Éducation : La société civile se mobilise

Éducation : La société civile se mobilise

altL’association «Citoyens du Maroc» a présenté récemment à la presse les résultats d’une étude réalisée sur un sujet qui intéresse fortement l’opinion publique, à savoir l’éducation nationale.Plus de 50 experts nationaux et internationaux, dont des institutionnels, des responsables de l’éducation, des enseignants, des politiciens, des parents d’élèves, des membres de la société civile… ont participé à l’élaboration de cette étude. L’association recommande une réforme qui repose sur l’approche systémique, en agissant sur 3 niveaux.

 La situation du système éducatif marocain est inquiétante pour ne pas dire catastrophique. Des voix ne cessent de s’élever pour dénoncer un système défaillant, voire en panne, qui met en péril l’avenir de toute une nation. Le processus de décollage socioéconomique dans lequel s’est inscrit le Maroc ne peut aboutir sans une base solide à savoir un capital humain qualifié et compétent.

Ce sujet qui ne cesse d'enflammer les débats, a fait l’objet d’une étude réalisée par l’association «Citoyens du Maroc», qui confirme un constat que l’on connaît déjà. Cependant, cette étude se différencie par l’analyse sous un nouvel angle d’attaque. En effet, contrairement aux autres études, l’association a choisi l’approche systémique, généralement retenue pour les changements de niveau 3, à savoir les plus profonds, plutôt que l’approche pédagogique. Durant deux ans (2012-2013), l’association a consulté plus de 50 experts nationaux et internationaux dont des institutionnels, des responsables de l’éducation, des enseignants, des politiciens, des parents d’élèves, des membres de la société civile et bien d’autres.

Il en ressort que depuis 15 ans, l’école marocaine n’a cessé de se dégrader pour arriver à l’état actuel à savoir un enseignement qui ne joue plus son rôle. Et pourtant, plusieurs réformes ont été engagées et des milliards de dirhams ont été investis pour redresser ce secteur aussi stratégique. 

«Malgré les réformes successives, le rendement ne suit pas. Pis encore, les évaluations internationales sont sans appel et révèlent un constat accablant, notamment en ce qui concerne la faiblesse des performances des élèves marocains, l'aggravation du taux de sortants sans qualification…», précise Youness El Himdy, président de l’association. Plus choquant encore est la récente déclaration de Rachid Benmokhtar, ministre de l’Education nationale, avouant que 76% des enfants ne savent ni lire ni écrire même après avoir passé 4 ans à l’école. Plusieurs questions se posent. Qui est responsable de cet échec ? Pourquoi les réformes engagées n’ont-elles pas abouti ? 

L’étude pointe du doigt l’inconstance et l’incohérence des politiques menées par les différents ministres à la tête de l’éducation nationale. En effet, chaque réforme engagée est annulée à mi-chemin et remplacée par une autre. L’arrivée d’un nouveau gouvernement implique un changement de stratégie et, par conséquent, un retour à la case départ.

L’Exécutif actuel n’a pas dérogé à la règle puisqu’il a lui aussi arrêté des chantiers fondamentaux du Plan d’urgence (Pédagogie de l’intégration, lycées de référence et d’excellence,...) et stoppé le plan qui fût le socle de la réforme depuis 2007.

Youness El Himdy a toutefois précisé que la responsabilité de la faillite du système éducatif national n’incombe pas uniquement à l’Etat mais à l’ensemble des acteurs, à savoir les syndicats, les différents départements ministériaux, les parents d’élèves, le corps professoral…

Que faire à présent ?

Pour engager une réforme en profondeur du système et sortir d’une impasse qui n’a que trop duré, l’association «Citoyens du Maroc» préconise une approche systémique incluant des dimensions non encore explorées et ce en agissant sur trois niveaux. 

La première proposition consiste à faire évoluer le rôle de l’Etat vers celui de régulateur de l’offre éducative lui permettant ainsi d’intervenir tant sur la qualité de l’éducation que sur les tarifs appliqués dans le secteur privé.

La deuxième repose sur la mise en place d’une nouvelle gouvernance qui se base, d’une part, sur une loi-cadre s’inscrivant dans la durée (10 ou 20 ans avec une révision tous les 5 ans), et d’autre part, sur la séparation des pouvoirs entre les organes de la politique éducative, de la planification stratégique, du contrôle et de l’évaluation et les organes d’exécution opérationnelle qui devraient être dévolus aux régions. «Cette loi-cadre, seule solution viable, mettrait fin au jeu de yoyo auquel se livre chaque gouvernement», souligne Moulay Ismaïl Alaoui, ex-ministre de l’Education nationale et membre de l’association.

En dernier lieu, l’association recommande d’entreprendre un projet d’assainissement et de rationalisation du système actuel. 

 

 

Les clés de la réussite

 

Pour mener à bien ce changement, l’étude recommande ce qui suit : créer un sens de l’urgence ; créer une vision ; former un groupe de «coalition» qui porte la nouvelle vision et qui travaille sans se baser sur l’ancien système ; communiquer le plus possible. Il est indiqué aussi d’incuber la nouvelle vision grâce aux personnes relais de la coalition ; investir de pouvoirs et des prérogatives nécessaires les porteurs du changement ; combattre les poches de résistance ; planifier et réaliser de «premiers bons résultats» et consolider les améliorations en vue de produire un changement meilleur.

 

Lamiae Boumahrou

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