Réglementation, sociétés de gestion, financement, conditions d’exercice, évaluateurs immobiliers, contrôle et protection de l’épargne… : zoom sur le marché des OPCI au Maroc.
L'immobilier professionnel locatif marocain a connu un grand saut en 2016 après la publication du dahir n°1-16-130 du 5 août 2016 portant promulgation de la loi 70-14 relative au fonctionnement des OPCI. Le secteur voit depuis l’émergence de foncières structurées venant soutenir aussi bien l’offre que la demande sur ce segment de marché.
La financiarisation de l’immobilier donne en effet un nouveau souffle aux actifs immobilisés des entreprises et permet aux épargnants de goûter aux joies du locatif, sans en porter les risques de liquidité et autres contraintes juridiques, ou encore celles relatives à la taille des investissements.
Selon le guide produit par l’AMMC, un Organisme de placement collectif immobilier (OPCI) est un véhicule d’investissement réglementé dont l’objet principal est l’acquisition ou la construction d’immeubles exclusivement en vue de leur location. Ce véhicule d’investissement permet à des investisseurs de toutes natures (personnes physiques, personnes morales, investisseurs qualifiés, etc.) d’avoir accès au marché immobilier à travers l’acquisition de parts ou d’actions d’un OPCI détenant directement ou indirectement des actifs immobiliers.
Les OPCI et leurs sociétés de gestion sont soumis à une réglementation spécifique qui fixe, d’une part, les conditions d’exercice, les modalités d’agrément et les obligations de moyens des sociétés de gestion et les modalités d’agrément et de commercialisation des OPCI ainsi que leurs règles de fonctionnement. Et, d’autre part, les obligations en matière d’information des investisseurs et les sanctions disciplinaires ou pénales en cas de manquement à leurs obligations.
On note que la réglementation régissant les OPCI fixe également les obligations qui incombent aux différents acteurs qui interviennent pour assurer la bonne marche de ces véhicules d’investissement. Cette réglementation encadre les missions des évaluateurs immobiliers, de l’établissement du dépositaire et du commissaire aux comptes de l’OPCI. Tout OPCI est constitué à l’initiative d’une société de gestion. Pour pouvoir gérer et commercialiser un OPCI, la société de gestion doit demander deux types d’autorisation. D’abord, un agrément de l’OPCI à travers l’approbation de son projet de règlement de gestion. Cette étape permet la constitution juridique de l’OPCI. Et puis, un visa du document d’information de l’OPCI.
Cette étape permet la commercialisation de l’OPCI après sa constitution juridique. Pour le financement des opérations entrant dans son objet principal, l’OPCI peut contracter :
• des emprunts à moyen et long terme (endettement immobilier) dans la limite de 40% (60% pour les OPCI-RFA) de la valeur des actifs immobiliers, sous forme d’obligations; d’avances en compte courant d’associés; d’emprunts bancaires d’une maturité supérieure à une année;
• des emprunts de trésorerie (endettement non-immobilier) dans la limite de 10% (15% pour les OPCIRFA) de la valeur des actifs financiers, sous forme : d’émissions de billets de trésorerie; d’emprunts bancaires d’une maturité maximale d’une année. Ces limites doivent être respectées le 30 juin et le 31 décembre de chaque année.
Sociétés de gestion des OPCI : les conditions d’exercice
Pour exercer l’activité de société de gestion d’OPCI, toute société anonyme doit remplir les conditions suivantes :
• avoir son siège au Maroc;
• avoir pour activité principale et habituelle la gestion d’OPCI et/ou la gestion d’organismes de placement immobilier de droit étranger;
• avoir un capital social ≥ à 1 million de dirhams, entièrement libéré lors de la demande d’agrément;
• présenter des garanties suffisantes en termes de moyens organisationnels, techniques et humains (notamment l’expérience professionnelle de ses dirigeants);
• les dirigeants ne doivent pas avoir fait l’objet d’une décision de condamnation pour une infraction en relation avec leur activité. Elle doit être dûment agréée par l’AMMC. En sus de l’activité de gestion d’OPCI, la société de gestion peut exercer les activités connexes suivantes :
• le conseil en investissement immobilier;
• la gestion locative des biens immeubles et des droits réels portant sur lesdits biens.
L’AMMC octroie deux types d’autorisation pour l’exercice de l’activité de société de gestion d’OPCI : un agrément des sociétés requérantes souhaitant exercer l’activité de société de gestion d’OPCI ou bien un accord préalable de l’AMMC pour certaines modifications affectant la société de gestion. Il s’agit des modifications affectant le contrôle de la société de gestion, la nature des activités connexes qu’elle exerce ou son siège ou le lieu effectif de son activité.
