- Chiffre d’affaires +14,7% l'an dernier, bénéfice net +49,6%
Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), 16 février (Reuters) - Renault a publié vendredi des résultats records pour 2017 grâce au renouvellement de sa gamme et à la contribution d'Avtovaz et de Nissan, renforçant ainsi la position du PDG Carlos Ghosn face à l'Etat actionnaire dans le débat sur sa succession et sur la consolidation de l'alliance Renault-Nissan.
Le groupe au losange a réalisé l'an dernier un chiffre d'affaires record de 58,77 milliards d'euros, en hausse de 14,7%, une marge opérationnelle - record également - de 6,6%, contre 6,4% en 2016, et un bénéfice net, part du groupe, de 5,11 milliards (+49,6%).
Le résultat opérationnel (3,85 milliards) dépasse le consensus des analystes établi par Inquiry Financial pour Reuters, qui donnait 3,65 milliards, mais le chiffre d'affaires s'inscrit sous le consensus de 59,2 milliards.
«Nous avons une année record sur bien des domaines», a commenté à des journalistes la directrice financière de Renault, Clotilde Delbos. «A commencer par la performance intrinsèque de Renault sur des marchés porteurs»
Le groupe a confirmé ses prévisions de croissance des marchés en 2018, notamment une hausse de 2,5% de la demande automobile mondiale, ainsi que son objectif d'une hausse de son chiffre d'affaires à changes et périmètre constants. Il vise également cette année une marge opérationnelle supérieure à 6%.
Renault est parvenu à compenser un effet de changes négatif de 303 millions d'euros et un effet des matières premières négatif, lui aussi, à hauteur de 394 millions. Il a notamment réduit ses coûts de 538 millions en 2017, grâce notamment au système d'optimisation «Monozukuri».
«Je ne pense pas que (l'effet de change) va s'améliorer (cette année), bien au contraire, je pense que ça risque d'être un petit peu pire», a ajouté Clotilde Delbos.
A 10h55, l'action Renault gagne 2,88% à 88,52 euros, enregistrant ainsi la plus forte hausse du CAC 40 (+0,97%). Le titre Renault a progressé de 5,5% depuis début janvier, contre +4,6% pour l'indice sectoriel européen après une année quasiment blanche en 2017 (-0,7%).
«Les résultats sont vigoureux à tous les niveaux et les prévisions 2018 traduisent une tonalité confiante», commente Barclays dans une note. Mais selon la banque britannique, l'action réagit surtout à l'annonce d'un nouveau mandat pour Carlos Ghosn et à la nomination d'un numéro deux de Renault.
«Cela envoie un signal de confiance au marché sur la direction stratégique du groupe et reflète la priorité donnée à trouver la structure d'entreprise la plus efficiente possible», estime-t-elle.
«L’irréversibilité» de l’Alliance
Conforté par la performance 2017, le PDG Carlos Ghosn a en effet été confirmé aux manettes du groupe pour encore quatre ans afin de renforcer l'intégration de l'Alliance formée avec le partenaire japonais Nissan et son compatriote Mitsubishi. Le renouvellement de son mandat d'administrateur sera proposé aux actionnaires lors de l'assemblée générale annuelle du 15 juin.
Carlos Ghosn, 63 ans, devra «engager les étapes décisives permettant de rendre l'alliance pérenne» durant son prochain mandat, a fait savoir jeudi soir le conseil d'administration du groupe automobile.
«L'alliance, je suis convaincu qu'elle est irréversible, mais nous voulons nous assurer que tout le monde en soit convaincu aussi», a déclaré le PDG de Renault au cours d'une conférence avec les analystes financiers. «Nous allons franchir des étapes supplémentaires pour garantir que ce ne soit pas partagé seulement par quelques experts, mais par l'ensemble du marché».
Carlos Ghosn a ajouté que le groupe annoncerait d'ici quelques semaines de nouvelles initiatives pour approfondir les synergies avec ses partenaires, tout en précisant que le renforcement de l'alliance serait "d'une toute autre nature".
Le PDG a également répété qu'il jugeait impossible de procéder à un rapprochement total entre Renault et Nissan si l'Etat français conservait une participation importante. «Je ne vois pas comment la partie japonaise pourrait accepter des étapes supplémentaires avec l'Etat français comme actionnaire majeur», a-t-il ajouté aux analystes.
Il reste toujours à trouver un accord sur la structure idéale pour consolider l'alliance. Et notamment sur les demandes de l'Etat, principal actionnaire de Renault avec 15% du capital, pour qu'un renforcement des liens avec Nissan préserve les intérêts nationaux français.
Le conseil d'administration a également confirmé la promotion du directeur délégué à la Compétitivité (CPO) Thierry Bolloré à un nouveau poste de directeur général adjoint, à compter du 19 février.
Malgré l'arrivée d'un numéro deux, Carlos Ghosn reste l'homme fort alors qu'il semblait parti jusqu'ici pour céder la direction opérationnelle et se concentrer sur la présidence non exécutive de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi.
Selon des sources, des administrateurs indépendants ont fait part de leurs préoccupations sur la manière dont le processus de recrutement a été conduit, et notamment sur son incapacité à identifier des candidatures externes.
«C'est une nomination par le PDG, ce n'est pas une nomination par le conseil d'administration», a précisé Carlos Ghosn. «Mais je voulais que le conseil soit impliqué dedans, pour m'assurer qu'il se sente impliqué dans cette décision».
Sur son salaire, objet d'un bras de fer régulier avec l'Etat et à l'origine d'un tollé public en 2016, quand l'assemblée générale avait rejeté la rémunération proposée, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a annoncé que Carlos Ghosn avait concédé une forte réduction au titre de 2018.
«Il a accepté de baisser de 30%, il a organisé sa succession, tout ça (...) nous permet, l'Etat et Renault, de travailler main dans la main, ensemble, en vue de la prochaine AG pour garantir l'avenir de l'alliance», a déclaré Bruno Le Maire sur CNews.
Carlos Ghosn a expliqué de son côté cette baisse par la réorganisation du travail consécutive à l'arrivée de Thierry Bolloré.
La partie fixe du salaire de Carlos Ghosn sera réduite de 19% à un million d'euros. En ajoutant part variable et actions de performance, la rémunération du PDG au titre de 2016 avait atteint 7,06 millions d'euros.
(Avec Yann Le Guernigou, édité par Jean-Michel Bélot) Reuters