Prévisions économiques du HCP : 2,6% de croissance en 2016

Prévisions économiques du HCP : 2,6% de croissance en 2016

hcpLa croissance ne devrait pas dépasser les 2,6% en 2016, selon les prévisions du HCP.

Les équilibres macro­économiques devraient continuer à s’améliorer, même si la dette publique globale atteindrait 81,2%. Les données du HCP montrent, par ailleurs, un essoufflement de la demande intérieure et de l’investissement. Lahlimi appelle à réaliser les réformes qui s’imposent : retraites, fiscalité et administration publique.

Les projections écono­miques du Haut com­missariat au plan (HCP) sont toujours scrutées avec un grand intérêt par la communauté des économistes et des conjoncturistes. Et les chiffres pour l’année 2016 qui viennent d’être dévoilés par le département de Ahmed Lahlimi, lors d’une conférence de presse, risquent de faire grincer des dents. En effet, le budget exploratoire pour l’année 2016 présenté par le haut-commis­saire au Plan douche les plus optimistes des observateurs, avec une croissance qui devrait s’établir à un petit 2,6%. Ses prévisions prennent pour hypo­thèses la reconduction de la Loi de Finance 2015 en matière de dépenses d’investissement de fonctionnement et de com­pensation; une campagne agri­cole 2015/2016 moyenne et un baril à 65 dollars se basant sur les projections des organismes internationaux.

Contraction de la VA agricole

Dans ces conditions, la valeur ajoutée agricole devrait se rétracter de 1,7% en 2016 alors qu’elle a connu une croissance exceptionnelle de 13,2% en 2015. La valeur ajoutée non agricole devrait croître de 3,1% la même année, après une croissance de 2,5% en 2015. Le secteur secondaire progres­serait de 2,3% en 2016 au lieu de 1,9% en 2015, et le secteur tertiaire connaitrait une progres­sion de 3,4% en 2016, contre une hausse de 2,7% en 2015.

Selon le HCP, la demande inté­rieure, principal moteur de la croissance économique natio­nale, devrait connaître un ralen­tissement en 2016 puisqu’elle ne devrait progresser que de 2,3% au lieu de 2,8% en 2015. Sa contribution à la croissance se stabiliserait à 3,1 points en 2016. Le HCP attire, par ailleurs, l’attention sur une décélération de la demande intérieure depuis 2008 qui se ressent dans la décélération constatée depuis cette date de la distribution du crédit bancaire. Le taux d’ac­croissement de la demande intérieure est, en effet, passé de 6% par an entre 2000 et 2009 à 3,3% ces cinq der­nières années. De son côté, la demande extérieure aura une contribution négative estimée à 0,5 point dans la mesure où les statisticiens du HCP tablent sur une croissance plus élevée des importations par rapport aux exportations en 2016.

Les mêmes statisticiens mettent en relief l’allègement conséquent du déficit du compte courant de la balance des paiements. Ce déficit passerait ainsi de 3,3% du PIB en 2015 à 3% en 2016. Cela constitue, selon le HCP, un point positif pour l’économie marocaine, même si cet allè­gement est aussi le fait de la baisse du taux d’investissement à moins de 29% en 2016. Ce taux est en baisse constante depuis quelques années. En 2012, le taux d’investissement était de l’ordre de 35% et en 2014, il atteignait 32,2%.

Le HCP confirme en outre l’assainissement des équilibres macroéconomiques pour l’an­née 2016, avec un déficit bud­gétaire qui devrait poursuive sa tendance à la baisse pour s’éta­blir à 4,4% du PIB en 2016. La dette extérieure du Trésor serait de 64,9% en 2016, au lieu de 63,8% en 2015 et 63,4% en 2014. Le taux d’endette­ment global devrait s’inscrire en hausse, passant de 78,2% en 2014 à 79,6% en 2015 et à 81,2% en 2016. Les réserves en devises devraient s’établir à 6,1 mois d’importations de biens et services en 2016, contre 5,5 mois en 2015. Quant aux crédits bancaires, ils devraient conti­nuer à progresser à un rythme assez faible de 3,4% en 2016.

4,3% de croissance en 2015

Le HCP a également affiné ses prévisions de croissance éco­nomique pour l’année 2015. Alors que le budget exploratoire 2015 tablait sur une croissance en 2015 de 4,8%, celle-ci ne devrait finalement pas excéder les 4,3%. Cet affinement de la prévision a été rendu possible par l’évaluation plus précise de la croissance agricole et par la légère hausse des activités non agricoles qui devraient croitre en 2015 de 2,5%, au lieu de 2% en 2014. Le HCP note, par ail­leurs, que le poids de l’agricul­ture dans l’économie nationale à tendance a reculer. Il compte pour 10% du PIB en 2015 alors qu’il était de 13% au début de la décennie. Cette diminution de la part de l’agriculture dans le PIB est liée, entre autres, au chan­gement d’année de base (2007 au lieu de 1998). La croissance hors-agriculture, comme préci­sée plus haut, devrait s’amélio­rer en 2015 à 2,5% au lieu de 2%, mais A. Lahlimi fait remar­quer que l’on reste bien loin des années 2000 où cette même croissance dépassait les 5%. Les activités secondaires ver­ront en 2015 leur valeur ajoutée croître légèrement de 1,9% au lieu de 1,7% grâce à la reprise des industries de transformation (agroalimentaire, automobile notamment). L’environnement international difficile a impacté le secteur touristique qui va connaître pour la première fois une baisse de sa valeur ajoutée de l’ordre de 2,7%. En 2015, les services ne progresseront que de 2,7% contre 2,2% en 2014, ce qui reste insuffisant. En réa­lité, le PIB non-agricole stagne et ne contribue pas encore véri­tablement à la croissance éco­nomique.

Lahlimi, le réformiste

Lahlimi soutient que «l’investissement et la croissance commencent à mar­quer un essoufflement significatif». Cette constatation est corroborée par la tendance baissière de la croissance depuis 2008 (voir graphique). Il appelle donc à adopter «les réformes structurelles susceptibles d’engager le pays dans un processus profond de diversification de son tissu productif». Selon lui, la fenêtre de tir qu’offre actuellement la conjoncture internationale ne doit pas être manquée pour sortir de la fatalité d’une croissance à 5% lors des bonnes années agricoles et une croissance en dessous de 3% dans le cas contraire. A cet égard, il estime impératif de consolider la réforme déjà engagée de la Caisse de compensation, de réformer en profondeur l’admi­nistration publique dont le coût de fonctionnement pèse pour 20% du PIB et, surtout, d’adopter urgemment la réforme des retraites. «Trêve de paroles», dira-t-il sur ce point précis. Il appelle enfin à une réforme durable du système fiscal pour le rendre plus favorable à la productivité des facteurs de produc­tion. Ce sont là les conditions de l’émergence.

Amine Elkadiri

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