Rachid Belkahia, associé-gérant de Associés en Gouvernance Maroc, administrateur indépendant, nous présente un éclairage complet sur le rôle du marché des capitaux dans le financement des PME.
Il revient également sur les freins qui bloquent l’accès au financement des PME et sur la question de leur gouvernance.
Selon lui, la réalisation des objectifs du NMD à l’horizon 2035 (capitalisation boursière portée à 70% du PIB, 300 sociétés cotées) implique une mobilisation sans faille de toutes les parties prenantes.
Propos recueillis par Y. Seddik
Finances News Hebdo : Pour les PME qui représentent aujourd'hui le gros du tissu économique, la sous-capitalisation et l’accès au financement sont deux problématiques persistantes depuis des années. Pouvezvous nous dresser un bref panorama de la situation actuelle de la PME marocaine ?
Rachid Belkahia : De nombreux travaux ont mis en évidence les difficultés récurrentes d’accès des PME au financement et leur sous-capitalisation chronique. Ces aspects ont été adressés dans un diagnostic sans complaisance posé par les auteurs du rapport autour du nouveau modèle de développement (NMD). Ces derniers constatent en effet que «les entreprises marocaines sont généralement petites, peu structurées, souscapitalisées et faiblement pourvues en ressources humaines qualifiées». De plus, elles «sont empreintes d’une culture managériale souvent marquée par une aversion au risque qui n’encourage pas la mise en œuvre de stratégies de croissance et de montée en gamme s’inscrivant dans le long terme». Ils ajoutent que «l’accès au financement demeure une contrainte majeure pour le développement des entreprises»; cet accès étant «rendu difficile par le manque de transparence sur leur structure financière et organisationnelle et l’incertitude sur leurs flux financiers, notamment au vu des délais de paiements excessifs, et souvent par une double comptabilité résultant de l’informalité partielle des activités». Ils soulignent également que «les marchés de capitaux et le capital investissement ne semblent toujours pas constituer un complément important au financement bancaire, et la finance alternative se développe timidement, avec des contraintes autant d’offre que de demande de la part des entreprises». Les premières solutions qui viennent à l’esprit pour remédier à cet état de fait reposent sur la réduction des barrières d’accès au financement bancaire et sur la diversification des possibilités de financement mises à leur disposition, notamment sur le marché des capitaux pour renforcer leurs fonds propres.
F.N.H. : En règle générale, dans quelle mesure le recours au marché des capitaux peut-il servir le développement des PME marocaines ?
R. B. : Le rôle du marché des capitaux et sa fonction d’allocation efficace des ressources ont été rappelés avec force dans le rapport du NMD. Ce marché est en effet important pour le financement d’activités plus risquées et peu servies par le secteur bancaire, pour sa contribution à la diversification de l’économie et à l’innovation et pour la promotion d’une culture de la transparence et d’une bonne gouvernance d’entreprise. Concrètement, le marché des capitaux assure une double fonction de marché primaire et de marché secondaire. Le marché primaire, qualifié de marché du «neuf», permet aux entreprises de lever du capital auprès d’un large public d’investisseurs par l’émission d’instruments financiers; son rôle étant de financer l’investissement. Le marché secondaire, quant à lui, est un marché de «l’occasion», qui permet d’assurer la liquidité des actifs financiers. Il remplit également une fonction importante d’évaluation des actifs cotés qui sert de référence pour l’émission de nouveaux titres sur le marché primaire; le cours des actions, mais aussi celui de la dette, traduisant l’opinion des investisseurs sur l’activité de l’entreprise, sa stratégie et la qualité de son management. Le choix du marché de cotation (Marché principal, marché alternatif…) est soumis à des contraintes réglementaires relatives notamment à la taille des entreprises candidates en termes de total du bilan, de chiffre d’affaires, de capitalisation boursière et de flottant, mais aussi de la volonté des entreprises d’ouvrir plus ou moins leur capital au public. Les garanties offertes aux investisseurs sont d’autant plus grandes que les conditions d’accession et de maintien à la cote (obligation d’informer régulièrement le public) sont contraignantes pour l’entreprise. Ainsi, l'introduction en Bourse met en scène trois catégories d'acteurs : les actionnaires d'origine, les professions financières et boursières et les investisseurs dont les intérêts ne sont pas aussi divergents qu'il pourrait sembler au premier abord.
