Les prix ne seront plus négociables entre le client et son notaire.
Les détails avec Jad Aboulachbal, notaire, titulaire du Diplôme d’aptitude aux fonctions de notaire de Paris.
Propos recueillis par B. Chaou
Finances News Hebdo : Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste le décret relatif aux honoraires des notaires ?
Jad Aboulachbal : Lorsque l'on parle du décret relatif aux honoraires des notaires, il s'agit de déterminer par voie réglementaire le tarif applicable aux honoraires que devront pratiquer les notaires en fonction du type d'acte.
Il en résultera que le coût de la prestation du notaire sera le même, quel que soit le client ou la zone géographique. Cela signifie aussi que les honoraires ne seront plus négociables entre le client et le notaire car imposés par décret.
F.N.H. : Quels seront d'après vous les montants de ces honoraires, et sur quelle base seront-ils appliqués ?
J. A. : Le décret n'ayant toujours pas été publié, il n'est pour moi pas possible d'évoquer de manière précise le montant des honoraires.
Cependant, l'idée directrice d'un tel tarif est de tendre à trouver un équilibre entre des honoraires décents pour le notaire et la nécessité d'un coût raisonnable pour les parties à l'acte, avec un taux dégressif en fonction du montant de l'opération.
Ainsi, une vente à un million de dirhams et une vente à dix millions de dirhams ne seront pas tarifées sur la base d'un même pourcentage.
F.N.H. : Quelle sera la valeur ajoutée de cette nouvelle mesure pour le marché immobilier marocain ?
J. A. : Le marché immobilier marocain a besoin de notaires impartiaux, compétents techniquement et pouvant réclamer des honoraires décents. Dans le contexte immobilier actuel, la fixation du tarif est de nature à éviter une concurrence entre notaires caractérisée par la réduction drastique des honoraires. Et donc à renforcer la légitimité du notaire, ce qui reste un gage de sécurisation de la transaction.
Ajoutons que dans le cas d'une vente immobilière, l'essentiel des frais résulte des droits d'enregistrement (4% s'il s'agit d'un terrain bâti, 6% s'il s'agit d'un terrain non bâti) et de conservation foncière (1,5% pour inscrire la vente auxquels il faut ajouter 0,5 à 1,5% pour inscrire l'hypothèque garantissant l'éventuel prêt bancaire) et non des honoraires du notaire qui aujourd'hui, avant l'entrée en vigueur du décret sont fréquemment inférieurs à 1%.
F.N.H. : Quelle sera l'autorité qui veillera au respect des honoraires par les notaires, autrement dit qui contrôlera les notaires ?
J. A. : Après l'entrée en vigueur du décret, le notaire restera soumis au contrôle de son Ordre professionnel et en cas de contrôle fiscal, l'administration fiscale présumera qu'il applique le tarif et de ce fait il sera taxé sur cette base. Ce qui est normalement de nature à inciter le notaire à respecter ces dispositions réglementaires.
F.N.H. : Quand ce texte réglementaire a-t-il été proposé ?
J. A. : La loi 32-09 qui régit la profession de notaire depuis 2012, stipule dans son article 15 que «le notaire a le droit de percevoir des honoraires dont le montant et les modalités de perception sont fixés par voie réglementaire».
C'est sur la base de cet article de la loi que le décret doit être pris. Le décret devrait pour sa part entrer en vigueur dans les semaines qui viennent. ◆
Plafonnement des honoraires
Le nouveau cadre réglementaire portant sur les honoraires des notaires devrait bientôt voir le jour. Proposé il y a déjà 6 ans et préparé par le ministère de la Justice, ce décret de loi a pour mission de définir les honoraires à percevoir par les notaires pour chaque tranche de valeur d’un bien immobilier.
Le texte de loi y afférent fixe avec exactitude les pourcentages à percevoir selon le montant de la valeur dudit bien. Il prévoit en effet des honoraires plafonnés pour les biens immeubles de différentes catégories.
Ainsi, il en découlera que les prix des prestations seront identiques quel que soit le notaire, et ne dépasseront pas la tarification qui sera préétablie par la loi. «Sur les opérations de bien immeuble haut de gamme, le pourcentage de commission pour les notaires sera réduit par rapport aux opérations sur les biens de catégorie inférieure vu que le montant sur lequel le pourcentage de base sera appliqué est élevé, ce qui octroie déjà au notaire, un honoraire conséquent», explique Jad Aboulachbal.
Rappelons que ce projet a été élaboré en collaboration avec l’Ordre national des notaires, et vient en complément à la loi n° 32-09 relative à l'organisation de la profession de notaire, promulguée par le Dahir n° 1-11-179.