◆ A la galerie 38, les œuvres lyriques de dixhuit artistes anticonformistes se répandent dans une exposition baptisée éloquemment «La Vague Blanche». Entre impulsivité et minimalisme, tensions et engagements.
Il convient de commencer par rappeler ce que souligne Toni Maraini dans son essai, écrits sur l’Art : «à la fin des années 70, la situation artistique change encore; elle est déjà post-moderne dans son ambiguë complexité». Car au fondement des œuvres, à cette époque, un refus. Beaucoup d’artistes ont délaissé (irrévocablement ?) l’esthétique ou tendance en vogue alors, pour glisser sur une nouvelle «vague». Celle de l’ère actuelle… Autant fautil être un bon surfeur pour défier son immensité ?
Take off
Une image vaut mille mots. Alors, imaginez que dans cet océan (qu’est l’Art), la houle arrivait de tous les côtés. C’était super gros et épais à cause de sa taille. Il y avait un très puissant courant aussi… Mais assis(es) au pic en attendant les séries, certains(es) pouvaient apercevoir une «vague» plus au large. Une kyrielle de surfeurs (euses) se mettent à ramer vers elle. Ils/elles se retournent, rament encore et d’un bond se mettent debout.
La «vague» s’enroula assez sauvagement. Ce qui leur procure la sensation d’être déjà dans le chenal… Style décontracté, fluidité surclassaient les grosses manœuvres, ils/elles calèrent leur trajectoire de glisse avec un immense sourire qui barre leurs visages.
La modernité dans toutes les disciplines
La «vague» en question s’enroula en mille formes : celle de textes gravés sur verres d’Anwar Al-Nujùm. Celle de photogrammes à la gomme bichromatée polychrome sur papier coton de Mustapha Azeroual. Celle d’un livre (Histoire du Maroc) dans un aquarium en verre de Mohssin Harraki. Celle d’un tambourin avec pièce d’un Euro de Youssef Ouchra. Celle de sculptures de Max Boufathal, «Raging Bulls (2015)». Celle d’une colonne triangulaire composée par 3 bois de Nissrine Seffar. Celle de sérigraphie numérique sur plexiglas de Mohamed El Baz.
Celle d’installation tissage en laine naturelle d’Amine El Gotaibi, ou celle de 73 coques de grenades noirs MK2 sur cercle orange en bois de Mohamed Thara, ou encore l’installation faite de tables de classes de Sanae Arraqas. Celle de photographies de Yoriyas Alaoui, de Fouad Maazouz et de Randa Maroufi. Et celle encore d’une peinture pétulante d’Amina Benbouchta, Omar Mahfoudi et Hicham Matini. Des formes dont se détachent également Hicham Benohoud, Hicham Berrada et Mounir Fatmi.
La Vague Blanche
«’La Vague Blanche’ est utilisée pour décrire la nouvelle génération d’artistes contemporains marocains qui a émergé au début des années 2000. Échappant à l’ordre attendu, ces jeunes artistes anticonformistes vont bousculer la scène artistique au Maroc et permettre ainsi à une conception nouvelle de l’art contemporain d’émerger en créant des récits contemporains en rupture avec les pratiques artistiques du modernisme d’après-guerre», explique Mohamed Thara, commissaire de l’exposition dans un édito.
En effet, à l’aube du XXIème siècle, une autre génération d’artistes, qualifiée de «post-moderne», prend essor. Celle-ci a été tranchante avec les deux problèmes fondamentaux qui se posèrent alors aux artistes : celui de «l’avant-garde» (du présent par rapport au passé et aux exigences de la vie contemporaine), et celui de la tradition (du présent par rapport au passé et aux valeurs plastiques traditionnelles).
De fait, cette autre génération d’artistes mena une aventure créatrice libre, ouverte, fière et totalement décomplexée face au présent, avec ses projets et ses problèmes spécifiques, ses modes de création. «La Vague Blanche» apparaît non seulement comme un autre cri pour attirer l'attention, mais aussi pour cerner, par l’art, certains aspects esthétiques et formels de l’art actuel au Maroc. Ils/elles sont visiblement différents(es) sur la «vague». On ne saura les décrire. Les lignes qu’ils tracent, la grâce dans leurs mouvements, tout est à propos. Aloha Surf from Morocco !