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Saham Bank : du poids de l’héritage à la promesse du neuf

Saham Bank : du poids de l’héritage à la promesse du neuf

Six mois après l’acquisition de Société Générale Maroc, Saham Bank dévoile une transformation menée tambour battant. Refonte technologique, redéploiement des parcours clients, offre corporate remodelée, gouvernance resserrée : le groupe imprime son rythme et sa méthode, sans renier l’héritage bancaire.

 

Par Y. Seddik

Ce n’est pas tous les jours qu’un mastodonte bancaire change de nom et de cap stratégique. Encore moins dans un secteur réputé pour sa prudence. Et pourtant, six mois après le rachat de Société Générale Maroc par le Groupe Saham, la bascule est actée : SGMB devient Saham Bank, dans une opération qui dépasse largement la cosmétique.

Le 18 juin, à Casablanca, les dirigeants ont officiellement présenté la nouvelle entité. Mais ce qui s’est joué dans les coulisses depuis décembre 2024 est bien plus complexe qu’une simple opération de rebranding, à en croire le top management. Il s’agit d’un repositionnement stratégique, culturel, opérationnel et technologique. En clair : une refonte profonde du modèle. La première chose à comprendre, c’est que Saham n’achète pas une coquille vide.

Société Générale Maroc, c’est plus d’un siècle d’existence, un réseau de plus de 400 agences, un système d’information structuré autour des standards du groupe Société Générale, et une culture de la conformité profondément enracinée. Ce que le Groupe Saham a acquis, c’est une infrastructure lourde, avec des équipes expérimentées, des clients exigeants et une régulation bancaire nationale et internationale toujours plus contraignante. Ahmed El Yacoubi, président du Directoire de Saham Bank, a expliqué lors de la conférence de presse que «dès le premier Conseil de surveillance, il nous a été demandé deux choses : préserver les fondamentaux qui ont fait la solidité de cette banque, et initier des ruptures fortes dans notre manière de servir nos clients».

La transition se fait donc sur deux jambes : préserver la rigueur bancaire héritée de SGMB, tout en y injectant l’agilité et la capacité d’exécution du Groupe Saham. Sur le papier, cela ressemble à un exercice d’équilibriste. Dans les faits, cela mobilise des centaines de collaborateurs, des consultants, des ingénieurs IT et des experts métiers, pour tenter de réaligner l’ensemble des couches du modèle bancaire.

Côté gouvernance, le message est le suivant : stabilité d’un côté, pilotage stratégique renforcé de l’autre. Le Conseil de surveillance est présidé par Moulay Hafid Elalamy, fondateur du Groupe Saham, épaulé par son fils, Moulay M’hamed Elalamy, vice-président. L'actionnaire est donc pleinement impliqué dans la trajectoire de la banque. Le Directoire, quant à lui, reste inchangé. Ce maintien de l’équipe dirigeante vise à garantir une continuité dans l’exécution opérationnelle. Mais chacun est désormais attendu sur des livrables précis. À commencer par les trois chantiers structurels évoqués dès le premier Conseil post-acquisition : la simplification, l’accélération digitale et l’excellence relationnelle.

Une banque en refonte, au quotidien

Les discours sont alignés : sans renier l’héritage de robustesse qu’elle assume, la nouvelle direction cherche à faire évoluer la culture opérationnelle vers plus de clarté, de réactivité et d’agilité. Asmae Hajjami, Directrice générale et membre du Directoire en charge des Technologies, des Ressources et de la supervision des filiales du groupe, indique qu’«on ne veut pas faire du digital pour cocher une case. On veut redéfinir l’expérience bancaire marocaine, avec nos propres codes, nos propres architectures».

Concrètement, cela signifie une refonte de l’application mobile (développée en 90 jours), une migration vers une architecture technologique en microservices, reprise en main partielle du développement en interne, une adoption du modèle «security by design», et surtout une volonté d’alignement sur les standards internationaux en matière de fluidité, de sécurité et de personnalisation.

