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Banques : Fitch Ratings tire la sonnette d’alarme

Banques : Fitch Ratings tire la sonnette d’alarme

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L’agence de notation pointe du doigt le niveau de risque élevé chez les établissements bancaires marocains, et ce malgré des perspectives stables et une rentabilité certaine. L’exposition des banques aux aléas du tourisme risque de s'aggraver en 2016 : ce sec-teur concentre près de 20% du total des créances en souffrance du système bancaire. 

L’agence de notation financière interna-tionale a récem-ment annoncé la couleur pour les banques marocaines : «les perspectives pour le secteur sont stables», selon elle. En effet, Fitch leur reconnaît une stabilité incon-testable, et ce malgré une conjoncture peu favorable. Et cela, en dépit d’un ralentisse-ment de la croissance écono-mique anticipé l’an prochain à 2,9% après un bond de 4,6% affiché en 2015, soutenue par une production agricole excep-tionnellement forte. Le récent rapport souligne également une résilience, avec des ratios de solvabilité et une qualité des actifs modestes, compte tenu de leur exposition au risque sur les marchés africains, qui leur permet d’être mieux préparées à résister au ralentissement économique national. Toutes choses égales par ailleurs, la modeste croissance annuelle du crédit bancaire, s’élevant à 1,2% au 30 juin 2015, a permis à la majeure partie des banques marocaines d’éviter un risque élevé pour les prêts, ainsi que les stratégies agressives d’expansion commune dans les marchés émergents. De plus, l’agence de notation, en rap-pelant que 80% de l’activité des institutions bancaires du Royaume s’effectuent sur le territoire national, constate à cet effet qu’une bonne tenue des exportations du secteur automobile et de la produc-tion manufacturière, ainsi que la progression des secteurs de l’énergie et la croissance du commerce de détail peuvent sti-muler et dynamiser la demande de crédits. Par conséquent, cette bonne tenue peut inhiber et compenser les impacts liés à la conjoncture difficile dans le secteur de l’immobilier et du tourisme. Fitch rappelle à cet effet que «l’exposition des banques à l’industrie du tou-risme devrait être sous pres-sion en 2016», indiquant que les banques n’ont débloqué que «10% des 24 milliards de dirhams promis pour l’appui du secteur». Cela, tout en condam-nant le modèle de répartition des risques des banques maro-caines.

La qualité des actifs : un point sensible Fitch Ratings note que les ratios de qualité d’actifs sont faibles, précisant que «les cré-dits douteux et notamment les prêts bancaires en retard de paiement représentent environ 10% du total des prêts. Ce qui constitue un niveau consi-dérablement plus élevé que la moyenne de 5% des systèmes bancaires émergents». De surcroît, même si les banques affichent des ratios de solvabilité satisfaisants, avec «des ratios de fonds propres de plus de 9% pour le ratio Tier 1», selon l’agence, le problème réside malencontreusement dans leur capacité d’absorp-tion des pertes, qui s’avère modeste. Ce manque d’absorption s’ex-plique principalement par «le niveau élevé de concentration des risques de crédits et celui des prêts douteux auxquels les banques font face, notamment dans leurs filiales d’Afrique sub-saharienne », explique le rapport. A priori, le niveau d’exposition aux risques semble élevé pour tous les segments : grandes entreprises, PME, ménages et même les crédits à l’Etat. L’agence de notation souligne, de ce fait, que «les expositions aux corporate (grandes entre-prises) au-delà du seuil de capi-tal réglementaire de 10% ne sont pas rares dans les grandes banques marocaines et leur vingt plus grandes expositions aux risques corporate repré-sentent souvent 100 à 200% de leurs fonds propres». Par ailleurs, rien de nouveau pour les TPME : ces dernières sont considérées comme étant les plus vulnérables, leur taux d’impayés étant deux fois plus élevé que la moyenne générale, d’où la réticence marquée des banques à leur égard. Un autre point, et non des moindres, tend à véritablement inquiéter les institutions bancaires du pays : «le tourisme concentre près de 20% du total des créances en souffrance du sys-tème bancaire», rapportent les experts de l’agence. L’enjeu est de taille pour les banques, qui aspirent vivement à un plan de restructuration de la dette de ce secteur.

Le risque de crédit pointé du doigt Les analystes de Fitch et Bank Al-Maghrib partagent les mêmes appréhensions rela-tives au risque crédit et à la concentration des prêts sur cer-taines contreparties. D’ailleurs, l’agence a fini son rapport en affirmant que «les banques sont rentables, mais que le fait de stimuler le capital par le biais des bénéfices mal répartis génère de l’instabilité en raison des concentrations». Autrement dit, un seul grand client peut être à l’origine d’importantes charges de dépréciation pour pertes sur prêts. Enfin, il res-sort qu’en cas de dégradation prononcée de la conjoncture, le taux de créances en souffrance des banques pourrait grimper jusqu’à 8,5% en 2016, mais leur solvabilité resterait au-des-sus de 13%, estime Fitch.

Selma Malki ( stagiaire)

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