Les chiffres officiels relayés par la DGI traduisent, entre autres, un trend haussier des contrôles sur place hormis 2020, qui reste une année exceptionnelle du fait de la crise pandémique.
Par M. Diao
Un Etat dépourvu de ressources financières est dans l’incapacité d’assurer ses missions régaliennes, encore moins poursuivre des objectifs de développement économique, social et environnemental. Ce constat conforte le caractère primordial de la fiscalité, laquelle dote l’Etat de moyens indispensables. Face aux besoins croissants de la collectivité (infrastructures, services publics, etc.), les pouvoirs publics sont dans une situation pour le moins complexe. Celle impliquant la garantie de la rentabilité du système fiscal, la consécration de l’équité fiscale et l’étouffement du péril de la fiscalité confiscatoire.
Aujourd’hui, le sujet des contrôles et des redressements fiscaux, d’actualité dans certaines sphères, rappelle les enjeux cruciaux relatifs à la rentabilité du système fiscal, l’équité et le respect des droits des contribuables. A l’heure où les finances publiques affichent une méforme flagrante à cause de la crise liée à la pandémie, l’hypothèse d’un tour de vis fiscal dans les mois à venir, notamment en matière de contrôles et de redressements fiscaux, n’est pas farfelue. D’autant que le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, a prévenu les mauvais payeurs au Parlement en octobre 2021.
«Il faut que les entreprises, les contribuables et les commerçants payent les impôts», a exhorté en substance le chef de file de la majorité, porteuse d’un ambitieux programme social. Interrogé sur l’éventuel tour de vis fiscal via l’intensification des redressements dans les mois à venir, Rachid Seddik Seghir, expert-comptable et conseiller fiscal, minimise cette hypothèse. «La multiplication des redressements fiscaux au cours des mois prochains serait la preuve que beaucoup de contribuables tentent de frauder», analyse le fiscaliste.
Les dessous d’une hausse substantielle
Les chiffres officiels relayés par la DGI traduisent un trend haussier des contrôles sur place hormis l’année 2020, exceptionnelle du fait de l’ampleur de la crise pandémique. Pour preuve, l’on dénombre 2.167 dossiers vérifiés en 2015 contre 7.481 en 2019, répartis entre 4.634 vérifications générales et 2.847 dossiers de contrôle ponctuel. L’autre détail important concerne les dossiers vérifiés par type de contribuable. En 2019, ce sont 6.371 personnes morales qui ont été concernées par ces opérations et 1.110 personnes physiques. Entre 2015 et 2019, les droits recouvrés sont passés de plus de 4,3 Mds de DH à 7,9 Mds de DH.
«L’explication de cette hausse des contrôles sur place, susceptibles, au même titre que les contrôles sur pièces, de déboucher sur des redressements fiscaux, a trait à la nature de la déclaration qui prévaut au Maroc. Celle-ci est spontanée», rappelle notre interlocuteur. Et d’expliquer : «le corollaire de la déclaration spontanée est le renforcement de la sanction et du contrôle exercé par la DGI». Notons que concernant le contrôle sur pièces, ce sont 45.136 dossiers qui ont été vérifiés en 2019, avec à la clef une valeur des droits recouvrés de l’ordre de 4,1 Mds de DH (contre 3, 4 Mds de DH en 2018). Notre interlocuteur est formel : le contrôle effectué par le fisc est approfondi davantage et plus efficient. Et ce, grâce à l’existence d’un système d’information sophistiqué, facilitant les recoupements ainsi que la détection de fraudes éventuelles ou irrégularités.
La montée en puissance en matière de contrôles et de traitement de l’information peut être confortée par le fait que le fisc ne s’inscrit plus dans une logique de rattrapage des exercices prescrits. «Il faut savoir que l’administration fiscale a déjà commencé à relancer certains contribuables pour des exercices récents, notamment ceux de 2020 et 2021. C’est dire la grande aptitude du fisc sur le plan technique et des ressources humaines pour le traitement des informations fournies par les contribuables», révèle l’homme des chiffres. Au final, l’un des plus grands enjeux pour les années à venir a trait au développement du civisme fiscal qui, au regard des données disponibles, ferait encore défaut au Maroc.