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Robotisation/Intelligence Artificielle : Ce que les banques y gagnent

Robotisation/Intelligence Artificielle : Ce que les banques y gagnent

Ahmed Rahhou, PDG de CIH Bank


 

- La robotisation touche aujourd’hui principalement les opérations simples, mais pourrait, à l’avenir, être d’un grand apport pour le scoring, ainsi que  la gestion du risque et de la conformité.

- Selon Ahmed Rahhou, PDG de CIH Bank, les technologies d’autonomisation et d’intelligence artificielle sont l’avenir du secteur bancaire. Entretien.

 

 

Finances News Hebdo : Comment se positionne CIH Bank sur la robotisation, notamment les technologies d’autonomisation et d’intelligence artificielle, pour des tâches à faible valeur ajoutée ?

 

Ahmed Rahhou : Il faut d’abord définir la robotisation qui, dans l’industrie, suppose l’existence d’une machine effectuant un certain nombre de tâches plus ou moins complexes, de façon autonome.

Dans les services, notamment la banque, les prestations fournies aux clients sont en général en interaction avec ceux-ci (opérations, demandes de conseils, de placement, de financement, etc.).

A ce titre, robotiser revient à faire en sorte que le maximum d’opérations soit fait de façon automatique, en tenant compte de la complexité. Evidemment, les banques ont automatisé toutes les opérations simples, notamment le traitement des valeurs, le paiement, etc.

En matière d’autonomisation, les choses se compliquent lorsqu’on est en interaction avec le client, lors d’un appel téléphonique par exemple pour la demande d’un conseil, d’un placement sophistiqué, d’un financement ou encore pour les opérations de commerce extérieur. Il faut savoir que cette interaction avec la clientèle apporte également une grande valeur ajoutée pendant la création du process, qui se déroule en questions-réponses, car il n’y a pas que des papiers à fournir à la banque lors des opérations.

Là aussi, les demandes basées sur des calculs simples sont en train d’être automatisées. Ce qui est le cas de la demande de crédit à la consommation, avec le scoring qui permet de définir le profil risque du client. L’intérêt est d’aboutir rapidement à une prise de décision pour l’octroi ou non du crédit.

Les banques ont beaucoup avancé sur ce terrain. Néanmoins, il faudra sophistiquer le process de scoring afin qu’il tienne compte des nouveautés.

Aujourd’hui, le Groupe CIH Bank, par l’entremise de Sofac, est le seul établissement au Maroc qui a totalement automatisé le process d’octroi de crédit, avec la plateforme Crediz.

Le client peut obtenir directement l’accord de crédit de consommation sur le net sans l’intervention humaine. Toutefois, en cas de contestation ou de sollicitation, le personnel est disposé à répondre. Actuellement, l’on peut considérer que certaines procédures de crédit et de documents simples relèvent du domaine de l’automatisation.

Les produits complexes ne le sont pas encore. Par exemple, le financement des entreprises nécessite un nombre d’échanges importants. Nous sommes dans une phase d’étude de l’analyse des listes d’entreprises, avec un système de notation, lequel permettra de mieux appréhender le risque. A ce titre, l’intelligence artificielle sera d’un grand apport pour le système de notation.

Pour être honnête, nous n’en sommes qu’au début. La notation existe, mais les produits de sophistication de la note et de l’analyse pourront dans le futur proche reposer sur des algorithmes d’intelligence artificielle.

 

 

F.N.H. : Selon vous, les technologies d’autonomisation et d’intelligence artificielle sont-elles l’avenir de l’activité bancaire ?

 

A. R. : Je pense que oui, mais elles ne vont pas remplacer les relations humaines. Nous avons toujours dit que chez CIH Bank, nous avons un modèle bionique, qui regroupe les aspects biologique et technologique.

La technologie est appelée à évoluer. Je fais allusion à l’analyse du profil du risque et du client et l’anticipation des probabilités de défaut de paiement. Tous ces systèmes seront de plus en plus intégrés dans des programmes d’intelligence artificielle. Par contre, il faut garder à l’esprit que ce sont les hommes qui, in fine, prendront la décision.

L’intelligence artificielle devrait aussi aider dans le domaine de l’interface verbale avec le client. Beaucoup de pays ont mis en place des chatbots.

Ces outils ne sont pas encore utilisés au Maroc car cela suppose la compréhension du dialecte marocain par la machine qui répond aux questions. L’inexistence de chatbot au Maroc n’est pas de la faute des banques. Il faut des recherches nationales et internationales sur le sujet. Une fois cette technologie mise au point, CIH Bank ambitionne de l’utiliser afin d’assurer l’interface permettant d’effectuer des opérations de façon verbale et non uniquement pour apporter des réponses aux questions posées par les clients.

