En dépit des importations, la filière demeure impactée par la sécheresse qui sévit depuis six ans. L’opération de recensement du cheptel ovin et caprin sera déterminante pour avoir plus de visibilité.
Par C. Jaidani
Le secteur agricole national passe par des moments difficiles, notamment à cause de la succession des années de sécheresse. Dans cet environnement, les filières d’élevage sont les plus impactées, surtout celle des viandes rouges. Les exploitants sont confrontés à différentes contraintes, dont particulièrement le renchérissement de l’aliment de bétail et l’amenuisement drastique des pâturages.
Conséquence : le coût de production est devenu un véritable calvaire pour les éleveurs. En dépit des mesures prises par le gouvernement pour favoriser les importations et augmenter l’offre, les prix se maintiennent toujours à des niveaux record et deviennent inaccessibles pour la classe démunie. Devant pareille situation, une question se pose : faut-il célébrer l’Aid Al-Adha, prévu en juin prochain ?
Il faut rappeler que par le passé, le Maroc a interdit ce rituel à trois reprises : en 1963, 1981 et 1996, et ce à cause de la sécheresse. C’était une décision souveraine de Feu Hassan II, en sa qualité de commandeur des croyants. Aujourd’hui, une telle mesure est-elle appropriée ? Les professionnels du secteur sont perplexes. Car les éleveurs commencent les préparatifs six mois à l’avance et les intensifient à partir du Ramadan. «Les prix des ovins ont atteint des niveaux record. Un antenais de moins de six mois se négociait auparavant entre 1.600 et 2.000 DH. Il s’affiche actuellement dans une fourchette entre 3.000 et 3.500 DH. Cette tendance à la hausse des prix devrait s’accentuer avec l’approche de l’Aïd Adha», affirme Mohamed Meskini, marchand de bétail à Souk Sebt de Tit Mellil relevant de la province de Médiouna.
Quant à une éventuelle interdiction de l’Aid Al Adha, il note que «cette décision sera catastrophique aussi bien pour les exploitants que pour le monde rural». Au-delà de son aspect religieux, le rituel a une portée économique majeure. Il assure un transfert de 18 milliards de DH des villes vers les campagnes. Il a aussi un effet d’entraînement sur plusieurs activités comme le commerce, le transport et le tourisme.
L’année dernière, le prix du mouton vif se situait entre 70 et 80 DH/kg. Mais ces derniers mois, il a grimpé pour atteindre dans certaines zones 90 DH/kilo. Les indices disponibles actuellement laissent présager une nouvelle flambée cette année. A l’Association nationale ovine et caprine (Anoc), on privilégie un discours prudent, estimant qu’il faut encore plus de visibilité avant de se prononcer.
«Le département de l’Agriculture a lancé, entre fin décembre 2024 et début 2025, une opération de recensement du cheptel national ovin et caprin. Placée sous le thème «Notre cheptel est notre richesse», cette initiative permettra de donner plus de détails, notamment l’effectif, la race, l’âge, le sexe, la répartition géographique.... Les résultats obtenus permettront aux autorités de prendre les dispositions qui s’imposent pour assurer le renouvellement et l’équilibre du cheptel. Pour accompagner l’opération, plusieurs équipes de l’Anoc ou relevant du ministère de l’Agriculture ont été mobilisées. Ce sont plus de 1.400 enquêteurs formés spécialement pour mener à bien cette initiative. Ils devront prendre contact avec les éleveurs dans près de 30.000 douars répartis sur 2.400 communes rurales. Ces équipes sont supervisées par 100 contrôleurs au niveau des provinces. Les données recueillies sont traitées et analysées au niveau central à Rabat», souligne Said Chatibi, Directeur général de l’Anoc.