Sécurité chantier : Arsenal juridique insuffisant

Sécurité chantier : Arsenal juridique insuffisant

legende securiteLe Code de la construction, qui donne une importance à la sécurité, est toujours au stade du projet. Le volet sécuritaire est relégué en seconde position chez les promoteurs qui investissent peu dans le domaine, surtout au niveau de la formation de leurs agent. Il y a une faiblesse des entreprises et des conseillers spécialisés dans le domaine.

Le BTP reste le secteur le plus impacté par les accidents de travail. Le Maroc a fait beau­coup de progrès sur le plan règlementaire, mais l’arsenal juridique demeure insuffisant.

Le Code de la construction est toujours en projet. Promis par le ministère de l’Habitat en 2010, le texte traîne toujours.

Cette loi se veut un référentiel technico-réglementaire, qui vise l’organisation de l’acte de construire afin de combler les différentes défaillances en raison de la multitude des intervenants, aussi bien insti­tutionnels que professionnels.

La sécurité dans les chan­tiers est l’un des axes majeurs que le Code de la construction veut bien cerner. Il est ques­tion d’instaurer un système d’établissement des bilans des risques dans les chantiers de construction et des mesures et dispositions nécessaires pour la prévention des risques.

Par ailleurs, il faut noter que certaines normes et précau­tions ne sont pas respectées dans les chantiers. Les opé­rateurs relèguent au second plan les mesures de sécurité, et le contrôle des autorités ne suit pas.

«La plupart des accidents sur les chantiers sont dus à une méconnaissance des normes de sécurité et les promoteurs ne prennent pas suffisamment en compte les dispositions nécessaires pour réduire ce risque, surtout au niveau de l’informel», explique-t-on au ministère de l’Habitat et de la Politique de la ville.

La Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI) a déjà formulé des recomman­dations pour catégoriser les risques dans la construction et différencier entre ceux liés à la conception et ceux liés à l’exécution.

D'ailleurs, l'un des objectifs du contrat-programme du secteur des assurances est d’associer les compagnies aux stratégies de prévention et d’encoura­ger la certification sécurité des entreprises. Et ce en rendant obligatoire la Tous Risques Chantier (TRC).

Avec l’essor qu’a connu le secteur de l’immobilier ces dernières années, des entre­prises avec un management et un processus de travail modernes ont investi l’acti­vité, mais d’autres continuent d’opérer avec des méthodes dépassées.

La prévention des risques relève de spécialistes, et rares sont les entrepreneurs qui font appel à des experts en la matière pour un suivi et un dia­gnostic rigoureux tout au long de la chaîne de construction.

«Les risques dans les chan­tiers sont multiples. Il y a ceux qui sont liés au sol, aux équipements, aux engins, aux chutes, à l’outillage, aux matériaux, aux produits ou aux personnes… Les risques se compliquent si l’on prend en considération la multitude des intervenants et des corps de métiers. Un projet en BTP nécessite beaucoup de temps de préparation et de travail et un investissement important, le moindre sinistre peut le pertur­ber ou l’arrêter définitivement et les exemples ne manquent pas. Il est donc primordial de pendre les dispositions néces­saires en matière de sécurité pour réduire au maximum les différents risques», explique Rachid Belhoucine, expert en prévention des risques de chantier BTP.

«Le budget alloué à ces dis­positions reste insignifiant comparativement à celui du projet. Les mesures de pré­cautions peuvent sauver des vies humaines, éviter des bles­sures ou des dégâts matériels. Pourtant, les promoteurs sont peu regardants à ces initia­tives», indique-t-il.

Belhoucine, qui est également formateur en matière de pré­vention des risques, rapporte qu’«il y a un intérêt de plus en plus croissant des entreprises de construction pour former leurs agents et employés en matière de sécurité du travail dans les chantiers; mais leur nombre reste insuffisant et la fréquence de ces formations n’est pas assez conséquente».

Outre les chantiers supervisés par les sociétés organisées, la sécurité dans la construction se pose avec acuité au Maroc du fait que plusieurs chantiers sont de type auto-construction, où les règles élémentaires de sécurité font défaut.

Les communes qui délivrent les autorisations de construire sont également respon­sables du suivi du chantier au niveau du contrôle de la sécurité. La plupart de ces ins­titutions locales ne disposent pas de moyens humains et matériels suffisants pour réa­liser, comme il se doit, cette tâche

Pratique

Evaluation des risques

Un chantier de construction nécessite l’intervention d’une ou de plusieurs entreprises, selon les tâches et les métiers. Le projet nécessite la mobili­sation de personnes, et aussi l’utilisation de machines dont le fonctionnement présente des risques. Cela implique nécessairement une coordina­tion bien organisée entre les différents intervenants, afin de mener à bien les différents tra­vaux.

Le maître-d’ouvrage et le maître-d’oeuvre chargé de la conception doivent s’effor­cer de prévenir les risques en appliquant les principes géné­raux de prévention, dès l’élabo­ration du projet, lors des choix architecturaux, techniques et organisationnels ainsi que lors de la planification des diffé­rents travaux qui se dérouleront sur le chantier.

Certaines entreprises de construction font appel à un coordinateur de chantier.

Son rôle en matière de sécurité est primordial. Il établit un pro­gramme dans lequel la préven­tion sur les lieux de travail doit figurer en bonne place. Il donne des recommandations et des avis précis afin de juguler les éventuels désagréments. Il a également pour tâche d’évaluer les risques et de les éviter.

Avant d’entamer les travaux d’excavation, il est recomman­dé de demander auprès des autorités les plans d’emplace­ment des éventuelles conduites utilitaires souterraines (électri­cité, téléphone, eau, asssainis­sement ou autres…), de détec­ter l’emplacement exact des conduites et de les signaler. Les risques spécifiques pouvant être causés par ces conduites sont l’endommagement, l’arra­chement ou le contact avec les conduites souterraines ou aériennes, engendrant éven­tuellement un incendie et/ou une électrocution.

Lors des différentes phases de construction d’une habitation – du gros oeuvre au parachè­vement -, le risque de chute de personnes et d’objets est permanent.Les équipements de protection collective constituent le moyen le plus efficace pour faire face à ce risque. Après une étude bien pensée, ces équipements peuvent être intégrés dans chaque phase de construction.

Charaf Jaidani

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