Viticulture : Le Maroc peut mieux faire

Viticulture : Le Maroc peut mieux faire

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La production de vin du pays est faible comparativement avec les superficies allouées. La filière est pénalisée par un amont agricole peu performant. Quatre domaines monopolisent le marché, dont le groupe Zniber, qui s’adjuge près de 85% de la production et d’exportation de vin.

La viticulture au Maroc occupe une superficie de 49.000 hectares, avec une production annuelle de 230.000 tonnes de raisin, dont 172.000 tonnes de raisin de table et 58.000 tonnes en vignoble de cuve. Le pays produit plus de 400.000 hecto­litres de vin, dont 40% destinés à l’export. Malgré ces potentiali­tés, le pays peut mieux faire. La Tunisie produit 300.000 hecto­litres sur 15.000 ha seulement tandis que l’Algérie est à 500.000 hectolitres sur 50.000 hectares, soit la même superficie que celle dédiée à la culture de vigne du Maroc. Géographiquement, le vignoble de cuve se situe prin­cipalement dans les régions d'El Hajeb, Khémisset, Meknès, Gharb et Melouia, soit 80% de la superficie teritoriale. Le secteur crée 250.800 jours de travail et génère pas moins de 196 millions de dirhams de chiffre d’affaires.

La production de vin, est concen­trée dans quatre domaines-phares. Il y a d’abord «Les Celliers de Meknès», le plus connu des vins marocains au niveau national et international. C’est le leader marocain avec 85% de la produc­tion. Créé par Brahim Zniber en 1964, le groupe exploite 2.500 hectares sur Guerrouane, Beni M’tir et les Coteaux de l’Atlas, la seule appellation d’origine cer­tifiée (AOC) du Maroc. Il pro­duit plus de 30 millions de bou­teilles par an. Ces terroirs se distinguent par une altitude éle­vée, des influences de l’Atlas, de l’Atlantique, de la Méditerranée et parfois du désert. Leur climat est propice à de bonnes maturations, sous un soleil généreux. Les sites de production disposent de nou­velles installations ultramodernes (pressoirs pneumatiques, cuves inox, tables de tri, chai à bar­riques enterré, grande puissance de froid). Thalvin est un domaine historique dont la création remonte à 1927. Il est entré dans le giron du groupe Zniber. Son domaine d’Ouled Taleb est instal­lé dans la région de Benslimane, avec 250 hectares en propre. Il est approvisionné par l’apport de 800 hectares des vignerons de la région de Rommani.

Le groupe Castel est le deu­xième opérateur marocain de vin. Il dispose d’un domaine de plus de 1.000 hectares et d’uni­tés de production ultramodernes dans les régions de Meknès et Boulaouane. Outre la gamme de vins de cépages Halana, en rouge et rosé, on trouve des cuvées de bonne facture comme Bonassia, Comtesse de la Courtablaise ou Larroque (vignoble franc de pied). Une bonne partie de la production est destinée à l’expor­tation, notamment vers l’Union européenne. Enfin, «Les deux domaines», est une entité dirigée par le groupe Bourchanin, égale­ment actif dans l’importation et la distribution de spiritueux.

Il est clair que le Maroc dispose de potentialités importantes en matière de production de vins. Mais l’amont agricole présente des défaillances et d’autres limites qui perturbent l’activité.

Les quatre groupes produc­teurs de vin sont considérés comme des agrégateurs, et il leur incombe d’accompagner les petits exploitants et les produc­teurs de vigne.

Des signes d'essoufflement ?

«Il y a un monopole dans le mar­ché des vignes. Les petits exploi­tants n’ont pas beaucoup de choix pour vendre leurs produits. Pourtant, les grands opérateurs réalisent des marges importantes, mais ils ne font pas d’effort pour valoriser les produits. Ils avancent plusieurs arguments comme la qualité, le niveau d’acidité, le ter­roir ou autres pour proposer des prix bas», explique un exploitant de la région de Rommani.

La viticulture est une chaîne de valeur dont le bon rendement dépend largement des conditions favorables, de l’amont à l’aval agricole.

Il faut dire que «la viticulture au Maroc bénéficie de conditions favorables, avec une main-d'oeuvre bon marché. Les pro­duits sont quasiment bio, les her­bicides sont inutiles : on désherbe à la main. Peu de traitements phytosanitaires, les conditions climatiques ne sont pas trop capricieuses», souligne Olivier Vanchard, restaurateur et oeno­logue installé au Maroc.

Mais l’activité commence à mani­fester des signes d’essouffle­ment, surtout dans l’amont agri­cole; on est loin des superficies allouées de l’époque coloniale.

«La production de vigne est en perte de vitesse. Plusieurs terres allouées ont été converties, et ce pour des raisons morales ou techniques. Les parcelles dédiées à l’activité relevant du domaine de la Sodea et qui ont été concé­dées, dans le cadre d’un par­tenariat public-privé au privé, ont changé de culture. Ils ont opté pour les plantes fourragères pour les éleveurs ou l’arboricul­ture. Les exploitants cherchent plus de marge et des activi­tés moins délicates», explique Abderrahim Mountassir, ingé­nieur agronome.

Charaf Jaidani

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