Par M. Diao
Après une année 2020 catastrophique sur le front économique, marquée par une forte contraction de la croissance à – 7% du PIB en raison de la crise sanitaire, force est d’admettre qu’il est plus que nécessaire de mettre à contribution tous les leviers susceptibles de hâter le redémarrage de la machine économique.
C’est en cela que le projet de Loi de Finances 2021 (PLF 2021) avait suscité beaucoup d’espoir, notamment sa propension, via le levier fiscal et l’investissement, à permettre à l’économie nationale de se remettre rapidement des stigmates de la crise sanitaire. Or, aujourd’hui, le constat est sans appel car peu de mesures fiscales révolutionnaires sont contenues dans la LF 2021. C’est dans ce contexte que la BritCham (Chambre britannique de commerce) a organisé récemment un webinaire consacré à la LF 2021 et aux impacts attendus de ce nouveau texte.
La rencontre, tenue sous le thème : «Loi des Finances, charte de l’investissement… face à la crise», a permis à Mehdi Fakir, économiste et expert-comptable, et Nabil Adel, directeur du Groupe de recherche en géopolitique et géoéconomie de l’ESCA, d’évaluer dans un premier temps la portée de la LF dans le contexte actuel, sur les plans économique, social et sanitaire. Les deux intervenants se sont accordés pour dire que la LF 2021 reste limitée pour permettre au pays de sortir de la crise par le haut. La pandémie a réussi à dégrader davantage quasiment tous les indicateurs macroéconomiques.
«La LF est limitée. Elle est un instrument dont l’horizon temporel ne s’étale que sur une année. Or, les problèmes fondamentaux du Maroc sont structurels et nécessitent un traitement sur le long terme», explique Nabil Adel. Le professeur a insisté sur les marges de manœuvre budgétaires réduites de l’Exécutif. La crise a accru les besoins sociaux, tout en favorisant la baisse des recettes publiques. Pour sa part, Mehdi Fakir a assuré qu’il faut plus qu’une Loi des Finances pour remédier aux problèmes structurels du pays.
L’expert-comptable a relevé quelques mesures fiscales de la LF 2021 en faveur du tissu entrepreneurial, fragilisé par la crise. Il s’agit, entre autres, de l’exonération de l’IR pendant 36 mois pour les jeunes recrues ayant un CDI et l’instauration de la Contribution professionnelle unique (CPU). Par ailleurs, Nabil Adel a émis des réserves sur le caractère viable de la relance de l’économie par la dépense, qui encourage les importations et la dette, laquelle devra être payée d’une manière ou d’une autre. Au regard de ce qui précède, il est clair que le Fonds Mohammed VI pour l’investissement est un levier adapté à la relance économique.
Quid de la nouvelle charte de l’investissement ?
La nouvelle charte de l’investissement, qui devrait être discutée au Parlement dans les prochains jours, est de nature à accroître la visibilité des investisseurs et poser les bases d’une politique fiscale harmonisée, équitable et stable. En dépit des espoirs qu’elle suscite, Mehdi Fakir a attiré l’attention sur le fait que le dispositif à lui seul est dans l’incapacité de booster les investissements, indispensables pour une relance économique durable.
«Les investisseurs ont besoin d’avoir confiance dans les institutions et le climat des affaires avant de s’engager. La lourdeur administrative et le coût prohibitif du foncier sont autant de facteurs rédhibitoires aux yeux des investisseurs nationaux et internationaux», analyse l’expert-comptable, qui rappelle que dans le contexte actuel, il n’est pas dénué de sens de songer à l’édification d’une Loi des Finances rectificative au cours de l’année en cours.