Avec l’IPO de Marsa Maroc et le contexte favorable qui caractérise le marché, le timing semble propice pour accueillir deux autres sociétés dans la corbeille : l’OCP et la RAM. Mais en termes de gestion des participations publiques, l’Etat semble tâtonner.
Avec un Masi et un Madex qui affichent des performances res-pectives de 8,04% et 7,57% au 20 juin, la Bourse de Casablanca affiche visiblement un bon profil durant ce premier semestre. Cette dynamique va être certainement consolidée par l’arrivée de Marsa Maroc sur la cote. Le leader national de la manutention portuaire jouit déjà d’un préjugé favorable auprès de la communauté des analystes qui, d’ores et déjà, le qualifient de papier de qualité. Du papier de qualité avec des prix attractifs, à travers notam-ment des privatisations, l’ou-verture de capital d’entreprises publiques et privées, c’est ce que réclament les intervenants du marché depuis toujours. Sauf que côté public, il n’y a plus grand-chose à se mettre sous la dent. Pratiquement tous les bijoux de famille ont déjà été privatisés ou partiellement. Sauf deux entreprises qui monopo-lisent l’attention: l’Office ché-rifien des phosphates et Royal Air Maroc. L’introduction en Bourse de l’OCP est sans conteste la plus attendue et la plus réclamée. Elle reste aussi la moins probable pour le moment. «Tout d'abord, je pense que l'Etat n'a plus une stratégie claire en termes de privatisations. Il semble agir au cas par cas, selon le «lobbying» du management de l'entreprise publique. D'ailleurs, même du temps des gouverne-ments précédents, la cotation prévue de l'ex-Régie des Tabacs avait été abandonnée au profit d'une cession directe à Altadis», nous confiait à ce propos Farid Mezouar, expert des marchés financiers et directeur du site Flm.ma. Ajoutant qu’«aussi, le gouvernement actuel mise davantage sur le partenariat public-privé (exemple de MASEN ou de la centrale électrique de Safi) comme solution de finan-cement ou d'économie dans le budget d'investissement». Si une cession d’une partie du capital de l’OCP est vivement souhaitée par la communauté financière, c’est parce que c’est du papier de qualité. D’abord, l’Office jouit d’un préjugé favorable qui lui confère une bonne signa-ture à l’international. En témoignent les deux émissions obligataires réussies réa-lisées en 2014 et 2015 pour respective-ment 1,850 milliard de dollars US et 1 milliard USD. Ensuite, le leader mondial sur le marché des phosphates et de ses dérivés, qui revendique un programme de développement et d'investissement doté d’un budget de pratiquement 24 Mds de DH pour 2015, dispose d’excellents fon-damentaux. Au titre de l’exercice 2015, le chiffre d’affaires a atteint 47,7 Mds de DH contre 41,4 Mds de DH en 2014. L’Ebitda passe d’un exercice à l’autre de 11,4 à 17,6 Mds de DH, avec une progression de la marge d’Ebitda qui s’élève à 37%. Le résultat opérationnel a pour sa part augmenté pour atteindre 13,97 Mds de DH contre 8,9 Mds de DH en 2014. Au premier trimestre 2016, le chiffre d’affaires s’est légèrement contracté, atteignant 10,4 Mds de DH contre 10,9 Mds de DH au premier trimestre 2015. La hausse des volumes enregistrée sur la roche, l’acide phosphorique et les engrais ayant été neutralisée par les baisses des prix impactant ces trois produits. L’Ebitda (2, Mds de DH vs 3,9 Mds de DH), tout comme le résultat opérationnel (2,4 Mds de DH vs 3,3 Mds de DH) se sont aussi inscrits en baisse par rapport à T1-2015. Dans une moindre mesure, le papier Royal Air Maroc est aussi très attendu en Bourse. Surtout que la compagnie aérienne est dans de meilleures dis-positions depuis qu’elle a achevé avec succès son plan de restructuration. Elle a d’ailleurs renoué avec les bénéfices et dépassé les objectifs fixés dans le cadre du contrat-programme signé avec l’Etat. Au point d’être intensément courtisée. Car la rumeur d’un rapprochement avec Qatar Airways devient de plus en plus persistante. Et c’est même plus qu’une rumeur. En effet, Qatar Airways envisage d’acquérir une participation allant de 25 à 49% dans Royal Air Maroc en vue de se développer en Afrique. «L’acquisition nécessitera un grand réaménagement au niveau de notre base à Casablanca, car l’Afrique a actuellement besoin d’un hub aéroportuaire majeur», a déclaré Akbar Al Baker, le Directeur général du transpor-teur, au journal émirati The National paru le 5 juin courant. Selon lui, l’entrée de Qatar Airways dans le tour de table de la RAM devrait avoir lieu après la finalisation du rachat par la compagnie qatarie d’une participation de 49% dans le transporteur italien Meridiana. Pour rappel, Royal Air Maroc et Qatar Airways avaient déjà signé en mai 2015 un accord de partenariat commercial stra-tégique qui permet une extension des réseaux des deux opérateurs vers l’Afrique et l’Asie.
Marsa Maroc, un bon catalyseur
A l’évidence, la cotation de Marsa Maroc tombe bien. Elle intervient dans un contexte plus ou moins favorable sur le marché boursier. Cette IPO, au-delà de renforcer ce début de confiance qui plane sur la Bourse, peut favoriser l’arrivée de nouvelles sociétés dans la corbeille. Un contexte propice donc pour ouvrir au public le capital de l’OCP et celui de la RAM. Mais il semble que, pour l’instant, l’Etat n’a pas une stratégie clairement définie en ce qui concerne les participations publiques. Et si l’introduction en Bourse de l’OCP reste une décision politique, la géographie future du capital de la RAM reste une énigme. L’Etat n’a pas en effet démenti les informations véhiculées par le management de Qatar Airways. Et rap-pelons que, à une certaine époque, la cession d’une partie du capital de Royal Air Maroc en Bourse était presque actée, mais l’option préconisée au départ, puis abandonnée, était de la privatiser, d’autant que des tractations avaient été entreprises avec des groupes étrangers.
David William