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Gestion d’actifs : le Maroc cherche le bon dosage

Gestion d’actifs : le Maroc cherche le bon dosage

 

La gestion passive est plus adaptée aux marchés efficients.

Au Maroc, les styles de gestion sont différenciés tactiquement, mais fondamentalement similaires.

 

Avec plus de 410 Mds de dirhams d'actifs sous gestion, l'industrie de la gestion d'actifs représente 40% du PIB au Maroc, un ratio des plus élevés de la région. Mais les Assets managers se heurtent à un marché des capitaux peu profond sur certains de ses segments, comme le marché actions par exemple, et à des benchmarks pas toujours pertinents. Ceci empêche la mise en place de stratégies complètement passives de réplication parfaite des indices.

Contraignant ? Pas vraiment, car il est possible, et même souhaitable, de mettre à profit les inefficiences du marché et faire de la surperformance. CDG Capital et sa filiale de gestion d'actifs CDG Capital Gestion ont organisé la deuxième édition de l'Investment Management Forum récemment à Casablanca. Les intervenants y ont discuté cette dualité et des opportunités offertes par la gestion active et la gestion passive.

 

Une question d' «Alpha»

«Pour la gestion d’actifs, le statu quo n’est jamais une option», dixit Hamid Tawfiki, Directeur général de CDG Capital. Pour lui, les sociétés de gestion d’actifs, étant des intermédiaires entre les Assets Owners et les marchés, sont condamnées à évoluer et innover pour survivre. Il recommande, en parlant de la clientèle institutionnelle, d'agir «avec eux» plutôt que «pour eux».

Il faut dire qu'à l’international, la percée de la gestion dite «passive» a été une bonne nouvelle pour les investisseurs, car elle a contribué à faire baisser les frais de gestion. Elle a imposé aux gérants d'actifs, qui ne répliquent pas simplement des indices mais font des choix de conviction, de démontrer que les tarifs qu’ils pratiquent sont justifiés, pas uniquement au regard de la performance délivrée, mais également au regard d’autres critères, tels que le bon alignement de leurs intérêts avec ceux de leurs clients.

Mais pour pouvoir implanter des stratégies passives, le marché doit s'y prêter, aussi bien en termes de profondeur que d'efficience. C'est d'ailleurs pour cette raison que ce type de gestion a été industrialisé sur certains marchés avec les ETF notamment (des supports de placement qui répliquent complètement des indices). Auparavant, la génération d’Alpha, c'est-à-dire une surperformance par rapport à la moyenne du marché, consistait à produire des performances indépendantes de l’indice de référence. Aujourd'hui, on y rajoute des indicateurs de qualité et des facteurs de risque.

Pour Tawfiqi, la diversification des classes d’actifs, censée réduire la volatilité des portefeuilles, s’est révélée plutôt inefficace, lorsqu’à la faveur de tensions majeures au sein du système financier, les corrélations entre ces classes d’actifs ont bondi. Il évoque une nouvelle révolution industrielle de la gestion d’actifs, car il s’agit aujourd’hui de «passer d’une industrie de production de fonds d’investissement, packagés pour battre ou répliquer un indice de marché, à une industrie de service, capable de proposer à chaque épargnant une solution d’investissement adaptée à ses projets d’épargne, au coût le plus faible possible, dans un dialogue permanent, s’appuyant sur les nouvelles technologies digitales». Et de conclure sur le risque systémique que peut apporter la gestion passive avec des avis qui versent tous dans le même sens, rappelant à ce titre que la crise financière internationale de 2007-2008 a montré qu’un grand nombre de certitudes en matière d’investissement étaient erronées. Il est en effet ressorti de cette crise que les obligations de l’Etat ne sont pas toujours des placements sûrs, ou encore que les actions ne produisent pas systématiquement une bonne performance à long terme. Ce n'est pas pour autant que les investisseurs ont recherché de la gestion active. Bien au contraire...

 

Au Maroc, une gestion nécessairement active

Au Maroc, l'on compte 432 véhicules d'OPCVM répartis sur les différentes classes d’actifs. Ouafae Mriouah, DGA de CDG Capital et Directrice générale de CDG Capital Gestion, indique «une forte corrélation entre la disparité des performances des gérants et l’ampleur de la variation du marché obligataire et une très faible différenciation entre gestionnaires dans un contexte de stabilité des taux».

Par contre, sur le marché actions, «il existerait une corrélation évidente mais moins prononcée entre disparité des performances et variation du marché expliquée davantage par une divergence des paris tactiques que des orientations stratégiques fondamentales». En d'autres termes, les gérants ont tendance à rester sur des allocations rapprochées, sans doute par manque d'alternatives de placements. Rachid Elachhab, DGA de CDG Capital Gestion en charge de la gestion, explique à son tour que le marché actions marocain se prête par construction à de la gestion active, étant donné les difficultés de réplication.

 

Des pistes pour le secteur

Pour Ouafae Mriouah, au-delà de la distinction entre gestion active et passive, le développement du secteur passe par la combinaison intelligente des deux styles de gestion où les gestionnaires sont attendus sur l’innovation utile. Pour elle, «faire grandir le marché de la gestion d’actifs est l’affaire de toutes les parties prenantes». Elle propose la mise en place des ETF sur le marché des bons du Trésor qui serait déjà mûr pour de la gestion passive et benchmarkée, ainsi que de soutenir le prêt emprunt de titres pour avoir de la liquidité sur les marchés, étant donné que le manque de liquidité et la faible diversification de profils des acteurs financiers nuit à la crédibilité de la structure des prix et du marché dans son ensemble.

Ce forum a connu la participation d'experts mondiaux en la matière, comme Thierry Roncalli, responsable de la Recherche quantitative chez Amundi Asset Management. Fervent défenseur de la gestion passive, estimant qu'il est incapable de battre le marché à horizon court, il reconnait néanmoins le caractère systémique de la gestion passive, où tous les acteurs font la même chose au même moment, provoquant des krashs ou des mini-krashs, sur les marchés ETF notamment. Un autre point négatif est que la gestion passive peut faire subir, passivement, les périodes de baisse aux investisseurs.

Yann Neto, directeur commercial chez Allianz Global Investors, a pour sa part fait un plaidoyer en faveur de la gestion active qui délivre de l'alpha financier mais aussi de l'extra-financier, comme le service client, le conseil et la recherche. Pour lui, il est possible de faire des économies et rendre la gestion active moins coûteuse et plus compétitive dans certains cas.

Quant à Salwa Bousoukaya Nasr, directrice financière et CIO Fonds de réserve pour les retraites (FRR), elle a apporté un témoignage réel sur ce qui se fait en Europe. Du haut de ses 32 Mds d'euros d'actifs sous gestion, elle plaide pour une gestion dynamique, combinant toutes les approches, du moment que cela délivre de la performance et de la diversification à moindre coût.  ■

 

Adil Hlimi

 


Gestion active, gestion passive : Comprendre les différences

La gestion passive consiste en la réplication exacte ou quasi-exacte d’un indice. Elle garantit à l'investisseur la performance du marché avec des coûts de gestion très faibles, étant donné la faible valeur ajoutée du gestionnaire. Elle demande en général une très grande liquidité du portefeuille.

En revanche, la gestion active est une gestion de conviction où le gestionnaire fait des choix et des arbitrages pour battre le marché. C'est d'ailleurs son principal avantage, en plus du fait qu'il soit possible de la rendre sur mesure et de l'aligner sur les intérêts de l'investisseur. Son point faible est souvent son coût, bien que certains gestionnaires estiment qu'il est possible d'être compétitif en jouant sur les charges de structure.


 

 

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