Les premiers cherchent à maximiser l'utilité d’une partie de leur fortune à travers la vente de leurs titres à l'introduction, alors que les investisseurs cherchent à acquérir des titres à la fois pour diversifier leur portefeuille et surtout pour faire une bonne affaire. Si ces deux catégories d'acteurs jouent pour l’essentiel un jeu unique, les professions boursières et financières sont plus soucieuses de réussir cette opération et de renforcer l’attractivité de la cote vis-à-vis d'autres sociétés. Elles sont, aussi, bien placées pour faire converger les intérêts éventuellement divergents des deux autres catégories d'acteurs. L'introduction en Bourse ou Initial Public Offering (IPO) en anglais, qui marque le passage d’une société fermée à une société ouverte au public, constitue un acte de première importance dans la vie de l’entreprise. Cette décision s’inscrit dans sa stratégie globale de développement et fait également intervenir des motivations propres aux actionnaires d’origine. Pour ces derniers, l’introduction en Bourse leur offre la possibilité de réalisation de plus-values et de diversification de leur patrimoine qui a été très souvent intégralement (ré) investi pour développer la société. Pour l'entreprise, l'introduction en Bourse permet notamment de lever des fonds sur le marché des capitaux et d’augmenter sa flexibilité financière, d'accroître fortement sa notoriété, de renforcer sa visibilité auprès de toutes ses parties prenantes localement et à l’international, de faciliter des stratégies de croissance externe en «payant avec du papier», de faciliter la succession, de fédérer les équipes en interne autour d’un projet, d’encourager l’intéressement des collaborateurs, d’attirer les talents et de bénéficier d’incitations fiscales. Parmi les différents avantages de l’introduction en Bourse, la diversification des possibilités de financement offertes par le marché est de première importance. L’accès à une gamme étendue de produits financiers permet à l’entreprise de gagner en flexibilité, en puissance et en indépendance.
A côté de la possibilité de lever de l’argent frais au moyen d’augmentations de capital ou d’obligations classiques, l’entreprise peut recourir à de nouveaux produits financiers, notamment les obligations convertibles en actions, les actions à dividende prioritaire sans droit de vote ou encore les certificats d’investissement. Rappelons que ces deux derniers produits permettent en particulier d’augmenter les fonds propres de l’entreprise sans en perdre le contrôle. Au final, il s’agit d’une opération structurante pour l’entreprise dans la mesure où elle lui impose, en amont de l’introduction en Bourse, d’expliquer et de définir clairement sa stratégie et son business model, et d’adopter ensuite les meilleures pratiques de gouvernance, de gestion des risques, de contrôle interne et de fiabilité des informations financières et extra-financières. Ces avantages sont toutefois assortis de contraintes qu’il convient d’apprécier avant la prise de décision. Une fois cotée, la société ne peut plus avoir le même comportement qu'une société non cotée. Elle devra se soumettre aux règles qui s'imposent aux sociétés faisant appel public à l'épargne en termes d’information des actionnaires, de procédures de contrôle des comptes et d’intervention des commissaires aux comptes, de suivi du cours du titre et de distribution des dividendes.
F.N.H. : Au-delà du financement, la gouvernance des PME est également pointée du doigt. Quelle appréciation faites-vous de ce sujet ?
R. B. : Lorsque les fonctions de propriété et de management sont concentrées entre les mains d’une seule et même personne, les décisions du dirigeant sont compatibles avec la valorisation de l’entreprise, celleci constituant son propre patrimoine. Le dirigeant, qui est souvent le seul actionnaire de son entreprise, exerce un pouvoir absolu et incarne le seul organe de gouvernance de son entreprise. Ce modèle de gouvernance unitaire et personnalisée qui caractérise l’immense majorité des PME favorise la prise de décisions rapides par le dirigeant et présente l’avantage de garantir la cohérence des initiatives stratégiques avec l’intérêt social de l’entreprise, sa performance durable et sa pérennité. Dans ce modèle, le facteur clé de succès réside dans la capacité de l’actionnaire-dirigeant à gérer de manière harmonieuse ses missions d’entrepreneur (projets ambitieux, croissance, création de valeur) et ses préoccupations d’actionnaire (valorisation de l’entreprise, maîtrise de l’endettement et gestion des risques). Cependant, ce modèle est porteur de ses propres limites dans la mesure où il expose l’entreprise aux risques suivants : essoufflement de la créativité, incapacité à se réinventer et à générer de nouveaux relais de croissance, solitude du dirigeant inhérente à l’absence d’espace formel (Conseil d’administration, Comex) d’échange et de challenge des décisions et de contre-pouvoir, souci du dirigeant de rester maître à bord et fermeture corrélative à toute option d’ouverture du capital favorisant la saisie d’opportunités de croissance et la préservation de l’avantage concurrentiel de l’entreprise, difficulté à préparer et à gérer la succession en temps opportun.
