La confiance des investisseurs envers les actions est à son plus bas depuis 2013.
La Bourse devrait connaitre une fin d’année agitée, avec en toile de fond un marché de taux instable.
Par Y. Seddik
A moins de deux mois de la fin de l’année, le marché actions enregistre l’une des pires performances de son histoire (si ce n’est la pire), avec pas moins de 150 milliards de DH de capitalisation boursière partis en fumée. Hausse spectaculaire de l’inflation, guerre en Ukraine, crise énergétique, hausse des taux d’intérêt et dispositions pénalisantes du PLF 2023…, les mauvaises nouvelles se sont accumulées depuis les premiers mois de l’année. L’effet sur la Bourse ne s’est pas fait attendre, puisque l’indice national perd, à l’heure où nous écrivons ces lignes, 22% et conforte le statut de Bear Market validé l’été dernier. Mais c’est depuis le resserrement monétaire que la baisse s’est véritablement accélérée.
Le ton plus sévère de Bank Al-Maghrib a visiblement pris de court les investisseurs, qui ont eu du mal à intégrer le changement de paradigme sur les taux d'intérêt. «Le marché boursier semble avoir mal réagi aux récentes annonces, notamment la hausse du taux directeur qui a accéléré l’inflexion déjà entamée de l’arbitrage en faveur des taux, les différentes mesures fiscales devant grever dans l’ensemble la capacité bénéficiaire des sociétés cotées et la composante insuffisante de la relance économique dans le PLF 2023», a expliqué BMCE Capital Global Research dans sa dernière note ‘Strategy’.
Une confiance en forte dégradation
Dans un contexte international tendu, marqué par la poursuite des tensions inflationnistes et la révision à la baisse des perspectives de croissance économique, nous assistons à une dégradation sensible de la confiance des investisseurs envers le marché actions, a indiqué pour sa part Attijari Global Research dans une nouvelle publication de son indice de confiance. Plus en détail, l’AGR Indice de Confiance ressort à 32,5 pts à fin octobre 2022, en baisse de -12,3 pts par rapport à l’édition précédente. «Il s’agit du plus bas niveau observé depuis avril 2013. Dans ce contexte, l’AGR indice de confiance se rapproche davantage de la fourchette basse de la phase d’attentisme», a souligné le bureau de recherche. Rappelons ici qu’un niveau plus bas de confiance existe : Il s’agit du «Pessimisme» lorsque l’indice passe sous le niveau 25.
À l’analyse des résultats par catégorie d’investisseurs, nous observons une baisse généralisée du niveau de confiance envers les actions. Mais c’est l’indice des acteurs de référence qui accuse la plus forte baisse, de -19,8 pts à 28,1 pts. L’indice des investisseurs étrangers se dégrade de -13,7 pts à 31,3 pts, celui des investisseurs individuels affiche une baisse de -12,5 pts à 33,4 pts et, enfin, l’indice des institutionnels & OPCVM locaux enregistre un repli de -8,7 pts à 34,4 pts. À la question «Quelles perspectives d’évolution pour le Masi sur les trois prochains mois» ?, 32% des interviewés ont répondu «fortement baissier» contre 3% seulement en avril dernier. Même pour un placement à horizon supérieur à 5 ans, ils sont 24% seulement à bien vouloir placer une partie de leur cash en actions contre 60% en avril.
Le Trésor alimente la baisse des actions
Fin de la semaine dernière, le Trésor a annoncé aux intermédiaires sa stratégie de levées de fonds pour le reste de l’année 2022. Objectifs : boucler son budget pour faire face à de larges dépenses. Montant en jeu : 70 milliards de DH, dont pas moins de 30 milliards de financement auprès du marché intérieur. Ces éléments ont eu un impact immédiat sur le marché actions qui a intégré une hausse des taux obligataires plus rapide que prévue. Le Masi a perdu le jour même plus de 2% à la clôture. Ces éléments compliquent également la tâche des gérants actions qui, pour sauver les meubles, n’auront d’autres choix que de liquider leurs titres d’ici la fin d’année. En définitive, l’on reste dans une configuration où les investisseurs espèrent que le point bas boursier soit passé, malgré le flou qui règne toujours sur les perspectives économiques et également sur les bénéfices des entreprises cotées au deuxième semestre, qui seront sans doute impactés par l’inflation.