- Le marché des OPCI amorce un bon démarrage, mais a besoin davantage de coups de pouce (fiscaux).
- Plusieurs pistes sont proposées par les professionnels pour garantir le succès de cette industrie naissante.
Par Y.S
Officiellement lancé en juin 2019, l’industrie des OPCI veut se frayer un chemin dans le marché des capitaux marocain. À date d’aujourd’hui, 6 sociétés de gestion sont autorisées à exercer (Ajar Invest, Reim Partners, Attijari Reim, Nema Capital, BMCE Capital Real Estate et Africa Stone Management), 4 fonds sont lancés alors que pas moins de 9 évaluateurs immobiliers sont agréés.
Pour accompagner ce nouveau véhicule d’investissement, adapté pour les investisseurs institutionnels ou les «bons pères de famille», le département des Finances a mis en place certaines dispositions au titre du projet de Loi de Finances 2021. Il s’agit principalement de la prorogation du régime fiscal transitoire de deux ans à partir du 1er janvier 2021 au titre des opérations d’apports des immeubles aux OPCI réalisées par les contribuables personnes morales soumises à l’IS, ou personnes physiques soumises à l’IR professionnel, ou les particuliers soumis à l’IR sur profit foncier. Cette prorogation est principalement justifiée par le retard enregistré dans la publication de tous les textes d’application de la loi 70-14 relative aux OPCI.
Une disposition jugée insuffisante
Sans doute, la prorogation du régime fiscal transitoire de 2 ans permettra d’encourager les opérations d’apport des biens immeubles à l’actif des OPCI. Toutefois, “ce délai de prorogation nécessiterait, à mon sens, d’être étendu”, selon Mohamed Lazim, Directeur général du cabinet GUI4.
Plusieurs raisons sont avancées par l’expert : tout d’abord, le lancement officiel des OPCI par le ministère des Finances a eu lieu le 11 juin 2019, et la constitution effective des OPCI ne pouvait avoir lieu qu’après la publication au Bulletin officiel, en date du 05 septembre 2019, de la circulaire de l’AMMC n° 02/2019 relative à l’agrément et le fonctionnement de l’OPCI. Ensuite, bien évidemment, il y a les perturbations de l’activité économique engendrées par la crise sanitaire de la Covid-19. L’autre justification a trait à la mise en place récente des OPCI et leurs perceptions par les parties prenantes.
“En effet, plusieurs investisseurs et professionnels de l’immobilier perçoivent ce nouvel outil d’investissement comme étant un instrument compliqué de par sa réglementation et son contrôle rigoureux par l’AMMC. Un délai supplémentaire permettrait, ainsi, de vulgariser davantage ce nouveau mode d’investissement aux professionnels et au grand public et de bien maîtriser le montage juridique, administratif et fiscal des OPCI”, explique le DG de GUI4. Enfin, pour lui, ce délai doit être prorogé, puisque la mise en place des OPCI "Grand public" n’a pas encore lieu.
Comment garantir le succès des OPCI au Maroc
D'après le ministre des Finances, Mohamed Benchaâboun, les actifs immobiliers éligibles à l'OPCI au Maroc représentent 200 milliards de dirhams, uniquement au titre du segment "marché de bureaux". Avec un arsenal juridique verrouillé, le marché des OPCI fait un bon départ au Maroc. Pour garantir encore son succès, Lazim propose les cinq pistes suivantes :
- Proroger le régime fiscal transitoire pour une durée de 5 ans minimum à partir du 1er janvier 2021 et ce, sous réserve de la mise en place de la réglementation des OPCI "Grand public" dans les 2 ans qui suivent.
- Autoriser aux OPCI d’acquérir des actifs immobiliers résidentiels pour absorber le stock non-vendu de ces actifs et augmenter l’offre résidentielle locative.
- Prévoir un régime spécifique pour les foncières qui désirent se transformer en OPCI et éclaircir certaines dispositions à caractère juridique et fiscal relatives à cette opération.
- Accorder une exonération ou appliquer un droit fixe pour les droits de la conservation foncière au titre des opérations de cession des actifs immobiliers au profit des OPCI.
- Autoriser aux OPCI d’acquérir des actifs immobiliers en hors taxe sur la valeur ajoutée (TVA), dans la mesure où le montant de la TVA grevant l’investissement principal des OPCI (lors de l’acquisition d’actifs immobiliers) est très important, comparé aux loyers perçus.
Cette disposition permettra, d’une part, d’encourager les OPCI à investir davantage dans le marché immobilier et, d’autre part, d’augmenter leurs liquidités en évitant un crédit de TVA important dont l'absorption par les revenus locatifs nécessiterait plusieurs année.