Au final, le modèle de gouvernance unitaire et personnalisée ne permet plus de capitaliser sur le succès de l’entreprise après un certain temps, au-delà d’une certaine taille et d’un certain degré de complexité des activités. Par opposition à ce modèle fermé, l’adoption des principes suivants permet de poser les bases d’une gouvernance de qualité au service de la croissance et de la performance durable de l’entreprise : délégation des pouvoirs et de compétences, prise de responsabilité et obligation de rendre compte ou Accountability, mécanisme de checks & balances, prise de décision professionnelle dans l’intérêt social de l’entreprise, transparence, esprit d’entreprise responsable. Je voudrais rappeler au passage qu’à côté de la bonne gouvernance de l’entreprise, il est capital de veiller au respect de l’intégrité des marchés par l’ensemble des acteurs de l’écosystème boursier. Sur ce point, le rapport sur le NMD met l’accent sur la nécessité de regagner la confiance des investisseurs, notamment les petits porteurs, les investisseurs minoritaires et les investisseurs étrangers, et de mieux protéger leurs intérêts. Il rappelle l’urgence «de renforcer le cadre juridique pour décourager et sanctionner de manière forte les pratiques déloyales telles que les délits d’initiés et les manipulations de marché»; comme chacun le sait, les marchés reposent sur la confiance. La restauration de celle-ci repose sur un ensemble d’institutions, de règles normatives ou éthiques, de contrats, sans lesquels la recherche du profit légitime pour tous n’aboutit qu’à l’enrichissement sans cause de quelques-uns.
F.N.H. : Comment jugez-vous l’accessibilité du marché des capitaux (particulièrement le marché boursier) aux PME et quels sont, selon vous, les freins à l’introduction en Bourse de ce type d’entreprise ?
R. B. : La Bourse des valeurs de Casablanca dispose en l’état actuel d’une offre riche et diversifiée qui répond globalement aux besoins de financement des émetteurs de toutes tailles et aux attentes des investisseurs tant nationaux qu’internationaux. L’adoption en 2019 de la loi n°19-14 relative à la Bourse des valeurs, aux sociétés de Bourse et aux conseillers en investissement financier a consacré l’adoption du nouveau règlement général de la Bourse de Casablanca, qui marque une avancée majeure dans la modernisation du paysage boursier marocain. Concernant les PME, un marché alternatif leur a été dédié avec plus de flexibilité en termes de critères d’admission, d’informations à diffuser aux investisseurs et de dispositif de gouvernance à adopter; un minimum de règles devant toutefois être respectées pour créer la confiance avec les investisseurs et préserver l’intégrité du marché. Dans ce cadre, est considérée comme PME toute entreprise avec un chiffre d’affaires inférieur à 500 MDH, ou dont le total bilan est inférieur à 200 MDH ou qui compte un effectif de moins de 300 salariés. De concert avec la Bourse de Casablanca, Maroclear et l’APSB, l’AMMC a promu l’offre suivante dédiée aux PME avec les incitations suivantes en leur faveur: réduction de moitié du coût d’accès au marché, optimisation des procédures d’accès au marché avec notamment un guichet unique auprès de l’AMMC pour la centralisation et la coordination des démarches à effectuer, dispositif de formation et d’accompagnement. Il convient de noter la possibilité pour les PME de recourir au marché à partir de 5 MDH pour les titres de capital et de 10 MDH pour les titres de dette. Ces dernières sont aussi dispensées de produire par exemple les informations sectorielles et environnementales requises dans les prospectus, de publier des indicateurs trimestriels financiers et d’activité et les informations liées aspects aux dimensions environnementales et sociales. Enfin, la deadline de publication des comptes annuels est prorogée d’un mois. Si les pouvoirs publics et l’ensemble des parties prenantes se sont fortement engagés et mobilisés dans un processus de réforme des marchés financiers, leurs efforts n’ont malheureusement pas dégagé l’impact souhaité auprès des entreprises. A titre d’exemple, 45 sociétés ont été introduites en Bourse entre les années 2000 et 2018, parmi lesquelles 8 seulement ont intégré le troisième compartiment de la Bourse réservé aux PME. La dernière décennie, quant à elle, a connu une moyenne d’une IPO par an !
