Dialogue social: scepticisme autour de l’augmentation du Smag

Dialogue social: scepticisme autour de l’augmentation du Smag

Des syndicalistes estiment que la hausse est insuffisante pour amortir l’inflation.

Pour les exploitants, elle devrait alourdir les charges et rendre leurs produits moins compétitifs, notamment à l’export.

 

Par C. Jaidani

 

Le Salaire minimum agricole garanti (Smag) a été augmenté suite à un accord entre le patronat, les centrales syndicales et le gouvernement. Il est passé de 76,7 à 84,37 DH/jour, soit une hausse de près de 10%. Il est prévu de l’aligner au Smig à l’horizon 2028.

C’est l’équivalent d’un salaire mensuel de près de 2.200 DH. Interrogés à ce sujet, de nombreux syndicalistes estiment que cette augmentation reste insuffisante pour faire face au renchérissement du coût de la vie, qui n’a cessé de progresser significativement ces derniers temps. Ils déplorent qu’en dépit de cette hausse, une partie des exploitants ne pourra pas le respecter. Et ce, pour différentes raisons, notamment la vulnérabilité de l’agriculture nationale se traduisant par une forte fluctuation des récoltes. La plupart des agriculteurs travaillent dans l’informel.

Le nombre des exploitations organisées et respectant le code du travail est faible. «Généralement, ce sont les activités à forte valeur ajoutée tournées vers l’export qui observent la réglementation. Il s’agit par exemple de la filière des fruits et légumes ou des grands groupes agricoles qui disposent de toute la chaîne de valeur, depuis la production agricole dans les champs, jusqu’à l’exportation ou la commercialisation au niveau local, en passant par la transformation dans les usines», explique Hassan Naciri, délégué au Syndicat des travailleurs agricoles affiliés à l’Union marocaine du travail (UMT).

«Pour les autres filières comme la céréaliculture, les travailleurs agricoles sont payés au gré des saisons et la rémunération diffère selon les tâches et le niveau de qualification. Le plus souvent, ils ne sont pas déclarés et ne bénéficient pas de protection sociale ni d’assurance maladie. Dans ces conditions, comment peut-on imposer le respect du Smag ?», s’interroge-t-il. Et de poursuivre que «la hausse décrétée devrait améliorer l’attractivité du secteur agricole pour les travailleurs. Ces dernières années, les exploitations trouvaient des difficultés pour recruter, particulièrement les ouvriers qualifiés qui optaient pour d’autres activités plus rémunératrices, comme le BTP, le commerce ou le transport».

Du côté des exploitants, la hausse du Smag devrait impacter davantage la compétitivité du secteur, qui est très fragile. «Nous passons par un cycle très compliqué, marqué notamment par une sécheresse sévère, une hausse sans précédent des intrants, sans oublier un environnement géostratégique international très compliqué. La concurrence acharnée à l’export réduit sensiblement nos marges de manœuvre pour préserver nos parts de marché à l’étranger. Du coup, la hausse du Smag devait alourdir davantage le coût de production et impacter notre compétitivité», soulignet-on auprès de l’Association des producteurs et exportateurs de fruits et légumes (Apefel). 

 

Persistance du mode de rémunération traditionnel
Si le mode de rémunération moderne (salaire journalier ou mensuel) est répandu, les autres modes traditionnels persistent, notamment dans certaines filières comme l’élevage. Ces modes tiennent compte des récoltes et du rendement. Ils sont basés sur un régime participatif. Le propriétaire terrien s’associe à un autre exploitant non propriétaire selon des règles bien définies, prenant en considération les charges engagées et la nature de l’activité investie. Dans ces conditions, il est difficile d’appliquer le Smag. C’est le cas des régimes «Khamsa» (1/5), «Roubouâ» (1/4) et «Talta» (1/3) qui existent au Maroc depuis très longtemps, à l’époque où l’essentiel de la production était vivrière et non marchande.

 

 

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