Saïd Mouline : Il faut rappeler que le gaz butane est subventionné pour que les foyers les plus démunis puissent bénéficier d’une énergie abordable pour la cuisson et aussi pour combattre la déforestation dans notre pays. C’est une énergie qui a beaucoup d’atouts et qui a sa place dans le mix de notre consommation énergétique.
Le problème est dû à son utilisation pour d’autres fins que la cuisson parce qu’elle est subventionnée. C’est un détournement de la subvention. On voit de plus en plus son utilisation dans des fermes pour le pompage, dans de grandes maisons pour le chauffage ou même chez certains industriels.
Il est tout à fait normal que le citoyen, lorsqu’il doit investir dans un chauffe-eau pour son domicile ou dans une pompe pour son irrigation, choisisse ce qui lui reviendra le moins cher.
Aujourd’hui, avec la subvention, il s’oriente naturellement vers le gaz butane, alors que d’autres solutions existent. C’est pour cela qu’à l’AMEE, nous avons, entre autres, un programme dédié à l’utilisation des chauffe-eaux solaires et un autre au pompage solaire.
S. M. : Lors des Assises sur l'agriculture de 2013, une convention a été signée entre l'ex-ADEREE (AMEE) et les départements de l'Agriculture et de l'Energie pour le développement du pompage solaire dans le secteur de l'agriculture. Depuis, l’Agence a mis en place et testé divers types de pompes solaires à travers le Royaume. Plus d’une trentaine de projets pilotes ont été réalisés. Le suivi technique de ces projets a permis d’évaluer les performances du matériel installé et de mettre au point des programmes de diffusion de stations de pompage photovoltaïques à l'échelle nationale, eu égard à leurs caractéristiques qui répondent aux exigences de développement durable et d’économie d’énergie.
Nous continuons la sensibilisation des agriculteurs lors de différents salons, mais aussi lors des roadshows de l’Agence et par la diffusion de guides (guide d’installation des systèmes de pompage solaires, guide sur les bonnes pratiques d’efficacité énergétique dans les exploitations agricoles, dont la technologie de pompage photovoltaïque). Nous continuons la formation par des sessions dédiées aux installateurs qui doivent dimensionner et installer correctement les systèmes.
Avec les ministères de l’Agriculture et de l’Energie qui appuient ce programme, nous poursuivons les discussions concernant les possibilités de subvention pour les petits agriculteurs.
Je vous rappelle que l’énergie solaire est une énergie nationale, non polluante et pérenne; elle ne cause pas d’émissions de gaz à effet de serre, préservant ainsi l’environnement et la santé humaine et n’a pas de nuisance sonore.
Nous avons estimé pour le pompage que le retour sur investissement est assuré à partir de 3 ans en substitution au gasoil et de 7 ans en substitution au gaz butane subventionné, sachant que la durée de vie du système solaire photovoltaïque est de 25 ans. Avec le Crédit Agricole du Maroc qui a aussi été partenaire dès le début, il y a également la possibilité de financement de ces investissements. Aujourd’hui, plus de 10.000 pompes solaires fonctionnent sur le territoire, mais surtout dans les grandes exploitations.
S. M. : L’AMEE est heureuse d’annoncer que nous avons obtenu le soutien du GEF/ PNUD pour un programme qui sera lancé dans les prochaines semaines sur le pompage solaire. En effet, le potentiel national est énorme : près de 610.000 exploitations agricoles (42%) ont une surface entre 3 et 20 ha, et 762.000 exploitations agricoles (53%) ont moins de 3 ha. Le projet a pour objectif la création d’un cadre propice au développement du pompage solaire pour ce type d’exploitations. ■
Propos recueillis par Soubha Es-siari