F.N.H. : Comment expliquer cette désaffection des chefs d’entreprise qui sont très peu nombreux à franchir le pas de la Bourse ?
R. B. : Tout d’abord, n’entre pas en Bourse qui veut ! Pour être éligible, la société doit s’inscrire dans un cercle vertueux de croissance et de rentabilité. Elle doit passer avec succès un examen économico-juridicofinancier et doit se conformer ensuite à certaines règles de transparence notamment. A côté des facteurs techniques évoqués plus haut, il y a aussi des facteurs culturels qui expliquent le comportement rétif des entreprises à l’égard de la Bourse. Il s’agit pour l’essentiel d’entreprises familiales. La quasi-totalité des fonds propres provient d’arrangements personnels avec des parents et partenaires. Une part importante du patrimoine de la famille est engagée dans l’affaire, ce qui explique la confusion des patrimoines. Cet état de fait a été parfois entretenu par les banques dont les prêts sont conditionnés par la présentation de garanties personnelles. De plus, l’effet de levier résultant des crédits à court terme et le recours récurrent au crédit interentreprises n’incitent pas au renforcement des fonds propres. Il y a ensuite une profonde méconnaissance des mécanismes de la cotation et de ses apports. On retrouve également la crainte liée à l’obligation de partager sur la place publique la stratégie de l’entreprise et de compromettre la discrétion qui est une caractéristique de l’entreprise familiale. Enfin, on retrouve le souci des dirigeants de ne pas devoir partager le pouvoir avec un tiers et diluer les actionnaires familiaux en ouvrant leur capital. Or, l’introduction en Bourse peut répondre à cette attente, puisqu’elle doit permettre à une entreprise de lever des fonds, tant au moment de l’introduction que dans les années suivantes, afin d’accompagner son développement sans pour autant en bouleverser l’organisation managériale et le pouvoir en son sein; l’ouverture du capital à la Bourse n’excédant que rarement le seuil de 25%.
F.N.H. : Les réformes engagées ces dernières années par l'AMMC sontelles suffisantes pour faciliter l'accès des PME au marché boursier ?
R. B. : En l’état actuel des choses, la place de Casablanca dispose d’un dispositif législatif et réglementaire évolutif et d’une infrastructure technique performante qui n’ont rien à envier aux Bourses des Valeurs de niveau comparable, ce cadre permettant d’assurer la sécurité de l’épargne investie en valeurs mobilières. Les investisseurs tant particuliers qu’institutionnels ont démontré de leur côté leur intérêt et leur engouement pour la Bourse à l’occasion des IPO réalisées au cours de ces dernières années. Nous avons également pu remarquer au cours de la période récente une forte mobilisation et implication des autorités de marché et de l’ensemble des parties prenantes ou constituantes (AMMC, Bourse de Casablanca, APSB, Maroclear, CGEM, CRI, Ordre des experts-comptables…) pour promouvoir la Bourse sur le terrain auprès des entreprises, sans compter le travail important et permanent mené en matière de vulgarisation et de promotion d’une culture financière et boursière (Guides didactiques édités par l’AMMC et la Bourse de Casablanca, école de la Bourse, programme Elite…); toutes ces initiatives louables méritant d’être saluées. Un fait pour le moins paradoxal mérite toutefois d’être signalé. Il s’agit du manque d’intérêt patent des entreprises pour la Bourse en dépit de toutes les réformes et incitations mises en place par les pouvoirs publics. Concernant les sociétés cotées en Bourse, leur nombre n’a pour ainsi dire pas varié depuis les réformes majeures de 1993.Il est également important de relever au niveau des sociétés cotées que leur recours au marché des capitaux pour le financement de leurs investissements est réduit à une peau de chagrin. Or, comme chacun le sait, une économie de marchés financiers se caractérise par la mise en relation des agents à excédent de financement (les ménages) avec ceux à besoin de financements (les entreprises).