Côté expérience client, Mehdi Benbachir, Directeur général et membre du Directoire en charge de l’Exploitation, insiste sur la pluralité des usages: «tous nos clients n’ont pas les mêmes attentes. Certains veulent du conseil humain, d’autres ne veulent plus mettre les pieds en agence. Notre rôle est de leur donner le choix, sans compromis sur la qualité». La banque déploie un réseau physique réorganisé, un centre de relation client disponible 365 jours par an, des parcours refondus (notamment crédit et entrée en relation) et de nouvelles offres simplifiées, conçues après consultation directe avec les clients.

Développement du segment corporate et rigueur financière

Sur la banque d’entreprise, François Marchal, Directeur général et membre du Directoire en charge du Corporate et de la Banque d’investissement, parle d’une rupture nette avec l’ancien modèle. «Avant, il fallait parfois plusieurs semaines pour ouvrir un compte entreprise. Aujourd’hui, c’est 30 minutes, avec un accès immédiat aux services digitaux», explique-t-il. Même logique pour le crédit, avec le maintien de l’analyse de risque approfondie couplée à une refonte du processus décisionnel.

La banque conserve son exigence, mais veut coller au tempo économique réel. Marchal insiste aussi sur les priorités clients : l’internationalisation, les financements structurés, les solutions de marché et les IPO. Sur tous ces segments, Saham Bank souhaite devenir un acteur «à part entière», en développant ses propres expertises locales, tout en s’appuyant ponctuellement sur des partenariats internationaux. Face à cette effervescence, une question s’impose : comment maintenir les équilibres financiers dans un contexte de transformation aussi rapide ?

Jérôme Brun, Directeur général adjoint et membre du Directoire en charge de la Supervision et du Pilotage des risques et de la finance, balaye toute ambiguïté: «On peut aller plus vite sans affaiblir nos standards. Nos ratios de solvabilité sont parmi les meilleurs du marché. Notre politique de provisionnement reste conservatrice. Et notre gestion du risque n’a jamais été négociée». Le cadre réglementaire reste strictement respecté. Et les exigences de conformité, de cybersécurité, de capitalisation ne sont pas assouplies, au contraire.

La solidité de la banque est présentée comme un socle non négociable. En toile de fond, la transformation de Saham Bank reste toujours en chantier dans les mois à venir. Les dirigeants ne le cachent pas. Il reste à aligner les systèmes, stabiliser les outils, déployer les nouvelles offres, adapter l’organisation, intégrer les filiales et calibrer l’intelligence artificielle. Bref, tout n’est pas fait. Mais les fondations sont posées. «Quand M. Elalamy dit qu’il faut aller vite, c’est pour hier», glisse Ahmed El Yacoubi, lucide sur la pression exercée.

Ainsi, la direction de Saham Bank ne manque ni de lucidité sur l’ampleur du chantier, ni d’assurance sur sa méthode. Mais le projet avance sous la contrainte de préserver la stabilité réglementaire, tout en imposant des ruptures dans les usages, les outils et les modes de travail. L’enjeu n’est pas de se transformer, mais plutôt de tenir cette transformation dans la durée, sans perte de contrôle, ni perte de repères. Quoiqu’il en soit, dans un secteur dominé par une certaine rigidité, Saham Bank revendique une ambition de mouvement. Mais elle devra démontrer que la vitesse peut coexister avec la maîtrise. C’est là que tout se jouera. 

 

Sogécapital Gestion devient Saham Capital Gestion
Dans la continuité de la transformation engagée autour de Saham Bank, la société de gestion d’actifs Sogécapital Gestion change de nom et devient Saham Capital Gestion. Ce rebranding traduit l’intégration complète de l’entité dans l’écosystème Saham, avec l’ambition affichée d’asseoir la présence du groupe dans l’univers de la gestion d’actifs. La société promet une offre enrichie, des outils modernisés et une relation client plus réactive, tout en maintenant inchangés les dispositifs existants : OPCVM, accès client, sécurité et interlocuteurs restent strictement conservés. «Ce changement d’identité reflète notre volonté d’être un accélérateur d’ambitions pour nos client», affirme la société.

 

 

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