Le tourisme interne a permis d’amortir un peu la sévère crise qui a touché le secteur suite à la pandémie liée à la Covid-19.
Mais l’offre à destination des Marocains reste inadaptée en termes de rapport qualité/prix.
Par C. Jaidani
Avec la fermeture des frontières et les restrictions sanitaires, le tourisme interne a permis au secteur d’amoindrir le choc de la crise. Même avant la pandémie, ce segment était dans une bonne posture. En 2019, saison de référence, 30% des nuitées ont été consommées par les nationaux et tout laissait présager à cette date que ce taux allait progressivement augmenter. Dans le cadre de la vision 2020, le gouvernement prévoyait de porter la part des nationaux à 40%.
«Contrairement aux marchés émetteurs étrangers qui ont été impactés ces dernières années par une conjoncture défavorable et des crises successives, le marché interne s’inscrit dans un trend haussier. Il a atteint une certaine maturité et a besoin d’une attention particulière. C’est un segment important pour assurer l’équilibre avec les autres activités. Lors de la crise actuelle, il a redonné une bouffée d’oxygène au secteur touristique national et lui a évité l’effondrement», souligne Larbi Ziani, Directeur général de Macron Voyages. Pour autant, le dispositif mis en place à destination de cette catégorie de voyageurs n’est pas assez performant, et ce à plusieurs niveaux. Les offres proposées sont jugées peu compétitives comparativement aux produits commercialisés par les toursopérateurs internationaux à destination de leur clientèle étrangère.
A titre d’exemple, un séjour d’une semaine à Agadir ou Marrakech, en formule all in dans un hôtel 4 - 5 étoiles comprenant également les frais de transport aérien et les navettes, est proposé en moyenne à 500 - 600 euros. Pour la même offre, les Marocains doivent payer le double, voire plus. Le programme Kounouz Biladi a montré ses limites. Le nombre des hôtels qui y adhèrent est insuffisant pour répondre à la demande. Cela montre le peu d’intérêt des professionnels pour cette opération. D’autant plus que les enquêtes de sondage auprès des vacanciers marocains font ressortir leur insatisfaction par rapport à ce genre de produits.
Dans un autre registre, il faut rappeler que le Plan Biladi, destiné à lancer des stations exclusivement dédiées aux touristes marocains, est loin d’atteindre ses objectifs. Deux stations seulement sur huit sont opérationnelles. La première est celle de Ifrane, réalisée par le consortium maroco-koweitien de développement (CMKD). Etalée sur 30 hectares, elle comprend 177 appartement/chalets, une résidence immobilière, un camping caravaning de 200 places et des espaces de restauration et de loisir. La deuxième station est celle de Imi Ouddar, dans la région d’Agadir. D’une superficie de plus de 9 hectares, elle dispose d’une capacité de 5.000 lits. Celle de Mehdia est en cours de réalisation. En revanche, les stations de Benslimane, Ras El Ma et Sid Abed ne sont pas encore lancées. Ces projets n’ont pas dépassé le stade des appels d’offres.
Les investisseurs n’ont pas jugé opportun d’y adhérer à cause de plusieurs contraintes, dont notamment l’emplacement de la station considéré peu attractif ou des problématiques pour la libération du foncier ou l’installation des infrastructures. «Le cahier des charges proposé par l’Etat pour remporter ce genre de projet est compliqué. Outre son coût financier élevé, d’autres conditions draconiennes imposées sont dissuasives, notamment celles relatives au respect de l’environnement ou au prix fixé à destination des touristes. Le prix de la nuitée doit être compris entre 200 et 400 DH. Or, cette tarification n’est pas intéressante, surtout que les stations sont typiquement saisonnières. Le retour sur investissement n’est pas assuré», témoigne un entrepreneur ayant postulé pour le projet de Benslimane. Pour les stations de TangerTétouan et de Marrakech, elles ne sont plus à l’ordre du jour à cause des mêmes considérations.