◆ La demande intérieure aurait contribué négativement à la croissance au deuxième trimestre 2020.
◆ La forte dégradation des finances publiques complexifie davantage d’éventuelles baisses des taux d’impôts sus-ceptibles d’augmenter les revenus disponibles des ménages.
Par M. Diao
Pour peu que l’on s’intéresse à l’économie nationale, il est assez aisé de constater que la demande intérieure constitue le principal moteur de la croissance économique au Maroc. Les derniers chiffres de conjoncture économique dévoilés récemment par le haut-commissariat au Plan (HCP) corroborent la centralité de la demande intérieure dans la dynamique économique du Royaume.
D’après l’institution de prévisions, le PIB se serait contracté de 13,8% au deuxième trimestre 2020, sous l’effet entre autres d’une contribution négative de la demande intérieure. Pour avoir un ordre de grandeur, la consommation des ménages en volume s’est repliée de 6,7% en variation annuelle (contre +1,4% au premier trimestre 2020).
Notons que la consommation des administrations s’est raffermie de 6% au deuxième trimestre 2020, portée par les dépenses de fonctionnement et celles des services sociaux. La plus mauvaise nouvelle provient de l’investissement, composante essentielle de la demande intérieure, qui a reculé de 49,4% en variation annuelle au deuxième trimestre 2020 contre -4,8% au premier trimestre de la même année.
Recul de la consommation des biens manufacturés
L’effondrement de la demande intérieure, dont les conséquences sont perceptibles sur la croissance, commande la mise en place urgente de mécanismes de soutien dans le cadre du Plan de relance économique tant attendu et qui tarde à voir le jour. Et ce, afin de soutenir la consommation des ménages.
Les données factuelles du HCP montrent que les Marocains ont réduit leurs dépenses en biens manufacturés (habillement, équipements) et celles en lien avec la restauration, le transport et les loisirs au deuxième trimestre, à cause de la propagation de la Covid-19, dont les conséquences ont été multiples (confinement total, cessation d’activité des entreprises, pertes et diminutions de revenus des ménages, etc.).
Interrogé sur les leviers idoines à activer afin de réanimer la demande intérieure, Mehdi Lahlou, économiste et professeur, apporte un éclairage édifiant sur les fondements de la relance sous la forme d’une politique budgétaire.
«Il faut garder à l’esprit que la relance par la demande intérieure via le budget de l’Etat (baisse d’impôts, hausse des investissements publics), dans l’optique d’augmenter les revenus disponibles des ménages, par exemple, ne peut se faire que dans le cadre d’une Loi de Finances rectificative, toujours inexistante», précise-t-il (voir interview).
Une situation inconfortable
Les finances publiques ont fait les frais de la Covid-19. Pour preuve, l’exécution du budget de l’Etat au terme des cinq premiers mois de 2020 fait ressortir un déficit de 25,5 Mds de DH contre 19,5 Mds de DH un an auparavant.
Les recettes ordinaires, impactées principalement par le recul des rentrées fiscales, ont diminué de 10%. La forte dégradation des finances publiques complexifie davantage d’éventuelles baisses des taux d’impôts susceptibles d’augmenter les revenus disponibles des ménages.
Dans le même ordre d’idées, notons qu’au niveau national, des suggestions vont dans le sens de l’abaissement des taux de TVA appliqués à certains produits et services afin de re-booster la demande intérieure. Cette recommandation, de nature à tirer vers le bas les prix de certains produits et services, est susceptible de revigorer la consommation des ménages en biens manufacturés et en services.
En définitive, la relance économique par le soutien de la demande intérieure aura indubitablement un impact sur les finances de l’Etat déjà chahutées par la crise. Toujours est-il que bon nombre d’économistes prônent l’idée selon laquelle il incombe à l’Etat d’absorber les chocs générés par la crise, tout en mettant en place des conditions propices à une reprise de l’activité économique.