En clair, il est envisageable de mettre en place un système de reconnaissance verbale sur l’application mobile de CIH Bank pour effectuer des opérations bancaires. En conséquence, l’interaction verbale servira à faire des opérations. Ce qui facilitera la vie des gens qui ont du mal à accéder aux menus écrits.

Les reconnaissances faciale et digitale permettront aussi aux clients de communiquer plus aisément avec la banque.

Au final, l’interface homme-machine facilite les opérations simples, mais ne remplacera pas la totalité des relations avec les clients

 

 

F.N.H. : Justement, le benchmark international montre que le robot (chatbot) peut renforcer la force commerciale de la banque, en répondant aux demandes de crédits des clients. Quelle est votre appréciation sur la pertinence des chatbots et l’utilisation de l’intelligence artificielle pour répondre aux questions des clients ?

 

A. R. : Comme je viens de l’expliquer, nous ne souhaitons pas pour l’instant remplacer la relation humaine par l’utilisation des chatbots. D’autant plus que le dialecte marocain n’est pas encore compris par ces nouvelles machines qui assimilent parfaitement d’autres langues comme le français ou l’anglais. L’autre élément important est qu’aujourd’hui, quand le client s’adresse à la banque par téléphone, par exemple, il souhaite qu’une personne lui réponde et non pas une machine.

Nous pensons que ces outils sont utiles pour un client qui désire avoir des informations standard sur un produit, mais pas encore adaptés lorsque celui-ci veut avoir des informations personnelles sur lui-même.

 

 

F.N.H. : Certaines banques, notamment en France, ont développé des applications d’identification de la clientèle grâce à l’intelligence artificielle. Il s’avère que l’exactitude de la vérification de la conformité des documents d’identité de l’intelligence artificielle est supérieure à celle de l’humain. Quel est votre avis sur cette question ?

 

A. R. : Aujourd’hui, nous demandons à accéder à certaines informations qui figurent sur la carte d’identité nationale (CIN) afin de mieux sécuriser les opérations à distance. A ce titre, je rappelle que s’il y a un domaine dans lequel l’intelligence artificielle est d’un grand apport, c’est celui de la gestion du risque et celle de la conformité, avec le respect des règles internationales en matière de transfert d’argent et de fraude sur les pièces d’identité.

Un prérequis majeur est à mentionner, il s’agit au préalable de l’identification et de savoir qui fait quoi. La reconnaissance faciale et la lecture des documents de pièces d’identité sont autant de technologies utiles permettant de répondre à cette question.

Pour notre part, nous avons déjà développé la technologie de l’identification de la personne par le biais de la lecture du passeport biométrique. A cela, nous ajouterons la reconnaissance faciale qui permet de savoir si c’est effectivement la bonne personne qui ouvre un compte à distance. La réglementation n’a pas encore tranché sur l’ouverture du compte à distance, mais j’espère que l’expérimentation permettra à celle-ci d’évoluer.

Aujourd’hui, toutes ces technologies existent et nous pensons que ce sont des choses qui pourraient être appliquées à brève échéance dans notre pays.

 

 

F.N.H. : Selon vous, existe-t-il au Maroc des start-up suffisamment outillées pour concevoir ce genre de services qui ont le vent en poupe en Europe ?

 

A. R. : Nous suivons de près ce qui se passe sur la place. Il y a des start-up prêtes à avancer sur ces champs. L’initiative CIH Bank Open Innovation permet d’identifier les start-up afin de les aider par le biais d’un financement et l’achat de produits ou services. Cela permet aux jeunes entreprises innovantes d’avoir une clientèle et de tester leurs produits et services dans un environnement réel. Nous disposons de beaucoup de programmes qui vont dans ce sens.

 

 

F.N.H. : CIH Bank a-t-elle des projets en la matière ?

 

A. R. : Nos projets concernent l’utilisation de l’intelligence artificielle pour l’amélioration de la gestion du risque et la conformité en vue d’une meilleure réponse à l’analyse du risque et l’anticipation. Aujourd’hui, les normes internationales imposent de calculer les probabilités de défaut de paiement dès l’entrée en relation avec le client (IFRS 9 ndlr). Tous ces éléments doivent reposer sur un système solide permettant de définir les notations, faciliter pour le client l’obtention de la réponse sur sa demande de crédit et la lutte contre la fraude et le blanchiment d’argent.

Nous travaillons également sur les pistes d’intelligence artificielle pour la reconnaissance vocale afin de développer une interface permettant aux clients d’utiliser l’application mobile de la banque par la voix. ■

 

 

Propos recueillis par M. Diao

 

 

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