Tourisme interne: «un dispositif est prêt à être déployé»

Tourisme interne: «un dispositif est prêt à être déployé»

Le tourisme a été l’un des secteurs les plus touchés par la crise. 

La tutelle prépare activement la reprise et a érigé le tourisme interne en priorité.

Elle a également démarré le processus de labélisation des établissements d’hébergement touristique au Maroc, le label Welcome Safely.

Tour d’horizon avec Nadia Fettah Alaoui, ministre du Tourisme, de l'Artisanat, du Transport aérien et de l'Economie sociale.

 

Propos recueillis par B. Chaou

 

Finances News Hebdo : Quelles sont les aides mises en place actuellement en faveur du secteur touristique et quelles sont les branches qui en bénéficient ?

Nadia Fettah Alaoui : Le Maroc, sous la Vision Eclairée de Sa Majesté Le Roi Mohammed VI, Que Dieu l’Assiste, a mis la santé des citoyens au cœur de ses préoccupations au lendemain de la pandémie. C’est à cette occasion qu’un fonds dédié à la crise Covid-19 a été créé pour soutenir l’ensemble des employés, tous secteurs confondus, et leur garantir des revenus dans le contexte de ralentissement de l’activité économique. Le secteur du tourisme, étant un secteur basé sur la proximité, la mobilité et le partage, a été l’un des secteurs les plus touchés et sera l’un des derniers à retrouver ses niveaux historiques d’avant-crise. Ainsi, un plan de relance a été conçu en partenariat avec les acteurs publics et privés et a donné lieu à la signature d’un contrat-programme en août 2020 pour le soutien et la relance touristique entre 2020 et 2022, et complété par un avenant signé en janvier 2021.

Ce contrat-programme prévoit des mesures de préservation de l’emploi (indemnité forfaitaire aux salariés du secteur) dont bénéficient les opérateurs de l’hébergement, de la distribution de voyage, de transport touristique et de restauration. Outre les mesures de préservation de l’emploi, ce contrat-programme assure aux opérateurs un soutien à la trésorerie aussi bien à travers des produits bancaires, de moratoires sur les échéances d’emprunts, et des reports de paiement de cotisations sociales. Le plan de relance n’est pas uniquement un moyen de préserver les emplois et le tissu économique, il est aussi un moyen de poser les bases d’une transformation durable du secteur touristique en anticipation de ses mutations post-crise Covid-19. Cela passe notamment par des chantiers relatifs au capital humain, à la digitalisation et à la gouvernance du secteur.

 

F.N.H. : La suspension successive des liaisons aériennes, et tout récemment celles avec la France et l’Espagne, ne restent pas sans impact sur le secteur du tourisme au Maroc. A combien estimez-vous ces impacts en termes de recettes et d’emplois ? Et quelles dispositions ont été prises en contrepartie pour limiter ces effets sur les opérateurs du secteur ?

N. F. A. : Le secteur du tourisme a toujours subi des chocs extérieurs, mais la crise Covid-19 est une crise inédite de par son ampleur, mais aussi de par l’absence totale de visibilité qui accompagne cette pandémie. A fin 2020, et en comparaison avec les niveaux de l’année 2019, nous estimons à -79% les arrivées touristiques et à –72% les nuitées enregistrées. Sur le plan des recettes touristiques, la baisse est estimée à – 58%, une baisse atténuée grâce à la bonne performance des premiers mois de l’année 2020 et des recettes générées en différé de certaines prestations.

Le Comité de veille économique s’est réuni le vendredi 02 avril 2021 et a décidé, compte tenu des conditions actuelles, de prolonger les mécanismes de soutien accordés au secteur touristique jusqu’à juin 2021. Cette décision constitue aujourd’hui un bol d’air aussi bien pour les opérateurs touristiques que pour tous les employés du secteur touristique au Maroc. Pour rappel, ce sont plus de 54.000 employés qui bénéficient de l’indemnité forfaire mensuelle de 2.000 DH, plus de 1.200 sont bénéficiaires des produits de financement et de garantie.

 

F.N.H. : L’activité touristique pourrait connaître aussi une forte contraction durant le mois de Ramadan. Quelles sont les perspectives de relance post-Ramadan ? Et compte tenu de cette situation sanitaire mondiale qui perdure, le Maroc doit-il davantage miser sur le tourisme interne ? Avez-vous, dans ce sens, pensé à un dispositif susceptible de booster durablement le tourisme interne ?

N. F. A. : Nous sommes conscients que l’activité touristique internationale ne reprendra pas aux niveaux habituels dans les prochains mois, compte tenu des évolutions sanitaires relatives aux variants et aux nouvelles mesures restrictives imposées dans plusieurs de nos marchés émetteurs. La période du mois de Ramadan a historiquement été une période de basse saison pour l’activité touristique. Ainsi, nous ne nous attendons pas à réaliser des performances en croissance lors de cette période. Nous avons vu que le tourisme interne est un facteur de résilience important pour l’industrie. Les destinations matures ont réussi à atténuer l’impact de la crise grâce au poids de leur tourisme interne.

Ainsi, pour cette saison estivale, nous mettrons l’accent sur le développement du tourisme national. Un dispositif est prêt à être déployé en partenariat avec les territoires, l’ONMT et les opérateurs touristiques, et sera mis en place dès que les conditions sanitaires le permettront. Le développement du tourisme interne constitue une priorité pour le ministère, non seulement en tant que facteur de résilience à court terme, mais aussi pour en faire un levier de développement à long et moyen terme. Une étude de marché orientée vers la demande interne a été élaborée dans ce sens par le ministère et permettra de repenser à terme l’offre touristique domestique. Sur le plan des flux internationaux, le ministère a préparé un plan de promotion pour une reprise rapide des parts de marchés à la relance. Compte tenu de l’importance de rassurer aussi bien nos partenaires que les touristes internationaux, nous avons démarré le processus de labélisation des établissements d’hébergement touristique au Maroc, le Label Welcome Safely. Ce processus a aujourd’hui commencé à porter ses fruits et plus de 100 établissements sont labélisés, pour une capacité de plus de 26.000 lits.

 

F.N.H. : Plus globalement, les enseignements tirés de cette crise vont-ils conduire à repenser l’offre touristique nationale pour mieux aborder l’avenir ? Si oui, quels sont les leviers que vous comptez activer ?

N. F. A. : Si cette crise a pris par surprise l’ensemble de la planète, les enjeux qu’elle révèle n’en restent pas moins édifiants :

• la nécessité de réduire le poids de l’informel et garantir l’accès à la couverture sociale pour l’ensemble des employés du secteur. D’ailleurs, les guides de tourisme bénéficient désormais de la protection sociale dans le cadre du contrat-programme mis en place;

• la nécessité d’intensifier les partenariats stratégiques à l’international, en favorisant la coopération et le partenariat public-privé;

• le besoin d’accélérer la digitalisation des processus de fonctionnement des entreprises, des services aux usagers et, de façon générale, sur l’ensemble de la chaîne de valeur touristique;

• le besoin de promouvoir et encourager l’innovation et la création par les jeunes pour une meilleure employabilité et attractivité du secteur touristique pour les jeunes à fort potentiel.

 

 

 

 

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