Dans le projet Casablanca Smart City, le rôle des instituts et des Universités en tant que véhicules de savoir est indéniable. Chez Mundiapolis, l’importance de ce domaine de recherche est en croissance très rapide. Dr Samar Mouchawrab, directeur des études de l’Ecole d’ingénieurs Mundiapolis, nous éclaire sur comment l’Université y prend part.
Finances News Hebdo : La ville de Casablanca organise son premier Smart City. Comment votre Université s’inscrit-elle dans cet événement ?
Samar Mouchawrab : Derrière Casablanca Smart City, on trouve plusieurs projets de recherche. L’axe de recherche principal auquel participent nos étu-diants, en collaboration avec l’Université Hassan II, est le développement d’une plate-forme de supervision et de contrôle de l’éclairage public utilisant l’«Internet des objets». En outre, l’Université Mundiapolis encourage ses étudiants à innover dans le domaine du développe-ment durable, qui est un pilier important des Smart Cities. Cette année, notre Challenge innovation & entrepreneuriat, une compétition lancée il y a 3 ans par l'Ecole d'ingénieurs de l'Université Mundiapolis, avait comme thème le développement durable (retenu dans l’esprit de la COP22) : 20 équipes y ont participé et ont été accompagnées par deux incubateurs et 7 coachs grâce à la contribution de Espace Bidaya, Tech Verse, DerbSellicon et l'AFEM (Association des femmes entrepreneurs marocaines), dont les mana-gers et coachs ont accompagné nos équipes pendant quelques semaines avant le jour de la compétition. Notre but est de continuer à augmenter le nombre de participants qui poursuivent leur projet entrepreneurial et leur engagement pour le développement durable au-delà de la compétition.
F.N.H. : Quel est le rôle que sont assignées à jouer les écoles et les Universités dans l’accompagnement d’un projet Smart City ?
S. M. : La signification que j’aime retenir de «Smart City» est celle d’une ville intelligente, car «elle» réflé-chit - et agit - pour le bien-être de ses citoyens et pour la pérennité de ce bien-être. Donc, la dimension environnementale et de développement durable est inéluctablement présente. En plus, on retrouve éga-lement une dimension de «connectivité» (avec ses déclinaisons : transport et informatique), et aussi une dimension «citoyen» faisant référence à l’implication des citoyens à travers leur participation engagée et leur contribution à façonner la ville qu’ils souhaitent. Il est alors évident que le rôle des écoles et universités peut être très significatif. A l’Université Mundiapolis, par exemple, notre centre de recherche ICT4Dev a développé une expertise remarquable au niveau international dans la dimension «citoyen» des Smart Cities ou Ecocities. Ses recherches actions s’attèlent à trouver les manières les plus efficaces d’utili-ser les technologies de l’information pour gagner l’engagement des citoyens dans la cause publique. L’importance de ce domaine de recherche est en croissance très rapide; notre centre ICT4Dev est membre fondateur - aux côtés des centres de Cornell University, de l’Université de Barcelone et de deux universités australiennes - du Steering Committee du réseau international réunissant des experts du milieu universitaire dans ce domaine. Mais au-delà de la recherche scientifique, j’estime que le rôle fondamental qui nous incombe dans les écoles et les Universités - et l’opportunité que nous avons - est d’accompagner nos étudiants à devenir des agents de développement, à avoir le mindset du citoyen engagé -, d’abord dans sa propre réussite, et du citoyen convaincu et engagé à faire la différence autour de lui. Ensuite, nous avons la responsabilité de les accompagner pour acquérir les compétences (ce volet est plus technique et, je dirais, plus simple !) pour être effectivement outillés afin de mettre en oeuvre leurs idées et avoir un impact réellement posi-tif. Dans notre expérience, ceci passe souvent par du «learning by doing» - de la formation par la pratique !
F.N.H. : L’exposition donnera lieu à un grand concours d’innovations en matière d’applica-tion. Comment comptez-vous y prendre part ?
S. M. : Tout simplement à travers nos étudiants… Nous avons plusieurs étudiants qui ont participé dernièrement à notre Challenge innovation & entre-preneuriat 2016 à Mundiapolis avec leurs projets de développement durable. Il est prévu qu’ils participent au concours de l’innovation de Smart City Expo Casablanca. Nous avons aussi des étudiants qui ont travaillé pendant plusieurs mois sur des projets écocitoyens dans le cadre d’une collaboration de notre centre ICT4Dev avec l’organisation américaine Ecocity Builders. Le projet utilise les nouvelles technologies de Crowdsourcing et Crowdmapping sur les données environnementales, en impliquant les étudiants, la société civile et les citoyens. Le projet a été structuré en FieldWorks appelés «Bootcamps», dans une zone pilote «Roches Noires», où les données sur les indica-teurs urbains peuvent être recueillies. Ces indicateurs comprennent : accès, qualité de l'air, de l'énergie, de l'alimentation, matériaux, sols, eau, culture, commu-nauté, économie, éducation, qualité de vie, biodiver-sité, capacité de charge et intégrité écologique.
F.N.H. : La métropole dispose-t-elle du poten-tiel académique nécessaire pour en faire une ville intelligente inclusive et innovante ?
S. M. : Je pense sincèrement que le potentiel est bien là. Plusieurs centres de recherche à travers les Universités de la métropole travaillent activement sur le développement des solutions techniques qui feront partie de la plate-forme globale de Casablanca Smart City. Maintenant, la clé à mon sens réside d’abord dans l’état d’esprit, dans la ferme détermination de faire de Casablanca une ville intelligente, inclusive et innovante. Ceci passe surtout par une fédération et un engagement des parties prenantes autour de cette vision et de créer un «win» pour chacune de ces parties dans la poursuite de cette vision. Il me semble que c’est la démarche qui a été entreprise, et c’est très bien. Il reste à persévérer, catalyser, suivre sans relâche, et s’inscrire dans une culture «agile» et d’amélioration continue. Pour ma part, je suis opti-miste, vu le leadership au niveau de la métropole.
Propos recueillis par Soubha Es-siari