2024 sera une année d’accélération de la réforme du système fiscal, et éventuellement de la réduction de la TVA sur les produits de base. C’est Fouzi Lekjaa qui l’a annoncée au Parlement, où il a également fait état du démarrage de la lutte contre l’informel. Existe-t-il un lien entre les deux annonces ? Analyse.
Par A. Diouf
Le ministre délégué chargé du Budget, Fouzi Lekjaa, a annoncé que l’Etat va accélérer le processus de réforme de la TVA, l’année prochaine. Cela s’est passé le lundi 10 juillet à la Chambre des représentants, lorsqu’il répondait à une question orale d’un député du parti Authenticité et modernité (PAM) sur «la mise en œuvre de la réforme fiscale».
A cette occasion, il a déclaré que l’implémentation de la réforme fiscale entamée en 2020, et qui a connu une étape importante en 2023 avec notamment les réformes relatives à l'impôt sur le revenu (IR), dont la retenue à la source, puis l'impôt sur les sociétés (IS), «se poursuivra en 2024 à travers la mise en place d'un ensemble de réformes de la TVA pour la rendre plus juste, sans impacter les entreprises». Poursuivant son propos, il a ensuite ajouté : «nous essaierons dans la mesure du possible d'œuvrer à la réduction de la TVA sur les produits de base, notamment les médicaments, les fournitures scolaires et autres produits».
Une mesure qui vise à réduire les prix de ces produits et à rétablir la neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée. A signaler que ces réformes seront introduites dans la Loi de Finances 2024, dont le projet est en cours de préparation. Elles permettront de donner l’un des derniers coups d’accélérateur pour atteindre la neutralité de la TVA, qui est l’une des dix mesures prioritaires de la loi-cadre 69-19 relative à la réforme du système fiscal national, qui doit être mise en œuvre à partir de 2025. Parallèlement, le ministre délégué chargé du Budget a fait une autre annonce le même jour. Il a notamment révélé qu'en 2024, «nous allons aussi nous pencher sur la question du secteur informel, qui constitue un énorme fardeau pour l'économie nationale».
Ces deux annonces sontelles liées ?
Y a-t-il une corrélation entre les deux annonces ? Autrement dit, est-ce que Fouzi Lekjaa établit un lien entre la réforme de la TVA et la lutte contre l’informel ? Va-t-il proposer de supprimer la TVA au profit des opérateurs informels pour les attirer vers le formel ? Si oui, cette carotte fiscale suffira-telle à éradiquer l’informel ? La réponse des professionnels est sans équivoque. C’est non ! Selon Mohamadi Rachdi El Yacoubi, président du Cercle des fiscalistes du Maroc (CFM), «le constat incriminant uniquement la TVA est réducteur. La lutte contre le secteur informel reste subordonnée à d’autres dimensions».
«Des solutions doivent être élaborées et mises en œuvre dans les domaines de l’accessibilité au financement, la couverture sociale, la mise en place de formations adaptées ainsi que la réduction des coûts bureaucratiques et charges administratives», explique-t-il. Par charges administratives, Yacoubi veut parler des procédures administratives et des charges y afférentes. «Leur réduction est une tâche essentielle de la politique économique à laquelle doit s’atteler notre gouvernement», martèle-t-il. Pour sa part, l’économiste Najib Saoumai explique que «pour stimuler le passage vers le formel, il faut instaurer des mécanismes fiscaux flexibles et maintenir les exonérations fiscales». Citant l’exemple de la sous-traitance, il souligne que «dans ce système où les grandes entreprises font souvent appel à des unités informelles pour réduire leurs coûts, il serait préférable d’instituer une taxe sur la valeur ajoutée dédiée, ce qui contribuerait largement aux recettes fiscales».