Hicham Amadi, Directeur général de Heetch Maroc
Lancée en 2013 en France et officiellement en février 2018 au Maroc, Heetch propose un service de mobilité qui met en relation particuliers et taxis à travers une application mobile pour répondre à des besoins non couverts par les solutions traditionnelles de transport.
L’application revendique le leadership en termes de courses au Maroc.
Entretien avec Hicham Amadi, Directeur général de Heetch Maroc, qui nous explique en quoi cette application mobile est si différente des autres.
Finances News Hebdo : Aujourd’hui, comment se positionne le concept Heetch ?
Hicham Amadi : Heetch est une application mobile qui permet à un consommateur de trouver un taxi au Maroc. Dans le monde, Heetch est une application qui permet de trouver un véhicule, un véhicule de transport avec chauffeur (VTC) ou quelqu’un qui va vers un endroit pour qu’il puisse déposer quelqu’un d’autre.
Le modèle marocain est différent. Il se base principalement et exclusivement sur des gens qui ont des agréments, à savoir des taxis de catégories 1 et 2, donc typiquement des petits taxis et des grands taxis de Casablanca.
C’est une application qui permet à tout un chacun d’avoir un taxi en temps et en heure, un taxi de qualité et sécurisé. Ce sont des taxis où l’expérience du trajet est différente, parce que dans chaque véhicule, le client y trouvera une bouteille d’eau, des bonbons et un chargeur pour son téléphone.
F.N.H. : Dans quelles mesures optimisez-vous le transport ?
H. A. : Il est très compliqué de pouvoir aujourd’hui se déplacer à Casablanca. Le stationnement est compliqué, trouver des transports en commun dignes de ce nom est aussi compliqué. Excepté le tramway, les bus ne sont pas à la hauteur pour des gens qui partent en réunion ou qui ont des engagements réguliers et fréquents.
Le taxi répond à cette problématique en permettant aux gens qui se déplacent régulièrement pour des meetings ou pour des entretiens, de le faire de manière simple, facile et pas chère. Le taxi au Maroc n’est pas cher, si nous le comparons au reste du monde. Notre idée, c’est donc de permettre à celui qui a des impératifs de temps, de disposer d’un taxi de qualité avec un temps d’approche qui est aux alentours de trois minutes. Aujourd’hui, nous sommes à quatre minutes et demi, mais notre objectif est d’arriver à trois, voire deux minutes et d’avoir un minimum de confort. Ce confort permet aux clients de pouvoir utiliser leur téléphone en toute quiétude, de pouvoir y trouver un chargeur, de faire leurs courses, etc. Nos chauffeurs sont sélectionnés, formés et passent une certification. Les voitures sont, elles aussi, de qualité, ont moins de dix ans d’âge et donc un minimum de confort est garanti.
F.N.H. : Qu’est-ce qui différencie Heetch des autres plateformes de VTC ?
H. A. : Les autres plateformes ont une logique d’extension du marché. En gros, le marché est composé d’acteurs qui sont dans la légalité et disposent d’agréments. Un autre acteur comme Uber ou Careem crée d’autres acteurs qui, eux, n’ont pas d’agréments.
Cette pénétration d’autres acteurs non agrémentés fait que le nombre d’acteurs augmente et le temps d’approche pour un client devient assez intéressant. Par contre, le revenu moyen par acteur devient très faible, vu qu’il est réparti sur un plus grand nombre d’acteurs. Le revenu agrégé par Uber ou par Careem est important, vu qu’il provient de plusieurs sources. Notre idée est de travailler avec un seul type d’acteur, qui a un agrément officiel de l’Etat, afin de pouvoir augmenter le revenu moyen de chaque taximan. Nous gagnerons de l’argent quand chaque chauffeur de taxi gagnera bien sa vie. En ce sens, nous n’avons pas la même logique que les autres plateformes.
En termes d’approche, Heetch a toujours un côté jeune et sécurisé. Chaque chauffeur de taxi qui intègre Heetch, passe des formations certifiées et jouit d’une assurance maladie privée pour lui-même. Nous avons intégré cette composante pour pouvoir répondre à des impératifs, non pas d’ordre matériels, mais plutôt d’ordre humain, social et sociétal. Nous avons également créé un écosystème autour de l’application, à savoir donner la possibilité au propriétaire du taxi de disposer d’un certain nombre d’avantages lui permettant de réduire ses charges, notamment à travers le renouvellement de ses pneus par exemple, faire sa vidange, ou encore acheter des pièces de rechange.
F.N.H. : Vous venez de vous implanter à Rabat. Quelles sont vos ambitions en termes de flotte, d’emplois et de développement ?
H. A. : Notre objectif est de couvrir le Maroc. Nous sommes à 90% de notre potentiel sur Casablanca, et disposons de 4.000 taxis. Nous sommes leaders en termes de courses par semaine, en nombre de taxis et en nombre de clients. C’est un critère mondial par lequel l’ensemble des plateformes se compare.
L’idée de s’implanter à Rabat est tout d’abord d’étendre le service et de pouvoir lancer un service avec les grands taxis. Cela permettra aux Casablancais et aux Rbatis de pouvoir emprunter un autre moyen de transport, tout en respectant la réglementation, les prix et les arrêtés au niveau de la wilaya. C’est une volonté qui a d’ailleurs débuté avec les grands taxis de Casablanca. Leur ouverture sur l’aéroport Mohammed V est une expérience qui marche plutôt bien.
A Rabat, notre objectif est le même qu’à Casablanca. Nous projetons de devenir leader dans la capitale du pays, d’avoir le maximum de taxis et un standing de qualité. Nous sommes dans une approche volontariste avec nos partenaires du syndicat. Nous avons aussi des prétentions africaines, puisque nous sommes en cours d’ouverture en Côte d’Ivoire et nous ciblons aussi tous les pays du Maghreb.
F.N.H. : Heetch a récemment signé avec la Compagnie d’assurances transport (CAT) un partenariat stratégique. Quels en sont les principaux axes ?
H. A. : La CAT est la première compagnie d’assurances de taxis qui dispose de 80% du parc au Maroc. Notre volonté est de pouvoir offrir aux chauffeurs clients de cette compagnie un avantage exclusif. Ce partenariat est utile pour nous en termes institutionnel, car la CAT est une société qui apporte d’autres services aux taxis, surtout qu’elle dispose de packs d’assitances intéressants en termes d’accompagnement.
F.N.H. : Comment se porte votre relation avec les syndicats ? Rencontrez-vous quelques difficultés avec les chauffeurs de taxis ?
H. A. : Nous travaillons très bien avec les syndicats. J’ai d’ailleurs été agréablement surpris quand nous avons commencé les discussions avec la branche taxis de l’UMT, avec laquelle nous avons d’ailleurs construit ce projet. La naissance du projet a d’ailleurs été conclue avec les syndicats, et c’est une première au Maroc qu’un syndicat participe à la création d’un projet, qui a plusieurs composantes sociétales et business.
Nous avons une relation très saine dans laquelle le syndicat arrive à expliquer aux taximen que le fait de travailler avec Heetch est intéressant pour eux puisqu’ils ont une assurance maladie, et que nous travaillons sur l’augmentation de leurs revenus. Notre accompagnons nos partenaires sociaux pour qu’ils puissent drainer plus de membres. Nous partenariat est assez solide.
Au départ, personne ne pensait que travailler main dans la main avec un syndicat pouvait se faire dans la durée. Aujourd’hui, le constat est là. Nos relations avec l’UMT sont bonnes et nous travaillons sur Rabat et d’autres villes, notamment Marrakech et Tanger. ■
Propos recueillis par Lilia Habboul