Retrait d’agrément : les cas de figure
L’agrément de la société de gestion d’OPCI est retiré par l’AMMC à la demande de la société de gestion concernée, lorsque cette dernière n’a pas entamé son activité principale dans un délai de douze mois à compter de la date de son agrément ou encore lorsqu’elle (la société de gestion) n’exerce plus son activité de gestion d’OPCI pendant une durée supérieure à 12 mois. L’agrément peut aussi être retiré lorsque celle-ci ne remplit plus l’une des conditions d’exercice ou même à titre de sanction disciplinaire. Suite au retrait de son agrément, la société de gestion prend toutes les mesures nécessaires à la préservation des intérêts de l’OPCl jusqu’à ce qu’une nouvelle société de gestion soit désignée.
Évaluateurs immobiliers
L’activité d’évaluateur immobilier d’actifs d’OPCI est soumise à un agrément délivré par le ministère en charge des Finances et ce, après avis de la commission consultative chargée de donner son avis sur les demandes d’agrément d’évaluateur immobilier d’actifs d’OPCI. Les personnes souhaitant exercer l’activité d’évaluateur immobilier d’actifs d’OPCI doivent remplir certaines conditions suivantes fixées par l’AMMC. Ainsi, l’évaluateur doit avoir pour activité principale l’évaluation des actifs immobiliers et être domicilié au Maroc. Lorsque l’évaluateur est une personne physique, elle doit disposer de compétences et d’une expérience suffisantes en matière d’évaluation d’actifs immobiliers et ne pas avoir fait l’objet d’une condamnation pour une infraction en relation avec son activité. En face, lorsque l’évaluateur est une personne morale, il doit présenter des garanties suffisantes en termes de moyens organisationnels et humains ainsi que de son expertise en matière d’évaluation d’actifs immobiliers.
Ses dirigeants et les personnes en charge de l’évaluation immobilière ne doivent pas avoir fait l’objet d’une condamnation pour une infraction en relation avec son activité et ne peuvent déléguer l’exécution de ses missions à autrui. Les évaluateurs immobiliers sont choisis par la société de gestion parmi la liste des évaluateurs agréés par le ministère en charge des Finances publiée au Bulletin officiel et sur son site web. Les premiers évaluateurs immobiliers sont désignés dans le règlement de gestion de l’OPCI. Avant sa désignation par la société de gestion, tout évaluateur immobilier souscrit un contrat d’assurance couvrant sa responsabilité civile au titre de ses missions d’évaluation. Il convient de souligner que le mandat de chaque évaluateur immobilier est d’une durée de quatre ans renouvelable une seule fois.
Toutefois, le mandat de l’un des évaluateurs immobiliers désignés lors de la constitution de l’OPCI n’est pas renouvelable pour ledit OPCI. Les missions de l’évaluateur immobilier Chaque évaluateur immobilier procède, par alternance d’un exercice à un autre, à l’évaluation immobilière des actifs de l’OPCI en assurant l’évaluation immobilière complète des actifs immobiliers de l’OPCI et l’examen critique de l’évaluation immobilière complète. Précisons que l’évaluation immobilière complète des actifs immobiliers de l’OPCI se déroule généralement selon les phases suivantes : • formalisation de la mission d’évaluation à travers, notamment, l’établissement d’une lettre de mission;
• visite, au moins annuelle, des biens immeubles à évaluer;
• analyse des documents et informations transmis par la société de gestion;
• description de l’actif à évaluer;
• analyse du marché immobilier ;
• évaluation;
• consignation des conclusions dans un rapport d’évaluation détaillé.
Les deux évaluateurs immobiliers établissent conjointement :
• un rapport d’évaluation détaillé dans lequel l’évaluation immobilière et son examen critique font l’objet de parties distinctes;
• un rapport de synthèse du rapport d’évaluation détaillé.
Contrôle et protection de l’épargne Investie d’une mission de protection de l’épargne et des épargnants, l’AMMC contrôle l’OPCI, sa société de gestion ainsi que son établissement dépositaire. Pour la réalisation de sa mission de contrôle des OPCI, l’AMMC est habilitée à effectuer des contrôles sur place et sur pièces des sociétés de gestion d’OPCI et des établissements dépositaires d’actifs d’OPCI.
Ces contrôles se déclinent principalement à travers l’agrément de la société de gestion d’OPCI, l’agrément du règlement de gestion de l’OPCI préalablement à sa constitution juridique ou encore le visa du document d’information de l’OPCI préalablement à sa commercialisation. Il est aussi question du contrôle permanent basé sur les reportings adressés à l’AMMC et du contrôle périodique basé sur des inspections réalisées au sein des locaux des intervenants soumis à son contrôle. À noter que les infractions ou les manquements relevés par l’AMMC peuvent donner lieu à des sanctions administratives ou pénales.