Finances News Hebdo : Comment avez-vous identifié le besoin d’un service de lavage automobile au Maroc ?

Jean-Baptiste Kouatche : Dans un contexte de stress hydrique croissant, les méthodes traditionnelles de lavage automobile posent plusieurs défis au Maroc. D’une part, elles ont un impact environnemental majeur, chaque lavage nécessitant entre 50 et 250 litres d’eau et utilisant des produits chimiques polluants. D’autre part, elles représentent une contrainte de temps pour les automobilistes, le processus pouvant durer plus de 90 minutes, entre l’attente et le nettoyage final. En plus, les services professionnels peuvent être coûteux, dépassant parfois 200 DH pour un lavage, tandis que les solutions informelles, comme les laveurs dans la rue ou les tricycles, ne garantissent ni qualité ni sécurité. Face à ces problématiques, WashMinute propose une alternative innovante, responsable et ubérisée du lavage automobile. Lancée en février 2024 par la société K&A Associates, cette solution révolutionne l’entretien des véhicules en alliant écologie, rapidité et accessibilité. Elle permet un lavage plus respectueux de l’environnement, ne nécessitant que 5 litres d’eau en moyenne par lavage, tout en utilisant des produits majoritairement naturels. De plus, elle offre un gain de temps considérable, avec un nettoyage réalisé en moins de 25 minutes dans les centres commerciaux partenaires et en moins de 45 minutes à domicile. Accessible à tous les automobilistes marocains, WashMinute se démarque également par ses tarifs compétitifs, inférieurs à ceux des autres solutions écologiques. Grâce à un concept 100% mobile et sans infrastructure fixe, les opérateurs, appelés Washmen, transportent tout leur matériel dans leurs stations de lavage mobiles et interviennent directement sur le lieu de stationnement du véhicule, sans nécessiter de raccordement à l’eau ou à l’électricité.

F.N.H. : La levée de fonds de 6 millions de dirhams représente une étape importante pour WashMinute. Quels sont les partenaires clés de cette opération et en quoi leur accompagnement contribue-t-il à votre développement ?

J.B.K. : Cette levée de fonds de 6 millions de dirhams marque une étape clé dans le développement de WashMinute et témoigne de la confiance accordée par nos partenaires stratégiques. Nous avons pu mobiliser des acteurs publics et privés de premier plan, notamment Tamwilcom, MSI, Witamax et la Near East Foundation. Leur accompagnement va bien au-delà du financement : ils nous apportent une expertise précieuse, un soutien stratégique et un accès privilégié à un écosystème dynamique qui accélère notre croissance. Cette opération intervient à un moment clé, un an après le lancement de notre aventure, afin de nous aider à déployer notre vision d’un lavage automobile écologique, digitalisé et accessible partout au Maroc. Plus largement, elle contribue à l’extension de notre concept vers l’ubérisation du «car care», en facilitant l’entretien automobile où que se trouvent nos clients.

F.N.H. : Que pensez-vous de l’évolution des mécanismes de financement pour les startups au Maroc, notamment pour celles qui mettent l’accent sur des enjeux environnementaux ?

J.B.K. : Le Maroc s’affirme comme un modèle de financement des startups, notamment en GreenTech, avec une croissance dynamique et un écosystème structuré. Si le «Big four» africain (Kenya, Nigéria, Égypte et Afrique du Sud) domine encore notamment grâce à sa visibilité internationale, ses marchés plus vastes et ses nombreuses licornes, le Maroc se distingue par une progression fulgurante. Alors que les investissements en Afrique ont été divisés par deux ces deux dernières années, le Maroc les a multipliés par quatre, prouvant l’attractivité de son modèle. Son atout majeur réside dans une offre de financement diversifiée et accessible (equity, prêts d’honneur, subventions), surtout pour les startups en phase Early stage. De plus, les synergies entre public et privé, avec des initiatives comme «Digital Morocco 2030», renforcent cet écosystème, notamment en GreenTech avec des acteurs engagés comme EBF, SB3S et la BMCI. WashMinute illustre cette évolution : grâce aux mécanismes de financement disponibles, nous avons levé des fonds et bénéficié d’un accompagnement stratégique. Le Maroc est donc en train de s’imposer comme un modèle de référence en Afrique, même pour les startups engagées dans la transition écologique.