Dans ce mode de finance directe ou désintermédiée,la fonction première et stratégique du marché financier est d’abord et avant tout une fonction de financement des entreprises et de l’économie. Cette situation pour le moins préoccupante interpelle et impose de rechercher et d’identifier les facteurs bloquants ou rédhibitoires justifiant ce manque d’intérêt pour la Bourse de la part des chefs d’entreprise. Les réponses sont à rechercher d’abord au niveau de l’entreprise. Le frein à la croissance des fonds propres est souvent dû, comme évoqué plus haut, au souci des dirigeants de ne pas devoir partager le pouvoir avec un tiers et de ne pas perdre le contrôle de leur capital. Par ailleurs, le déficit de compétences managériales chez certains dirigeants de PME en phase de développement ne leur facilite pas une réflexion structurée autour de leur vision, de l’élaboration de leur stratégie, de la définition de leur business model, de l’investissement dans des ressources humaines, techniques, organisationnelles et financières adaptées, de la mise en place d’un dispositif de pilotage stratégique et opérationnel, de l’innovation, de la veille concurrentielle…. Il est malheureux de constater que certains entrepreneurs sont les premiers freins à la croissance de leur entreprise. Les causes du plafond de verre rencontrées par les entreprises marocaines dans leur processus de développement sont également à rechercher du côté de l’environnement économique dans lequel elles agissent. Les relations entre les PME marocaines et les grands donneurs d’ordre sont souvent caractérisées par un rapport de force déséquilibré. Dans un même ordre d’idées, les initiatives de partenariats entre grands groupes et PME sous la forme d’alliances contractuelles (pôles de compétitivité, groupement d’entreprises, sous-traitance, développement commun entre fournisseurs et clients, missions communes à l’export,clusters…) ne génèrent pas toujours les synergies recherchées et ne permettent pas aux PME marocaines d’atteindre une masse critique pour mieux peser sur leur marché et acquérir une plus grande force de pénétration. A cela, il convient d’ajouter les freins d’ordre administratif, réglementaire, le sujet des délais de paiement, le déficit de compétences consécutif à un système éducatif déconnecté des besoins de l’entreprise….
F.N.H. : Tout récemment, l’Association marocaine des entreprises faisant appel public à l’épargne, présidée par Mohamed Horani, a vu le jour. Que peut-elle apporter de plus à l’écosystème ?
R. B. : L’initiative récente de la création de l’Association des entreprises faisant appel public à l’épargne (APE) avec l’appui de la CGEM et de la Bourse de Casablanca et le soutien de l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC) est importante, nécessaire et originale à plus d’un titre. Il s’agit tout d’abord d’une association qui est ouverte aux entreprises faisant appel public à l’épargne, mais également à toutes celles qui ont l’intention d’intégrer la Bourse des valeurs dans un futur proche. Le fait de regrouper des entreprises inscrites à la cote permet d’aborder les sujets avec le prisme, l’objectivité et le recul de l’émetteur grâce à une connaissance et un vécu de l’intérieur des véritables défis, enjeux et difficultés auxquelles sont confrontées les entreprises cotées. Ensuite, il s’agit d’une association de dirigeants d’entreprise qui constitue un espace d’échanges, de débats et de partage d’expériences entre pairs pour une réflexion collective autour du rôle central de l’entreprise en tant que principal facteur de création de richesse et de développement économique et social dans notre pays. De plus, le fait d’y associer des dirigeants d’entreprises potentiellement «cotables» permet leur mentoring par des dirigeants de sociétés cotées au moyen d’actions d’accompagnement et de soutien pour les aider à développer leur capacité à identifier des opportunités et à développer une vision cohérente de leur projet. Comme le rappelle le président Mohamed Horani, l’APE «a pour mission de mener toute action en mesure de contribuer à l’amélioration de l’environnement général de l’entreprise, notamment, celui de l’appel public à l’épargne et d’augmenter son éligibilité à recourir à ce mode de financement... Tel est le principal objectif de notre association: favoriser et promouvoir l’appel au marché des capitaux pour financer l’économie marocaine». La réalisation des objectifs ambitieux prévus à l’horizon 2035 dans le NMD (capitalisation boursière portée à 70% du PIB, 300 sociétés cotées, internationalisation de la Bourse…) suppose un changement de paradigme. Ce challenge, qui est de première importance, implique une mobilisation sans faille de toutes les parties prenantes. C’est l’affaire de tous. Il y a là une responsabilité collective à laquelle on ne saurait se soustraire.