Le processus de révision de la Moudawana avance. Lors d’une rencontre tenue ce mardi à Rabat, le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a détaillé les principaux amendements envisagés pour la refonte de ce texte central du droit familial.
Ces propositions, qui s’appuient sur les travaux de la commission ad hoc et les avis du Conseil supérieur des oulémas, touchent à des thématiques sensibles comme la polygamie, l’héritage, le mariage des mineurs et les procédures de divorce.
Polygamie : encadrement renforcé
L’une des propositions majeures concerne l’encadrement de la polygamie. Le projet impose désormais de consulter explicitement l’épouse lors de la signature du contrat de mariage, afin qu’elle puisse stipuler son refus de la polygamie. Si une telle clause est incluse, le mari ne pourra pas prendre une seconde épouse. En l’absence de cette stipulation, la polygamie serait limitée à des situations exceptionnelles, comme l’infertilité ou des maladies graves de la première épouse, et soumise à l’autorisation du juge, après examen de critères précis.
Tutelle et garde des enfants : vers une coresponsabilité
La réforme propose de rendre la tutelle légale sur les enfants un droit partagé entre les deux parents, aussi bien pendant le mariage qu’après le divorce. En cas de désaccord, un juge de la famille sera chargé de trancher. Cette modification vise à renforcer l’égalité parentale dans la prise de décision concernant les enfants. Concernant la garde des enfants, il est proposé d’accorder aux mères divorcées le droit de conserver cette garde, même après un remariage, tout en assurant un logement adéquat pour les enfants. De nouvelles règles seraient également introduites pour encadrer les visites et les déplacements, afin de protéger l’intérêt supérieur de l’enfant.
Héritage : ouverture à de nouvelles pratiques
Sur la question de l’héritage, le projet prévoit des ajustements basés sur les recommandations du Conseil supérieur des oulémas. Parmi ces changements figure la possibilité pour les parents de procéder à des donations en faveur de leurs filles de leur vivant. De plus, la possession de fait pourrait être reconnue comme un critère légal. Une autre mesure notable est l’autorisation des donations et testaments entre conjoints de confessions différentes, reflétant une évolution vers une approche plus inclusive.
Mariage des mineurs : des limites plus strictes
L’âge légal du mariage serait fixé à 18 ans, avec une exception possible à partir de 17 ans, soumise à des conditions rigoureuses et à un contrôle judiciaire renforcé. L’objectif est de limiter cette pratique aux cas réellement exceptionnels, tout en protégeant les mineurs.
Simplification des procédures : numérisation et réduction des délais
La révision vise également à moderniser les procédures judiciaires. Les affaires de divorce devraient être résolues en six mois maximum, grâce à une meilleure gestion numérique des documents et des décisions. Pour les Marocains résidant à l’étranger, il serait possible de se marier sans la présence de témoins musulmans, en cas d’impossibilité.
Ces propositions font partie d’un projet global de révision de la Moudawana, en réponse aux évolutions de la société marocaine et aux besoins exprimés par les différents acteurs concernés.