F.N.H. : Votre modèle économique joue-t-il un rôle dans la préservation des ressources en eau, particulièrement dans un contexte de stress hydrique ? Comment WashMinute s’intègre-telle dans l’écosystème des startups marocaines et africaines ?

J.B.K. : Dans un contexte de stress hydrique croissant, WashMinute apporte une solution concrète et efficace pour préserver les ressources en eau. Comparée aux méthodes traditionnelles, notre approche permet d’économiser 10 à 50 fois plus d’eau, réduisant ainsi considérablement l’impact environnemental du lavage automobile. Si le lavage à sec constitue une alternative, il présente néanmoins des limites en termes d’efficacité et d’adaptabilité, notamment pour les véhicules très sales. C’est pourquoi nous avons choisi une solution plus performante, conciliant écologie et accessibilité. À terme, nous envisageons même de traiter et réutiliser les eaux usées, sous réserve des évolutions réglementaires. S’intégrer dans l’écosystème des startups marocaines et africaines repose avant tout sur l’accès aux programmes d’accompagnement, qu’il s’agisse d’idéation, d’incubation, d’accélération ou de financement par des fonds d’investissement (VC). Le Maroc dispose d’un écosystème dynamique et structuré, porté par des acteurs de premier plan tels que EBF, SB3S, Flat6Labs, Technopark, Witamax… Grâce à ces dispositifs, WashMinute évolue dans un environnement propice à l’innovation et à la croissance. Plus largement, le Maroc joue un rôle clé dans l’entrepreneuriat africain. Ses infrastructures modernes, ses connexions stratégiques avec le continent et son savoir-faire unique en font un véritable hub pour les startups souhaitant se développer à l’échelle régionale.

F.N.H. : Vous avez enregistré une croissance importante de 30% en seulement sept mois. Quels sont les principaux facteurs ayant favorisé cette performance ?

J.B.K. : Notre croissance repose sur une vision claire, définie dès le départ avec mon associé Ishak Afrit, pour révolutionner l’entretien automobile de manière écologique, rapide et accessible. Plusieurs leviers clés ont soutenu notre performance, avec notamment :

• Une équipe engagée, recrutée pour son état d’esprit et sa capacité à relever les défis.

• Une stratégie commerciale et marketing efficace, avec des programmes de fidélisation et une approche client affinée.

• L’innovation technologique et l’optimisation opérationnelle, grâce à la digitalisation et à une supply chain optimisée, améliorant l’expérience client et la productivité.

• Enfin, un élément intangible mais fondamental joue un rôle dans notre réussite (notre recette secrète). En effet, mon associé et moi croyons fermement que la réussite ne vient que d'Allah «Rizq min Allah», et qu'elle se provoque avec du travail et de la détermination.

F.N.H. : Vous êtes déjà présents dans des villes comme Casablanca, Marrakech et Agadir. Quelles sont vos perspectives pour consolider votre réseau au Maroc et avez-vous des ambitions d’expansion à l’international ?

J.B.K. : Effectivement, notre solution en centre commercial est déjà bien implantée dans plusieurs villes marocaines et nous venons de lancer notre offre ubérisée à domicile, débutant à Marrakech avant une expansion progressive. Ce modèle flexible répond à la demande croissante d’un lavage écologique et sans contrainte de déplacement. Pour renforcer notre réseau, nous misons sur l’expansion géographique, avec de nouveaux points de service dans les grandes villes et le renforcement des partenariats, via des négociations avancées avec des acteurs nationaux majeurs. À l’international, plusieurs marchés africains et mondiaux, touchés par le stress hydrique, ont un potentiel bien plus élevé. Nous sommes déjà en cours de négociation avec des partenaires pour accélérer notre implantation et répliquer notre modèle écologique.