Politique monétaire: Jouahri entre le marteau et l’enclume

Politique monétaire: Jouahri entre le marteau et l’enclume

Le marché continue d'anticiper un maintien du taux directeur de BAM à 1,5% pour sa réunion en juin.

Mais ce consensus est moins marqué qu'au début du trimestre.

 

Par A. Hlimi

 

Le consensus marché continue de tabler sur un maintien du taux directeur de Bank Al-Maghrib à 1,5% le 22 juin. L'idée dominante est que l'inflation est passagère et importée et que le Wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, n'acterait pas la fin de sa politique accommodante pour un phénomène qui ne serait pas durable. Mais des éléments  récents ont quelque peu semé le doute dans les salles de marché. Sur le plan interne, on notera principalement l'importante hausse de la circulation fiduciaire qui vient renforcer une tendance déjà forte entamée en 2020 avec la crise sanitaire.

La transformation d’«amas» de dépôts bancaires en cash qui s'évapore dans la nature inquiète particulièrement le secteur, et une légère hausse du taux directeur permettrait d'améliorer la rémunération des dépôts bancaires et limiter cette fuite de cash. Justement, l'autre clignotant, cher au wali de Bank Al-Maghrib, est celui de la rémunération de l'épargne longue. Le climat inflationniste détruit cette épargne pour les générations futures avec des rendements réels largement négatifs. Alors, que va faire la Banque centrale en juin ?

Les arguments pour le maintien du taux directeur

Ce sont plutôt des arguments contre la hausse du taux directeur que nous énumérons. Car maintenir le taux directeur inchangé sera d'abord un moyen pour la Banque centrale de donner un signal sur la non durabilité de l'inflation et renforcer la thèse du phénomène transitoire. De plus, augmenter le taux directeur rendra le crédit plus cher, notamment le crédit à l'équipement et le crédit immobilier, ce qui freinera une relance économique déjà rendue molle par la conjoncture internationale. Le renchérissement de la dette sera également constaté par le Trésor qui empruntera immédiatement plus cher à court terme. 

Les arguments pour la hausse du taux directeur

Augmenter le taux directeur agira sur les taux créditeurs auxquels les banques rémunèrent les dépôts à terme. Ceci dans le but d'éponger, en partie, l'hémorragie de cash dans l'économie. L'autre élément en faveur de la hausse du taux directeur est de mieux rémunérer l'épargne institutionnelle, qui affiche depuis le début de l'année des rendements négatifs à cause de l'inflation. Inflation qui, justement, par une hausse du taux principal de la Banque centrale pourrait en partie être jugulée. Un argument qui est loin de faire consensus auprès des analystes, qui estiment que l'inflation demeure importée et que sa composante monétaire est limitée. En témoigne un crédit qui évolue déjà très timidement. 

Prévisions des analystes

Pour la Recherche de CDG Capital, il est plus probable que le Conseil de Bank Al-Maghrib maintienne le taux directeur inchangé au niveau de 1,5% lors de son prochain Conseil, et ce «compte tenu de l’origine des tensions inflationnistes, notamment importé et alimentaire frais, limitant ainsi l’effet d’une action restrictive de la politique monétaire sur la maîtrise de l’inflation et les conditions de relance post-crise covid-19, qui restent fragiles et entourées d’incertitudes». 

 

Les cartes en jeu
Pour CDG Capital Insight, quatre faits majeurs caractérisent le comportement des sphères monétaire, financière et réelle de l’économie nationale, depuis la tenue du dernier Conseil de Bank Al-Maghrib en mars 2022 :  • Un creusement du déficit de la liquidité du secteur bancaire sous l’effet d’une baisse des avoirs officiels de réserve conjuguée à un fort accroissement de la monnaie fiduciaire; • Un fort dérapage à la hausse de l’inflation et de l’inflation sous-jacente à des niveaux historiquement élevés. Toutefois, ces tensions inflationnistes émanent de la composante importée et d’un choc d’offre sur l’alimentation frais, avec une demande des ménages en ralentissement et un accroissement des crédits à la consommation largement en-dessous des niveaux historiques. • Une transmission toujours incomplète des deux baisses du taux directeur de 2020 vers certains taux débiteurs, particulièrement ceux associés aux crédits à l’équipement et à la consommation des ménages, avec une faible reprise des crédits aux entreprises non financières, particulièrement ceux destinés à l’équipement. • Un fort ralentissement prévu de la croissance économique en 2022 sous l’effet d’une baisse importante prévue du PIB agricole en résultat du mauvais déroulement de la campagne agricole 2021-2022 et  d’un léger recul de la croissance non agricole, compte tenu de la forte hausse des prix des matières premières, des demi-produits et de l’énergie conjuguée à la dissipation de l’effet de base généré par la crise covid-19 en 2021.

 

 

 

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