Maroc et en Afrique ?

Faissal Sehbaoui : L’esprit d’innovation que nous avons rencontré chez celles et ceux que nous avons rencontrés depuis la création de AgriEdge. En effet, depuis les tout premiers jours, un des piliers stratégiques de AgriEdge est le «co-développement». Le fait de regrouper l’ensemble des expertises nécessaires autour de la même table, de regrouper principalement des chercheurs et des agriculteurs tout en créant un espace collaboratif, donne naissance à des solutions digitales avancées techniquement et adaptées aux contraintes du terrain. Je pense que nous avons bien réussi, au sein d’AgriEdge, les congrès scientifiques que nous avons organisés, les initiatives de vulgarisation que nous avons menées tout en ayant le chercheur et l’agriculteur comme alliés principaux, avec une vision de développer une AgriTech adaptée au contexte local.

 

F.N.H. : À quoi ressemble l'avenir de l'AgTech au Maroc, selon vous, et comment AgriEdge compte-telle y contribuer ?

F. S. : L’AgTech occupera de plus en plus de place dans le quotidien de l’agriculteur marocain. Comme vous le savez, nos agriculteurs ont réussi à exporter leur production agricole partout dans le monde malgré les défis climatiques. Cela a été réalisé grâce notamment à l’innovation et à l’adaptabilité qui font partie de leur ADN. Intégrer l’AgTech dans leur pratique n’est que question de temps. Surtout que cette dernière a montré qu’elle peut aider l’agriculteur dans la gestion de sa ferme et l’optimisation de ses ressources, en ces temps où l’impact du changement climatique devient très visible. Pour l’avenir de l’AgTech au Maroc, consulter une plateforme digitale avant d’aller à sa ferme deviendra une action routinière. AgriEdge, depuis sa création, s’est donnée comme mission de développer une AgTech adaptée au contexte marocain, car nous croyons que l’AgTech, à l’instar de l’agriculture, est un outil local dont la technicité doit être adaptée aux contraintes locales tout en prenant en compte, fortement, la dimension culturelle. Dans ce cadre, AgriEdge a co-développé plusieurs outils qui viennent aider l’agriculteur dans la prise de chacune de ses décisions. Par exemple, il y a FertiEdge qui accompagne l’agriculteur dans son processus de fertilisation, AquaEdge pour le processus d’irrigation, YieldEdge pour l’estimation de sa production et PhytoEdge pour l’assister dans sa gestion phytosanitaire. L’ensemble de ces outils apporte de l’information décisionnelle, d’une façon facile, à l’agriculteur et lui permet d’optimiser significativement l’utilisation de ses ressources.

 

F.N.H. : Concrètement, quels sont les avantages que l’intelligence artificielle apporte aux agriculteurs utilisant vos services ?

F. S. : L’intelligence artificielle (IA) permet d’extraire, à partir d’une multitude de données diverses et variées, une information décisionnelle. Autour de sa ferme, nous pouvons collecter une quantité énorme de données, comme par exemple des images satellite, des données météo, des analyses du sol, l’historique de la production… Ces données, utiles qu’elles soient, ne peuvent être exploitées d’une façon manuelle. L’IA permet donc de faire les croisements, les comparaisons et l’extraction de l’information. C’est cette dernière que nos services apportent à l’agriculteur pour l’aider dans sa prise de décision. Si l’on prend l’exemple de FertiEdge, qui permet aux céréaliculteurs d’économiser 20% d’engrais azoté tout en augmentant de 24% leur production, comparé à leur pratique conventionnelle, ceci est réalisé principalement par le traitement de beaucoup plus de données que ce que peut faire l’œil nu. Et ce, afin d’extraire l’information sur la quantité exacte d’azote à appliquer.

 

F.N.H. : Quelle est votre stratégie pour exporter l'expertise d'AgriEdge vers d'autres continents et comment comptez-vous surmonter les défis culturels et agricoles spécifiques à chaque région ?

F. S. : Nous avons énormément appris avec l’agriculteur marocain sur comment surmonter les défis culturels et agricoles. Les outils dont nous disposons aujourd’hui, ont été co-développés ici au Maroc. Dès que nous avons commencé à les déployer, nous étions confrontés à des défis. Comment les avonsnous surmontés ? D’abord, grâce à notre approche collaborative qui intègre l’agriculteur dans le développement de l’outil. Cela nous donne une avance pour les anticiper et les surmonter. Ensuite, c’est grâce aux différentes initiatives que nous avons lancées pour vulgariser les notions qui sont derrière l’AgTech. Et enfin grâce à une relation de confiance qui a été établie avec l’agriculteur. Nous comptons énormément sur cette approche collaborative pour exporter notre expertise. Cela a déjà donné ses fruits, car aujourd’hui, AgriEdge a réussi à exporter de l’AgriTech marocaine vers 11 pays africains couvrant à peu près 2 millions d’hectares et servant presque 90.000 agriculteurs.

 

F.N.H. : L'adoption de la technologie peut parfois être un défi, surtout dans des régions moins connectées. Comment AgriEdge facilite-t-elle la transition numérique pour les agriculteurs moins familiers avec la tech ?

F. S. : En misant sur la vulgarisation et sur l’adaptation de ces outils, nous pourrons surmonter ce défi qui revient dans beaucoup de zones rurales, partout dans le monde. AgriEdge offre à ses clients la possibilité de recevoir les services sous forme de notifications par SMS ou appel vocal. Nous avons aussi des agents AgTech dans plusieurs régions, qui offrent un accompagnement personnalisé et, sur place, aux agriculteurs moins familiers avec la tech. Enfin, nous nous appuyons sur des partenaires de distribution dans plusieurs marchés, toujours dans une perspective d’améliorer l’accessibilité à nos services. 

 

 

 

 

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