Malgré une production céréalière infime, le Maroc assure, pour l’heure, ses arrières en termes d’approvisionnement.
Selon la FAO, les besoins d’importations céréalières du Maroc pour 2022-2023 devront augmenter à 10,4 millions de tonnes.
La reprise des exportations ukrainiennes et russes constitue une bouffée d’oxygène pour les pays importateurs de céréales dont le Royaume.
C’est un véritable coup dur pour la production céréalière au Maroc. Selon les chiffres définitifs communiqués par la tutelle, seuls 34 millions de quintaux ont été produits au titre de la campagne agricole 2021/ 2022. Un niveau en baisse de 67% comparativement à la saison précédente et l’un des plus faibles jamais enregistrés par la Royaume dans un contexte inédit de sécheresse.
La très faible pluviométrie, voire son absence dans plusieurs régions du Royaume durant les mois de janvier et février, a engendré un retard de croissance des céréales et une baisse des rendements plus ou moins importante selon les régions, alors que les céréales en zones favorables se sont relativement mieux comportées suite aux pluies de la dernière décade de février, mars et début avril. Cette campagne a également été caractérisée par une mauvaise répartition temporelle de la pluviométrie, avec près d’un tiers des précipitations qui ont eu lieu durant les mois de novembre et décembre et 53% du cumul pluviométrique qui a eu lieu aux mois de mars et avril.
Dans cette année de disette, accentuée par le conflit russo-ukrainien, nous sommes en position légitime de nous interroger sur la sécurité alimentaire du pays, compte tenu d'une denrée précieuse pour le Marocain qu’est le blé (dans toutes ses formes).
Du côté du gouvernement, pas d’inquiétudes. Interrogé sur l’actuelle «guerre du blé» que connaît le monde, le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement, porte-parole du gouvernement, Mustapha Baitas, avait assuré que le pays disposait d’une réserve de 4 mois de consommation. Qui plus est, Baitas avait précisé que le pays dispose de plusieurs mécanismes pour renouveler le stock national et le renforcer à tous les niveaux.
Selon le porte-parole, le gouvernement fournit un grand effort pour garantir l’abondance du blé, et notamment le blé tendre qui entre dans la fabrication de la farine. « En janvier 2022, ce qui a été injecté pour préserver les prix du blé tendre à des niveaux connus à savoir 260 DH le quintal dans les moulins, était à environ 71 DH. Aujourd’hui, on a dépassé de loin les 100 DH et nous frôlons même le seuil des 200 DH. Le coût est trop élevé. Cela confirme à nouveau que la crise est là, dans ce contexte que traverse le monde. Mais le gouvernement continue de résister et de subventionner cette substance pour aider les citoyens et préserver leur pouvoir d’achat ».
Pour indication, le Maroc importe annuellement en moyenne 3 à 4 millions de tonnes de blé tendre et 800.000 à 900.000 tonnes de blé dur. Au cours de la précédente saison agricole, le Maroc a importé du blé à partir de 25 pays issus d’Europe, d’Amérique du Nord, d’Amérique latine et d’Asie.
Par ailleurs, le Système mondial d’information et d’alerte rapide de la FAO indique dans un rapport que les besoins marocains d’importations céréalières pour 2022-2023 sont de 10,4 millions de tonnes, soit 35% de plus qu’en 2021/2022 (le blé constitue environ 60% des importations de céréales).
Une éclaircie outre-mer
Bonne nouvelle pour le Maroc et pour les pays importateurs de céréales. L'Ukraine a repris ses exportations de céréales, avec le départ d'un premier bateau du port d'Odessa (lundi dernier) conformément aux termes de l'accord international avec la Russie signé le 22 juillet à Istanbul. Un accord similaire signé simultanément garantit également à Moscou l'exportation de ses produits agricoles et engrais, malgré les sanctions occidentales.
Ces deux accords doivent permettre d'atténuer une crise alimentaire mondiale qui a vu les prix monter en flèche dans certains des pays parmi les plus pauvres au monde en raison du blocage des ports ukrainiens par le conflit avec la Russie.
Selon les termes de l'accord, les navires et leur chargement doivent être inspectés à Istanbul, sous l'autorité du Centre de coordination conjointe (CCC). Pour l'heure, 8 navires au total ont pris la mer depuis la signature de l'accord, ont indiqué hier les autorités ukrainiennes, qui espèrent que trois à cinq navires pourront partir quotidiennement d'ici à deux semaines.
Si les exportations reprennent petit à petit, les marchés ne s'attendent cependant pas à une baisse spectaculaire du cours des matières premières. Les prix, tirés par une demande mondiale importante, demeurent hauts. Et l'Ukraine a prévenu que ses exportations de céréales devraient prendre des mois à retrouver leurs niveaux d'avant-guerre.
En définitive, avec des finances confortables l’État dispose toujours d’une marge de manœuvre pour supporter la charge supplémentaire de la compensation qui s’est chiffrée à 21 milliards de DH à fin juin, et assure toujours ses arrières en termes d’approvisionnement. Mais au-delà cette situation saura-t-elle perdurer ? Que fera le gouvernement face à une nouvelle année de sècheresse ou face à une guerre en Ukraine qui s’enlise avec des prix qui ne cessent d’augmenter? Sera-t-il à même de couvrir ses besoins l’année prochaine ?
Par Y.S