«Le taux directeur de 2,25% reste approprié, nous avons décidé de le maintenir inchangé». Telle est la conclusion du dernier Conseil de la Banque centrale de l’année 2017.
Une décision qui devrait mettre en sourdine, pour un petit moment, certaines analyses, dont celle de l’agence Fitch, qui ont pronostiqué une remontée à court terme du taux directeur.
D’ailleurs, le communiqué de BAM le dit expressément : «les conditions monétaires devraient rester accommodantes à moyen terme». Il n’est donc pas encore question de resserrement de la politique monétaire, ni de remontée des taux à court ou moyen terme.
Signalons au passage que c’est la première fois que la Banque centrale utilise ces termes dans son communiqué post-Conseil.
Et lorsque l’on demande au wali de Bank Al-Maghrib ce qui pourrait, à l’avenir, l’inciter à remonter ce taux directeur, il affirme que l’éthique lui interdit de répondre de son propre chef à cette question, puisque, rappelle- t-il, il appartient au Conseil de BAM de prendre cette décision de par les statuts de l’institution. Mais il s’empresse d’ajouter : «si vous lisez les chiffres que je viens de présenter, vous verrez quelle conclusion en tirer».
Les chiffres justement, que disent- ils ?
Premièrement, que la tendance baissière de l’inflation au cours des premiers mois de l’année s’est inversée à compter du mois d’août. Elle devrait finir l’année à 0,7%, après 1,6% en 2016. A moyen terme, l’inflation devrait augmentait, tout en restant à des niveaux modérés de 1,5% en 2018 et 1,6% en 2019.
Le non-agricole doit faire mieux
Deuxièmement, la croissance économique, comme cela a été déjà dit lors des précédents Conseils, a retrouvé des couleurs en 2017, tirée par une campagne agricole de 96 millions de quintaux. Les projections de BAM tablent sur une croissance de 4,1% pour 2017, puis de 3% en 2018 et 3,6% en 2019 (sous l’hypothèse d’une récolte céréalière moyenne de 70 millions de quintaux).
Surtout, la valeur ajoutée des activités non-agricoles (Industrie et Services) ressortent en amélioration. Elle devrait progresser de 2,7% en 2017, 3,4% en 2018 et 3,6% en 2019.
«Il y a certes une amélioration, mais le rythme de croissance des activités non agricoles demeure relativement lent», tempère Jouahri.
«Il serait souhaitable, ajoute-t-il que le non-agricole soit plus dynamique. Avant la crise, les activités non- agricoles au Maroc enregistraient une croissance de 5%, voire davantage. Nous devons retrouver ces niveaux».
Pour cela, le Maroc doit davantage diversifier son offre exportable et gagner en compétitivité. «La réforme du régime de change doit justement appuyer cette compétitivité», souligne le wali.
Flexibilité du Dirham : Le plus tôt sera le mieux
La réforme avortée du régime de change vers plus de flexibilité s’est inévitablement invitée au point de presse du gouverneur de la Banque centrale. Sur ce sujet, la posture de Jouahri n’a pas bougé d’un iota : la réforme est plus que jamais indispensable.
«On ne peut pas prétendre être un hub régional financier de référence et avoir une stratégie africaine sans évoluer au niveau de notre régime de change», a-t-il précisé.
«Lors de la présentation du rapport annuel de la Banque centrale devant le Roi en juillet dernier, poursuit-il, j’ai dit que le Maroc va devoir entreprendre des réformes de seconde génération parmi lesquelles figure celle de la flexibilité du régime de change».
La décision finale du déclenchement de la réforme revient au gouvernement, rappelle Jouahri, qui assure que la position du ministère des Finances et celle de BAM sur cette question sont absolument convergentes.
Le gouverneur est également revenu sur l’épisode «spéculatif» des mois de mai et juin, au cours desquels les réserves de change ont été amputées de 45 milliards de dirhams.
L’enquête de l’Office des changes se poursuit pour déterminer les responsabilités des opérateurs qui ont réalisé des opérations de couverture non justifiées.
En attendant, Bank Al-Maghrib se réunit avec les gros importateurs et les banques pour tirer les enseignements de cet épisode, expliciter ce qui est légal ou illégal en termes d’opérations de couverture, afin que tout soit parfaitement clair, «une bonne fois pour toutes».
L’objectif étant que le passage à plus de flexibilité se fasse, cette fois-ci, avec sérénité. Quant aux réserves internationales nettes, elles se sont bien reconstituées depuis la saignée du mois de mai. Elles devraient terminer l'année à 5 mois et 24 jours d'importations. ■
A.E