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Politique migratoire: «Il faut un effort collectif pour concilier intérêts nationaux et impératifs humanitaires»

Politique migratoire: «Il faut un effort collectif pour concilier intérêts nationaux et impératifs humanitaires»

Le Royaume est à la fois un pays de départ, de transit et de destination pour les migrants, et ce en raison de sa position géographique stratégique entre l'Afrique et l'Europe. Entretien avec Abdelkhalek Hassini, enseignant-formateur en France, conférencier, spécialiste en migration et développement, président du collectif «CADOriental Europe».

 

Propos recueillis par M. Boukhari

Finances News Hebdo : Quels sont les défis spécifiques auxquels le Maroc est confronté en matière de migration, tant en termes d’émigration que d’immigration ?

Abdelkhalek Hassini : Au cœur de la dynamique migratoire, le Maroc se trouve au carrefour des mouvements humains, confronté à une diversité de défis émanant tant de l’émigration que de l’immigration. En raison de sa position géostratégique singulière en tant que pont entre l’Afrique et l’Europe, le Royaume doit naviguer dans un écheveau complexe de migrations. D’une part, l’émigration des Marocains vers des horizons prometteurs est motivée par la recherche d’opportunités économiques et d’un meilleur niveau de vie. Cependant, cette aspiration est souvent entravée par des obstacles tels que les politiques d’immigration restrictives des pays de destination et le risque d’exploitation. Les migrants font face à des parcours semés d’embûches, où le rêve européen se heurte souvent à la dureté des conditions d’accueil. D’autre part, en tant que terre d’accueil, le Maroc doit composer avec l’intégration des migrants subsahariens cherchant à traverser la Méditerranée. La tension entre la protection des droits de ces migrants et la gestion des frontières représente un défi majeur dans cette dynamique migratoire.

En parallèle, l’émigration massive des jeunes marocains constitue un défi majeur pour le pays. Poussés par le désir d’améliorer leur qualité de vie et d’accéder à de meilleures opportunités éducatives et professionnelles, ils se heurtent à des barrières telles que les politiques d’immigration restrictives des pays de destination et le risque de marginalisation sociale et économique une fois à l’étranger. De plus, le phénomène de la “fuite des cerveaux” prive le pays de talents essentiels à son développement, créant ainsi une perte de ressources humaines qualifiées pour le développement national. En tant que pays d’immigration, le Maroc doit gérer l’arrivée de migrants, principalement d’Afrique subsaharienne, qui voient le Royaume comme une étape vers l’Europe. Cette situation crée des tensions socioéconomiques et pose des défis en matière d’intégration, notamment en termes d’accès à l’emploi, au logement et aux services sociaux. De surcroît, le contrôle des flux migratoires constitue un défi complexe pour le Maroc.

En tant que pays de transit, il doit faire face à des pressions internationales pour renforcer ses contrôles aux frontières tout en respectant les droits des migrants. Cela nécessite une coopération étroite avec les pays européens et une gestion efficace des ressources pour faire face aux défis de la migration irrégulière et de la traite des êtres humains. En définitive, les défis migratoires auxquels est confronté le Maroc sont multiples et complexes, impliquant à la fois des questions d’émigration et d’immigration. Pour y faire face tout en préservant la stabilité et le développement socioéconomique du pays, une stratégie collaborative et concertée s’avère indispensable. Cette approche requiert l’engagement non seulement du gouvernement marocain, mais également de la communauté internationale et des organisations régionales. L’attrait de l’ailleurs et le défi de l’intégration rendent crucial un effort collectif pour façonner une politique migratoire inclusive qui concilie les intérêts nationaux et les impératifs humanitaires.

 

F.N.H. : Quels sont les principaux domaines de coopération entre le Maroc et les pays européens en ce qui concerne la gestion des flux migratoires ?

A. H. : Dans un monde interconnecté, la coopération entre le Maroc et les pays européens revêt une importance cruciale pour gérer les flux migratoires de manière efficace et humaine. Cette collaboration multidimensionnelle s’articule autour de plusieurs domaines clés, où sécurité, développement économique, gestion légale de la migration et respect des droits de l’Homme convergent pour adresser les enjeux migratoires communs. La sécurité occupe une place centrale dans ce partenariat. La lutte contre les réseaux de trafic d’êtres humains et la migration irrégulière est une priorité partagée, impliquant une collaboration sécuritaire et judiciaire étroite. Des efforts concertés sont déployés pour renforcer les capacités de contrôle aux frontières, notamment par la formation des forces de sécurité et l’échange d’informations. En parallèle, la coopération en matière de développement économique et social vise à s’attaquer aux racines de la migration. Les programmes soutenus par l’Union européenne visent à créer des opportunités économiques dans les régions d’origine des migrants, réduisant ainsi les incitations à l’émigration.

Des investissements dans l’éducation, la création d’emplois et le soutien à l’entrepreneuriat contribuent à cette stratégie de développement durable. La gestion de la migration légale est également au cœur de cette collaboration. Le Maroc s’efforce d’harmoniser sa législation avec les normes européennes en matière d’immigration, favorisant ainsi la mobilité des travailleurs qualifiés et la réunification familiale. Des initiatives de dialogue culturel et social sont encouragées pour promouvoir la compréhension mutuelle et faciliter l’intégration des migrants dans les sociétés d’accueil. Parallèlement, la protection des droits des migrants et des demandeurs d’asile est un impératif. Le respect des droits de l’Homme est au cœur de cette coopération, avec des mesures visant à garantir un traitement équitable et digne des migrants. Des efforts sont déployés pour renforcer le système d’asile du Maroc et améliorer l’accès à la protection pour les réfugiés et les demandeurs d’asile, dans le respect des engagements internationaux. Pour conclure, la collaboration entre le Maroc et les pays européens dans la gestion des flux migratoires repose sur une approche globale et coopérative. Cette collaboration implique un dialogue ouvert, des politiques migratoires équilibrées et des programmes de développement ciblés. Elle incarne un engagement commun à trouver des solutions durables, de manière concertée et efficace, pour relever les défis migratoires tout en préservant la dignité humaine et contribuant à la stabilité et à la prospérité des deux régions. Fondée sur le respect mutuel, la solidarité et la recherche de solutions durables, cette collaboration bénéficie à toutes les parties prenantes. 

 

 

 

 

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