Les mesures incitatives déclinées par l’Etat demeurent insuffisantes.
La complexité des statuts fonciers et le manque d’adhésion des fellahs sont les principales contraintes.
Par C. Jaidani
Le programme de reconversion des cultures céréalières à d’autres activités à plus fort rendement se poursuit, mais pas au rythme souhaité par le Plan Maroc Vert (PMV). Plusieurs contraintes perturbent la réalisation de cette stratégie, dont notamment la complexité des statuts fonciers et l’aptitude des fellahs à changer leur mode d’exploitation.
Rappelons que cette initiative a pour objectif d’améliorer le revenu de la population concernée, notamment les petits paysans situés dans les régions pauvres ou enclavées. Il faut souligner que la céréaliculture, dans son mode de production traditionnelle, est peu rentable et assure tant bien que mal des revenus de subsistance. Elle est le plus souvent exercée comme activité complémentaire pour accompagner l’élevage des ruminants (Bovins, ovins et caprins) à travers les cultures fourragères.
«En dépit des mesures de soutien déployées par l’Etat, les exploitants trouvent beaucoup de difficultés pour assurer la reconversion. La plupart de leurs parcelles sont dans l’indivision et nécessitent l’accord des autres propriétaires. Même au niveau du financement, le Crédit Agricole se montre généralement réticent à leur accorder des crédits d’investissement à cause de ces contraintes», explique Abderrahim Mouhajir, ingénieur agronome. Il est à rappeler que l’Etat s’est engagé à réduire les surfaces de céréaliculture d’un million d’hectares, notamment celles situées dans le bour favorable et dont le rendement est assez faible.
Dans ce cadre, tout un programme a été mis en place, consistant en une subvention de 50% pour l’achat des plants, des aides pour l’amélioration des productions, la modernisation du matériel d’extraction, l’irrigation localisée et les projets d’agrégation.
«C’est une offre très intéressante, qui permettra aux exploitants concernés d’améliorer sensiblement à terme leur revenu. Certaines cultures peuvent donner des récoltes dont la valeur est cinq fois supérieure à celle des céréales, à condition de résoudre certaines problématiques. Parmi elles, il faut attendre trois à cinq ans entre le début des plantations et le rendement. Et cela impacte les exploitants qui ne peuvent pas patienter toute cette période sans revenu, d’autant que la plupart d’entre eux n’ont que cette activité pour survivre. Il est donc opportun de trouver une nouvelle formule pour remédier à cette lacune», souligne Mouhajir.
L’expert explique par ailleurs que «le programme de reconversion est également impacté par l’inaptitude des exploitants à accepter le changement, car ils ont hérité le métier de leurs ancêtres et leur savoir-faire est traditionnel. Ce sont en majorité des personnes analphabètes et donc peu réceptives à l’adoption des nouvelles techniques», précise Mouhajir. Toutefois, il est utile de mentionner que certaines filières ne sont pas exigeantes en matière de technicité, comme la culture des oliviers, figuiers, amandiers ou le kharroub. Par contre, elles nécessitent un certain encadrement au démarrage de l’investissement. En conclusion, le nouveau gouvernement devrait revoir cette stratégie dans le cadre de «Génération Green».
L’idée est de lancer un nouveau dispositif comprenant des mesures incitatives non seulement d’ordre financier mais aussi administratif et social. Une campagne de communication est à déployer pour mettre en valeur et faire la promotion de la reconversion. Et ce, en consentant davantage d’effort en matière de vulgarisation et en ciblant les régions les plus vulnérables présentant d’importantes potentialités pour la reconversion.
Comme il est recommandé de regrouper les exploitations en coopératives et associations pour mener à bien les différents programmes d’investissement. La présence d’agrégateurs est un gage pour mieux commercialiser les produits et assurer aux producteurs un revenu soutenu et régulier.