Les think tanks ont un rôle de plus en plus croissant dans l’harmonisation des solutions proposées en réponse à des menaces internationales globales, telles que la montée du terrorisme, du populisme ou encore du réchauffement climatique.
À l’occasion de la publication des résultats de l’indice du «Global go to think tank index», OCP Policy Center et Think Tank & Civil Societies Program de l’université de Pennsylvanie ont organisé une rencontre à Rabat sous le thème : «Pourquoi les think tanks sont plus importants aujourd’hui que jamais ?» L’événement a réuni d’éminentes personnalités issues d’instituts de recherche, d’universités, d’organes gouvernementaux et de la société civile. «De nos jours, et compte tenu de l’interdépendance croissante de notre monde, aucun pays ne peut se vanter d’apporter à lui seul des solutions efficaces à des menaces qui sont globales. Le besoin d’une plus grande harmonisation ainsi que d’une mutualisation des savoirs, efforts et concessions est aujourd’hui primordial, et c’est là que s’inscrit le rôle des think tanks», souligne Abdallah Saaf, directeur du Centre des études et recherches en sciences sociales (CERSS).
L’année qui vient de s’écouler a été marquée par l’ascension fulgurante des partis politiques populistes, le Brexit ainsi que par un retour en force des discours protectionnistes qui laissent planer une menace sur la croissance économique mondiale, cette dernière restant encore fragilisée par une crise de plus de 8 ans. «Les think tanks sont devenus au cours des 20 dernières années un rouage essentiel de l’expression démocratique sur les grands sujets de société, car ils expriment non seulement les avis des experts, mais illustrent aussi la pensée de femmes et d’hommes qui éclairent les décisions des responsables politiques», souligne Mohamed Nbou, directeur des changements climatiques, de la diversité biologique et de l’économie verte, au sein du ministère délégué chargé de l’Environnement. Cette situation économique, accompagnée, d’une part, d’un chômage et des inégalités sociales de plus en plus croissantes et, d’autre part, des peurs sécuritaires, alimente les discours populistes auxquels les populations sont de plus en plus réceptives. Le changement climatique présente, quant à lui, un défi pressant pour tous les pays qui ne peuvent plus se dérober de leurs responsabilités, et où tout un chacun a un rôle à jouer dans l'adaptation et l’atténuation de ses retombées négatives.
«Les décideurs, et notamment les gouvernements, n’ont pas le temps pour réfléchir, ils sont généralement dans l’action. C’est ce genre de structures de pouvoir, développées à travers des réseaux, qui permet non seulement de mettre en commun un certain nombre de connaissances à l’échelle internationale, mais également de pouvoir utiliser les compétences nationales autour de sujets pointus», souligne Younes Sekkouri, expert en consulting et design thinking,
Les discussions ont aussi fait ressortir que les think tanks doivent contribuer à l’accumulation de la connaissance à travers une production analytique régulière en respectant l’autonomie et l’indépendance des idées. Outre le réaménagement du processus de décision de certains pays, les think tanks offrent aux décideurs l’opportunité de formuler leurs stratégies politiques et de restructurer le champ des politiques publiques.
«Le populisme est un malaise de la démocratie libérale que nous avons vu se développer durant les trois dernières décennies. La réhabilitation de la gauche dans l’architecture des think tanks ne signifie nullement l’adoption de son projet politique. Les think tanks de gauche ne font que participer, avec les think tanks libéraux, à la stratégie de communication et d’éducation de cadres pour contrer la vague populiste, c’est-à-dire former une nouvelle génération de politiciens raisonnés et professionnels dans les domaines des systèmes politiques et du fonctionnement de la société civile, du leadership politique et la planification des projets, entre autres», affirme Fatima Harrak, membre de l’Institut des études africaines.
Par C. Jaidani
Enquête internationale regroupant 1.950 personnes
Les think tanks sont des institutions aidées dans leur mission par leurs capacités à travailler facilement entre elles ainsi que par leur caractéristique d’indépendance. Le «Global go to think tank index» est un indice résultant d'une enquête internationale effectuée auprès de plus de 1.950 chercheurs, donateurs, décideurs et journalistes ayant participé à la classification de plus de 6.500 think tanks grâce à un ensemble de 18 critères développés par «The Think Tanks and Civil Society Program» (TTCSP). Le but d’un tel indice étant d'aider à améliorer le profil et la performance des groupes de réflexion tout en soulignant le travail important qu'ils accomplissent en faveur des gouvernements et de la société civile dans le monde.