Une croissance à deux chiffres en quatre ans, mais le taux de pénétration demeure faible. La microassurance a encore de beaux jours devant elle, en Afrique. Le Maroc, quant à lui, affiche un taux de pénétration relativement modeste, avec près d’un demi million de personnes couvertes, grâce à la contribution quasi-exclusive des associations de la micro-finance. Zoom sur un secteur qui promet, à l’occasion de la 11ème édition de la Conférence internationale de la micro-assurance.
C’est un rendez-vous annuel majeur pour les professionnels de la micro-assurance, à l’échelle planétaire. Le choix s’est porté cette année sur Casablanca pour abriter, du 3 au 5 novembre, la 11ème édition de la Conférence internationale de la micro-assurance, sous le thème : «Stimuler la croissance et la durabilité : argumentaire en faveur de la micro-assurance». Près de 400 experts issus de 50 pays ont fait part à cet événement organisé par la Fondation Munich Re et le Micro Insurance Network, en partenariat avec la Fédération marocaine des sociétés d’assurance et de réassurance (FMSAR) et le Centre Mohammed VI de soutien à la microfinance solidaire. L’un des moments forts marquant la première journée de cette Conférence, l’annonce des résultats d’une étude sur l’état des lieux de la micro-assurance en Afrique. Celle-ci révèle une croissance de l’ordre de 30% de ce secteur d’activité, sur une période de quatre ans. En effet, pas moins de 61,9 millions de personnes disposaient d’au moins une couverture de micro-assurance à fin 2014, contre 44,4 millions en 2011. Côté primes encaissées, le continent africain affiche à fin 2014 un total de 647 millions de dollars US, contre 387 millions de dollars en 2011. Globalement, la population africaine est couverte à hauteur de 5,4%, contre seulement 4,4% quatre ans plus tôt, soit un taux de pénétration comparable au niveau de couverture constaté en Asie et en Océanie (4,33%), mais nettement en deçà des niveaux observés en Amérique latine et aux Caraïbes (7,9%). L’évolution remarquable de l’activité de la micro-assurance en Afrique cache néanmoins quelques disparités régionales. Ainsi, certains pays se distinguent en affichant des niveaux de développement très élevés, pour ne citer que l’exemple de l’Afrique du Sud (64% de la population couverte en micro-assurance), la Zambie (22%) et le Ghana (29,6%).
Mais ce qui conforte les observateurs dans cet essor que connaît cette activité, c’est surtout la diversification des couvertures proposées par les micro-assureurs. La croissance observée en Afrique touche l’ensemble des segments (santé, biens, agricole), souligne Michael J. McCord, président du Micro Insurance Network, qui s’exprimait lors d’une rencontre avec la presse à l’ouverture de la Conférence annuelle. La croissance des assurances santé est imputable à quelques programmes proposant notamment une couverture d’assurance hospitalisation via l’intermédiation des opérateurs de téléphonie mobile. Ces derniers ont largement contribué au développement de la micro-assurance. A titre d’exemple, la croissance de l’activité en Zambie est principalement due au succès d’un produit d’assurance-obsèques distribué par un opérateur téléphonique. Au Ghana, la moitié des primes de l’assurance Vie sont encaissées via des opérateurs télécoms. La distribution de masse reste un élément décisif dans la promotion de la micro-assurance. Aux côtés du réseau des opérateurs téléphoniques, les détaillants et les entreprises de pompes funèbres drainent 45% des primes en micro-assurance émises sur le continent africain, selon la même étude.
Un potentiel encore peu exploité au Maroc
Le Maroc n’est pas à l’abri de cette tendance observée en Afrique. Les chiffres annoncés par la FMSAR en marge du rendez-vous de Casablanca font état d’un total de 550.000 personnes couvertes par la micro-assurance en 2014 (soit un additionnel de 100.000 par rapport aux chiffres de l’étude de Micro Insurance Network), contre seulement 20.000 personnes en 2011, soit une croissance à 4 chiffres (1.700%), avec un montant global de primes émises frôlant les 6,2 millions de dollars. Rapporté à l’effectif de sa population, le Maroc reste adossé à un modeste taux de couverture, inférieur à 2%. Aux yeux de Bachir Baddou, Directeur général de la Fédération marocaine des sociétés d’assurance et de réassurance (FMSAR), trois facteurs sont déterminants pour booster ce secteur d’activité. D’abord, des produits suffisamment variés en vue de répondre à des besoins minutieusement identifiés. Ensuite, sensibiliser les clients en ancrant l’éducation financière dans la vie des citoyens. Enfin, ajoute-t-il, des canaux de distribution diversifiés et efficaces.
Si la loi autorise aujourd’hui les associations de microcrédit à commercialiser des produits de micro-assurance, le DG de la FMSAR ne se montre pas enthousiaste à l’idée d’une forte implication des opérateurs téléphoniques dans le développement de la micro-assurance au Maroc. «Les opérateurs télécoms peuvent jouer un rôle dans la collecte et le recouvrement des primes, et non pas dans la vente des produits», relativise Bachir Baddou. Encore faut-il ajuster les textes de loi pour rendre légal ce type de distribution. Car, comme l’a si bien souligné le patron de la Compagnie d’assurances transport, l’introduction du canal digital dans les modes de distribution des produits d’assurances, est encore toute récente au Maroc.
Wadie El Mouden