Bank Al-Maghrib multiplie les initiatives pour accompagner la transformation digitale du secteur financier marocain. Entre accompagnement des Fintechs, lancement de projets d’Open banking et encadrement du crowdfunding, le régulateur met en place les fondations d’un écosystème innovant, sécurisé et inclusif.
Par Y. Seddik
Le soutien aux Fintechs reste un axe structurant de l’action de la Banque centrale. En 2024, le dispositif de «sandbox réglementaire» s’est consolidé, avec l’évaluation de huit dossiers, dont cinq ont été validés pour passer en phase d’expérimentation.
Ce cadre, qui permet à des porteurs de projets innovants de tester leurs solutions en environnement contrôlé, s’inscrit dans une logique de co-construction entre innovation technologique et exigence réglementaire. Les projets concernés touchent notamment aux paiements digitaux, à l’agrégation de comptes et à l’authentification numérique.
Parallèlement, BAM a renforcé les synergies avec le Centre marocain d’innovation financière (CMIF) et a maintenu un dialogue ouvert avec les incubateurs et opérateurs de l’écosystème. Ce rôle de «facilitateur-régulateur» vise à éviter une prolifération non maîtrisée d’offres financières numériques, tout en soutenant leur émergence dans un cadre sécurisant pour les consommateurs et le système bancaire. 2024 marque également la première année effective de fonctionnement pour les plateformes marocaines de financement participatif.
À ce jour, huit demandes d’agrément ont été traitées, dont deux plateformes ont obtenu l’aval des autorités. L’activité reste encore marginale, mais BAM assure un monitoring étroit de ces opérateurs, en lien avec l’AMMC et le ministère des Finances. L’objectif est d’anticiper les risques liés à la liquidité, à la gouvernance ou au blanchiment, tout en permettant à ce canal alternatif de financement de se développer, notamment au profit des TPE/PME et des projets à impact social.
Open banking, un chantier structurant
Le lancement en 2024 d’un projet de mise en place de l’Open banking marque une évolution majeure. BAM a initié les travaux préparatoires à l’élaboration d’un cadre réglementaire pour organiser l’accès sécurisé aux données bancaires par des tiers agréés (TPP – Third Party Providers).
Ce chantier, encore à ses débuts, suppose la définition de standards d’API, de protocoles d’authentification forte et de mécanismes de consentement explicite. Le régulateur entend s’inspirer des bonnes pratiques européennes (PSD2) tout en adaptant le dispositif aux spécificités du marché marocain.
Au-delà de l’ouverture des données, ce projet soulève des enjeux majeurs : équilibre entre innovation et protection des données personnelles, responsabilité des parties prenantes en cas d’incidents, standardisation technique dans un marché encore très hétérogène en matière d’infrastructures digitales. Surveillance du mobile banking et cybersécurité Enfin, BAM a poursuivi la supervision des services bancaires sur mobile, dont l’usage continue de progresser.
Le nombre de comptes de paiement est en hausse, avec plus de 8,3 millions d’unités à fin 2024, dont près de la moitié ouverts par des établissements de paiement. BAM note une montée en charge progressive, mais appelle à renforcer l’inclusion digitale, notamment dans les zones rurales. Dans un contexte de montée des cybermenaces, la surveillance prudentielle intègre désormais des indicateurs spécifiques liés à la sécurité des systèmes d’information et à la résilience opérationnelle des établissements.
Une attention particulière est portée aux plans de continuité d’activité et aux dispositifs de gestion des incidents. Bank Al-Maghrib joue un rôle d’équilibriste dans la digitalisation du secteur financier : soutenir l’innovation sans compromettre la stabilité. Le rapport 2024 illustre cette approche progressive, où chaque nouvelle technologie fait l’objet d’un encadrement prudent, dans l’attente d’un cadre réglementaire mature.