Accès à la propriété : Pourquoi les Marocains sont-ils conservateurs ?

Accès à la propriété : Pourquoi les Marocains sont-ils conservateurs ?

chantier

Ils préfèrent en majorité l’autoconstruction pour des logements de type marocain. Ce constat est plus visible dans les petites et moyennes villes. Il l’est moins dans les grandes métropoles à cause de la rareté du foncier. Ce type d’habitat correspond parfaitement à la culture marocaine.

La plupart des Marocains restent conservateurs en matière d’accès à l’habitat. Ils préfèrent la maison de type marocain et aussi l’autoproduction, avec moins de recours au crédit ban­caire. C’est un constat confirmé par la dernière enquête natio­nale sur le logement, publiée par le ministère de l’Habitat et de la Politique de la ville.

Même si les appartements et la copropriété gagnent du terrain dans les grandes métropoles, il n’en demeure pas moins que la maison marocaine reste bien cotée dans les petites et moyennes villes.

Plusieurs éléments d’ordre culturel, économique et social expliquent ce phénomène.

«Les Marocains préfèrent être indépendants dans leurs loge­ments. Ils ne tolèrent pas l’exis­tence de parties communes. Tout simplement, ils n’ont pas l’esprit de la copropriété. Par ailleurs, la maison marocaine convient parfaitement aux familles nombreuses ou com­posées. Ce sont des habitudes difficiles à changer. C’est un constat confirmé également par le haut-commissariat au Plan, lors du recensement de 2014. Les ménages sont à la recherche de ce type de loge­ment, même s’il se trouve à la périphérie des villes éloignées de leurs zones d’activité», explique Driss Effina, expert en immobilier.

En effet, pour des raisons cultu­relles et pratiques, les ménages optent pour ce type de loge­ment. Généralement, le rez-de-chaussée est réservé à des activités commerciales. Ces locaux sont soit loués, soit uti­lisés, même par les membres de la famille. Alors que les étages sont destinés à l’habita­tion principale ou à la location. Le père de famille peut léguer un étage ou une partie de la maison à ses enfants une fois mariés.

Le projet est le plus souvent réalisé par voie d’autoconstruc­tion. Cette formule inclut, en particulier, la réalisation des gros oeuvres, la charpente et la couverture. Pour les gros chan­tiers, elle exclut souvent les fondations et le terrassement, confiés à une entreprise.

C’est un marché qui obéit à un schéma classique. Il est investi par les petits promo­teurs opérant dans l’informel. Généralement, l’acquéreur, une fois le terrain acheté, confie le projet à un opérateur travaillant selon le mode artisanal, ne respectant aucune norme de sécurité.

«L’intérêt pour l’autoconstruc­tion s’explique par le fait que cette formule permet de réali­ser le projet par étapes, selon la disponibilité du budget, car le nombre de ménages faisant appel aux crédits bancaires est limité. D’une part, à cause de la faible bancarisation, mais aussi pour éviter les intérêts. Ce qui n’est pas le cas dans les pays développés. Toutefois, cette formule reste l’option préférée des Marocains pour mobiliser l’épargne. L’immobilier repré­sente de loin le secteur le plus investi par les ménages», sou­ligne Effina.

Le financement des maisons de type marocain se fait, en géné­ral, via des économies ou des prêts de la famille ou des amis. La superficie la plus demandée se situe entre 60 et 100 m2. Le coût du mètre carré est compris entre 1.000 et 2.000 DH, selon les finitions et hors foncier. Ce dernier dépend bien évidemment de son emplace­ment.

Reste que l’autoconstruction incite le plus souvent les pro­priétaires à quelques opéra­tions anarchiques, selon leur gré, surtout les modifications ou les surévaluations. Les auto­risations pour leur chantier sont limitées dans le temps. Mais les prétendants trouvent le moyen de les renouveler et contourner la procédure et la réglementa­tion en vigueur.

«Sur le plan technique, il faut noter que l’autoconstruction séduit du fait que le proprié­taire peut modifier son projet sans faire appel à un architecte ni à un bureau d’étude. Malgré les mesures de contrôle des autorités, l’esprit de clandesti­nité domine dans les construc­tions», affirme Effina.

Charaf Jaidani

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