Le DeepTech Summit a été l’occasion de mettre en lumière les startups marocaines qui ont développé des produits DeepTech ayant contribué à révolutionner les modes de vie. Entretien avec El Mahdi Aboulmadel, CEO de Deepleaf, une startup Agritech.
Par D.M
Finances News Hebdo : Quelles sont les problématiques que résolvent vos solutions DeepTech et comment votre start-up Agritech contribue-telle à l’écosystème technologique national et international ?
El Mahdi Aboulmanadel : Nous proposons trois solutions aujourd'hui. La première, c'est «Mushida», un chatbot qui est comme un acronyme artificiel, et qui peut détecter les maladies des plantes. Fonctionnant sur la base d’images envoyées par téléphone, on peut aussi échanger avec lui en français ou en arabe, en texte ou en vocal. Nous fournissons cet outil gratuitement aux agriculteurs, chercheurs universitaires, agronomes … Il permet aux agriculteurs de détecter les maladies affectant leurs cultures et d'adopter des mesures préventives pour réduire les pertes de récoltes et optimiser le rendement. En contrepartie, nous collectons ces données afin de les utiliser chez nous pour créer d’autres solutions.
La deuxième solution que nous avons mise en place est appelée CropScan. Il s’agit d’une caméra externe que l’on monte sur un téléphone et qui utilise l’infrarouge pour identifier les maladies des plantes qui ne sont pas visibles à l’œil nu et aussi les virus. L’autre use case (cas d'utilisation), c'est la détection du taux de résidus de pesticides. Nous savons aujourd’hui qu'au niveau de l’Union européenne, le Maroc est le deuxième exportateur de tomates. Cependant, nous faisons face à un grand problème de résidus de pesticides, en plus des virus tels que le TopRef qui touche plus de 20% de notre production. Grâce à cette solution, nous avons pu solutionner ce problème, en identifiant les taux de résidus et donner le TMR (Temps minimum de récolte) pour avoir 0% de pesticides. Une simple image avec cette caméra donne un aperçu fiable du temps minimum à attendre pour, par la suite, récolter et exporter sans aucune crainte.
La troisième solution cible les ravageurs et les insectes qui mangent les fruits. En effet, aujourd'hui il existe des drones de grande taille qui sont dédiés à la pulvérisation des pesticides sur un grand champ. Cette pulvérisation dégrade le sol, et l’achat de cette technologie est très coûteux. Ainsi, nous avons implifié la tâche de l’agriculteur en créant un petit drone de 20 x 20 centimètres qui va automatiquement, sans être piloté, surveiller toute la serre ou le champ ouvert. Une fois qu'il repère un objet volant, il le classifie en détectant si ce dernier est un pollinisateur ou un ravageur. Dans le cas où ce serait un ravageur, il va activer le drone, qui va attaquer ce ravageur avec des hélices et l'éliminer directement, sans utiliser de pesticides. Avec cette solution qui s’appelle Deepleaf, l'agriculteur n'a même pas besoin d'être dans le champ. Elle est au stade de MVP (Minimum Viable Product) ou (Produit minimum viable), et nous sommes en plein processus de développement.
F.N.H : Quel a été l’apport de l'Université Mohammed VI Polytechnique dans la réalisation de ce projet Agritech ?
E.M.A : Mon projet entrepreneurial a eu un commencement effectif grâce aux programmes de L’UM6P. Nous avions participé au programme Agriyoung Innovate initié par l'UM6P et l'Agence pour le développement agricole (ADA), à l’issue duquel nous avions obtenu le deuxième prix. Cela nous a offert de la visibilité et les agriculteurs locaux ont commencé à nous donner accès à leurs fermes. Parallèlement, nous avons eu accès au Fab Lab., un laboratoire technologique composé d’outils tels que des 3D printers, des machines de coupe laser, etc. Grâce à ces moyens, nous avons monté notre propre prototype. L’UM6P nous a mis en relation avec la ferme expérimentale, où nous avons mené nos expérimentations. Nous avons collecté des images de maladies de plantes et collaboré avec des experts. Nous ne pouvions pas le faire sans l’UM6P, car c'est difficile d'accéder aux fermes des particuliers pour des raisons de sécurité sanitaire. Grâce à l'UM6P, nous avons eu la chance de développer notre solution via leurs ressources et écosystèmes.
F.N.H : Quels sont les perspectives à court et moyen terme pour Deepleaf ?
E.M.A : Aujourd'hui, nous sommes en train d'être introduits auprès d’un partenaire qui travaille avec des agriculteurs au niveau du Ghana et qui souhaite utiliser nos solutions Agritech pour résoudre les problèmes auxquels font face les agriculteurs dans ce pays. Nous rencontrons aussi d'autres partenaires via ce type d’événements, qui viennent de toute l'Afrique et de partout dans le monde pour chercher des solutions à leurs problèmes.